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Lettre ouverte de Michel Lajoye à ses amis et soutiens

Clairvaux sur Aube, le lundi 22 mai 2006.

Chers amis,

Par ce présent courrier, je vous fais connaître la décision qui a été rendue le 18 mai par le Tribunal de l’application des peines de Troyes, devant lequel j’ai comparu le 30 mars dernier, et cela dans le cadre de ma demande de libération déposée en novembre 2005.

Alors, sans surprise, puisque la Licra était contre, le Tribunal de l’application des peines de Troyes (présidé par Céline Deshayes, ayant Bertrand Pagès et Caroline Kuhnmunch pour assesseurs) a rejeté ma requête. Il a en outre été stipulé dans le jugement que je ne pourrai pas déposer de nouvelle demande avant un délai de deux ans à compter de la date de rejet. Je rappelle que je suis incarcéré depuis le 12 décembre 1987, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour tentative d'assassinat, acte qui n'a causé aucune victime, pas le moindre blessé, et causé des dégâts tellement insignifiants qu’ils ne purent être chiffrés/pris en compte par un assureur…

La décision que le Tribunal de l’application des peines de Troyes vient de rendre, a été mûrement réfléchie. Cette fois, rien à voir avec une décision prise dans l’urgence comme ce fut le cas en juin 1990, lors de ma comparution devant les Assises du Calvados. Car à l’époque, après deux ans et demi de préventive, le procès n’était pas encore prévu, puis il fut inscrit précipitamment au rôle des Assises, au point que ce n’est que quatorze jours avant l’ouverture de l’audience que j’ai reçu ma convocation. La raison en était la manipulation de Carpentras et l’hystérie collective qui en a suivi. Au moins, en 1990, ceux qui m’ont condamné à perpétuité avaient l’excuse de l’atmosphère qui a suivi la carpentrasserie, mon procès avait été expéditif et le vedict rendu dans l’heure, à chaud, dans un Palais de justice « cerné » par des manifestants « antifascistes »… Cette fois, ce fut différent, car à l’issue de ma comparution devant le Tribunal de l’application des peines le 30 mars 2006, les trois juges ont eu un délibéré de sept semaines pour consulter le dossier. Par conséquent, la décision qui vient d’être rendue l’a été après consultations (reste à savoir de qui…).

Bien entendu, une procédure d’appel est engagée. Dans quelques mois l’affaire sera examinée par la Chambre de l’application des peines de la Cour d’appel de Reims. Mais je ne vois pas ce que cela changera puisque la Licra est contre l’idée même de ma libération… Dans ces conditions, le rejet par la Chambre de l’application des peines de la Cour d’appel semble assuré ! La seule chose qui risque de changer en appel, c’est le délai durant lequel je serai empêché de déposer tout nouvelle demande de libération. Il faut savoir que le détenu qui a l’outrecuidance d’interjeter un appel se voit ajouter un an d’irrecevabilité de plus pour lui apprendre à oser contester le bien-fondé d’une décision du Tribunal de l’application des peines. Ce qui veut dire qu’en cas de rejet de mon appel, le délai d’irrecevabilité sera porté de deux à trois ans et je ne pourrai pas espérer une libération avant fin 2009, mais plus sûrement début 2010 compte tenu des délais de procédure en appel. Je serai alors dans ma 23ème année de détention, et serai âgé de 43 ans.

Quoiqu’il en soit, ce jugement rendu le 18 mai n’est pas une surprise. A l’issue de l’audience du 30 mars, je savais déjà à quoi m’en tenir. Depuis l’entrée en vigueur d’un article de la Loi Perben II, il est d’usage de demander l’avis des victimes avant toute libération d’un détenu en conditionnelle. Dans mon cas, il n’y a aucune victime physique, et la justice n’a pas estimé utile de demander leur avis aux présents dans le bar que j’ai « plastiqué ». Mais en revanche, la même justice a consulté la Ligue des droits de l’Homme, ainsi que la Licra (pourquoi le MRAP a-t-il été snobé ?). La première a répondu qu’elle n’avait pas d’observation à formuler, mais la seconde s’est déclarée contre ma libération au motif qu’elle me dénonçait comme antisémite.

