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Jean-Marie Le Pen: "on n'atteindra pas le port"

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Jean-Marie Le Pen à Saint-Cloud - 10 février 2009
Président du Front national, Jean-Marie Le Pen, 80 ans, sera candidat aux européennes en juin en Provence-Alpes-Côte d’Azur et candidat en 2010 aux régionales.

Politiquement parlant, est-il difficile d’avoir l’âge que vous avez ?
Jean-Marie Le Pen.
Non. Même si beaucoup l’ignorent encore, la durée de la vie dans notre pays a augmenté de quinze ans en l’espace de cinquante ans. Autrement dit, avec les critères anciens, j’ai aujourd’hui 65 ans et pas 80. J’ai toujours détesté le mot retraite, aussi bien dans le civil que dans le militaire. Clairement, je ne serai plus champion du 100 m. Mais, pour la politique, je suis suffisamment lucide pour savoir à quel moment il faudra me retirer. Je crois, en France en tout cas, que l’image du père celle du vieux chef n’est pas repoussante.
De De Gaulle à Pétain, on en a eu déjà pas mal d’exemples.

Le Conseil représentatif des institutions juives de France et le Conseil français du culte musulman sont scandalisés des « propos antisémites et xénophobes » que vous avez tenus à Marseille en parlant notamment de « M. Ben Gaudin »…
En quoi est-ce choquant de dire que, s’il y a demain 800 000 musulmans à Marseille, le maire serait forcément musulman ?

La communauté musulmane est outrée…
Il n’y a pas de « communauté musulmane ». Il y a juste quelques types qui parlent en son nom.

Comprenez-vous que le pape ait levé l’excommunication d’un évêque d’extrême droite qui déclare ne pas croire à la Shoah ?
Je crois à la liberté de penser et à la liberté d’opinion. Je ne vous en dirai pas plus dans une matière où, en France, il n’y a pas de liberté et où on est judiciairement condamné quand on a une opinion qui diverge de celle de l’établissement.

Pourquoi avez-vous assisté au dernier spectacle de Dieudonné ?

Je suis le parrain de sa fille. J’ai été une fois le voir au Zénith. Je n’étais pas ce soir-là dans la salle mais au promenoir. Je reconnais à M. Dieudonné, qui est un chansonnier, le mérite de la liberté.

La crise mondiale, à qui ou à quoi vous l’imputez ?
Je l’impute à la mise en oeuvre de l’utopie européo-mondialiste. On a voulu détruire les systèmes nationaux, les frontières, les cloisonnements, les règles pour nous imposer un monde libertaire où tout est autorisé, surtout aux puissants. A l’arrivée, on débouche sur une financiarisation de l’économie, sur des jeux de comptes sur la politique raciale des subprimes…

« Raciale » ?
Oui. On a voulu fournir des maisons à des gens qui n’avaient pas les moyens de se les payer et on l’a fait parce qu’ils étaient noirs. En pensant ainsi calmer des tensions éventuelles. Aujourd’hui, on n’en est qu’à la première étape de la crise car si les CDS (« credit default swaps ») suivent, ce sont des milliers de milliards de dollars qui peuvent alors faire sauter le système.

Le « système » capitaliste ?
Le capitalisme financier aboutissant à la réunion en quelques mains de moyens inimaginables. Quand on sait que M. Madoff a pu escroquer 50 milliards de dollars… et j’en connais en France des petites gens ruinées par Madoff…


Seriez-vous favorable à la suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu ?
Ce n’est pas une bonne idée. La notion qu’à M. Sarkozy des classes moyennes cela va du salarié au smic jusqu’au portier du Fouquet’s m’apparaît assez farfelue.
La vérité, c’est que le président Sarkozy, quoi qu’il en dise, a très peu de moyens d’agir sur la crise parce que, dans le Vendée Globe, nous sommes sur un bateau qui a déjà 2 t d’eau dans la coque et la voile déchirée. On n’atteindra pas le port.

Nicolas Sarkozy réclame une « moralisation »du capitalisme…
Comment se fait-il que M. Sarkozy, qui connaît très bien ces milieux-là, ne se soit pas aperçu qu’il y avait dans la constitution même de certaines grandes fortunes pas mal d’immoralité ?

Certains ne sont-ils pas allés trop loin ?
Sans doute…

Vous paraissez très sceptique devant l’idée de « moralisation » ?
Je suis assez sceptique, oui.

Olivier Besancenot est-il le Le Pen de la gauche ?
Besancenot est un trotskiste qui a, médiatiquement, le soutien du président et des milieux dirigeants. Parce que ces derniers souhaitent une extrême gauche forte pour qu’elle broute dans les champs du PS. Entre lui et moi, il n’y a rien de commun.

Encouragez-vous l’idée d’un partage en trois (actionnaires, salariés, investissement) des profits de l’entreprise ?
Les actionnaires sont des gens libres. S’ils estiment que le rapport de leurs investissements n’est pas suffisant, ils les retireront. Et l’action de l’entreprise chutera verticalement à la Bourse.

Comment se porte le Front national ?
En 2007, M. Sarkozy a capté une partie de mon électorat en copiant une partie de mon discours. C’était une arnaque car depuis, comme prévu, il dérive à gauche. Sarkozy répète sans cesse qu’il a tué le FN. Eh bien, il se trompe : le FN n’est pas mort car il chante encore. Les deux tiers de ceux de nos sympathisants qui s’étaient laissés tenter par Sarkozy sont en train de décrocher. Qui trop embrasse mal étreint. M. Sarkozy ne peut pas espérer aller de l’extrême droite à MM. Besson et Kouchner. Maintenant, « l’Huma » est citée dans toutes les revues de presse du matin...

Le FN sera-t-il présent à la présidentielle de 2012 ?
La présidentielle est l’élection clé.

Et vous, vous serez là ?
Moi ? Non. Sauf circonstances exceptionnelles. Si une campagne électorale devait avoir lieu très vite, seul un homme d’expérience pourrait y aller. Et, dans ce cas seul, j’irais.

Que vous inspire le sort réservé à Rachida Dati ?
Cette petite bonne femme ne se défend pas si mal. Elle a une certaine dignité, une certaine allure. Certains sont bien cruels avec elle.

L’heure est-elle toujours aux réformes ?
C’est un choix : ou on accepte le bras de fer et on fait respecter sa politique, ou on capitule. Mais, avec Sarkozy, on connaît la réponse : il a enfilé les bottes de Chirac. Il va diriger à gauche, en essayant de conquérir par le charme ce qu’il ne peut plus obtenir par l’autorité. A l’arrivée, ce sera évidemment l’échec.

Si vous deviez demain choisir, à une présidentielle, entre Nicolas Sarkozy et Martine Aubry…
Oh, ne me mettez pas, Seigneur, devant ce cruel dilemme ! Mais bon, si je ne peux pas faire autrement, je ne sais pas si je n’essaierais pas Mme Aubry.

Le Parisien -15 février 2009

Commentaires

  • Toujours aussi clairvoyant et charmant à lire et à entendre.
    Encore une fois, comme depuis toujours, me demander pour qui je vais voter ne me causera pas de migraine.
    Les autres me paraissent toujours aussi tocards et maladroitement empruntés en comparaison.

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