Je rappelle que je suis condamné à perpétuité pour avoir plastiqué un bar à fréquentation maghrébine, pas pour « antisémitisme », du moins officiellement, car officieusement j’ai un doute… En effet, lors de l’audience du 30 mars devant le Tribunal de l’application des peine, il a surtout été question des juifs en général, et non des maghrébins que j’ai « plastiqué ». D’où mon interrogation sur les vrais raisons de ma condamnation, de cet acharnement rabique à mon encontre… D’ailleurs, un observateur qui aurait assisté à l’audience du 30 mars, aux vues de ce qui se disait, aurait pu penser que ce que l’on me reprochait c’était surtout d’avoir « gravement offensé » la « Communauté » à travers divers articles de presse et un lettre écrite en… 1991 !

Dès lors, puisque la Licra est contre ma libération, et que l’on sait qui gouverne nos territoires occupés, madame More substitut du procureur auprès du TGI de Troyes, qui représentait le ministère public, s’est déclarée elle aussi contre. Tout en prenant soin de ne jamais regarder mon avocat ou moi-même lors de l’audience du 30 mars, elle a repris les propos tenus lors de ma condamnation devant la Cour d’assises du Calvados en juin 1990, savoir que je devais être condamné comme si la bombe avait tué, c’est-à-dire en l’état être maintenu en prison comme si il y avait eu mort. Les naïfs qui pesaient qu’en France les peines étaient individualisées, sauront avec cette affaire qu’il n’en est rien. Que l’on ne blesse personne, ou que l’on tue des dizaines de gens : c’est le même tarif, réclusion criminelle à perpétuité. Certes, il arrive parfois, et même souvent que l’assassinat soit puni de vingt ans de prisons, la tentative de dix ans et qu’il y ait libération à mi-peine. Mais il faut comparer ce qui est comparable : ne pas mélanger les auteurs de crimes crapuleux avec les gens dénoncés comme « antisémites » par la Licra.

Je dois aussi préciser que lors de l’audience du 30 mars, avant l’intervention du ministère public, la parole fut donnée à l’administration pénitentiaire à qui il a été demandé ce qu'elle pensait de l’idée de ma libération. Francis Gervais, le nouveau directeur-adjoint du Centre pénitentiaire de Clairvaux, après avoir dit que le personnel n’avait rien à me reprocher dans mon attitude et mon comportement en détention, a indiqué que l’avis de la Pénitentiaire était que ma libération serait très prématurée. Or, personne, ces dernières décennies, n’a été condamné comme j’ai été condamné, et absolument personne, n’a accompli plus de dix ans pleins de détention pour une tentative d’assassinat qui n’a causé aucune victime. Dire que c’est prématuré, alors que j’en suis à ma dix-neuvième année de détention, il fallait oser ! Et dans ce cas, si c’est « prématuré » alors que je n’ai tué ni blessé personne, comment se fait-il que ces mêmes fonctionnaires donnent des avis favorables à une libération après 15/18 ans de détention pour des violeurs assassins multirécidivistes, eux aussi condamnés à perpétuité ? Là encore, le deux poids deux mesures est flagrant, selon que l’on est un « droit commun », ou un « antisémite » dénoncé par la Licra…

Mon avocat, maître Delcroix, va continuer, via les fonds recueillis grâce à une collecte, à payer le loyer de mon logement. Cela jusqu’à la décision de la Chambre de l’application des peines de la Cour d’appel de Reims qui confirmera ou infirmera ce refus de me libérer.

Je vous adresse mes meilleures salutations,

Michel Lajoye

Commentaires

  • Merci beaucoup chère Gaëlle pour ces informations qui, malheureusement, sont un peu anciennes. Il faut faire connaître la situation de Michel Lajoye, qui est soigneusement cachée par tous les médiats. Le site qui vous a servi de source est inaccessible. Je ne sais pas si c’est normal. Mais il n’y a sans doute rien eu de neuf depuis. Je me demande si Michel Lajoye n’est pas le plus ancien prisonnier de France !

  • pire les membres d'action directe, auxquels son action peut-être comparée, sortent un a un. Ah ! s'il avait violé un petit garçon ou découpé une femme en morceaux (pour autant qu'elle soit blanche) son sort serait tout autre.

    probablement, abad, il est bien possible qu'il soit le plus ancien prisonnier de France

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