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Dans l'Oise, le parti de poche d'Eric Woerth

Au nom de quoi Liliane Bettencourt a-t-elle pu signer un chèque à l'intention d'Eric Woerth, le 4 mars 2010 – si l'on en croit l'enregistrement «pirate» de l'une de ses conversations privées avec Patrice de Maistre, son gestionnaire de fortune. Dans quel cadre légal ?

 

Ce 4 mars 2010, en effet, il semble que Patrice de Maistre a présenté trois chèques à la milliardaire, pour paraphe: le premier, selon ses dires, à l'intention de «Valérie Pécresse» ; le deuxième au bénéfice d'Eric Woerth; le troisième en faveur de Nicolas Sarkozy.

          Interrogé, par la suite, sur la nature précise de ces versements, l'homme de confiance de Mme Bettencourt a répondu en variant les versions, puisqu'il a d'abord parlé, pour Eric Woerth, de «10.000 euros pour la construction d'un auditorium» (en récompense d'un coup de pouce supposé du ministre). Puis le 20 juin, son avocat, Me Pascal Wilhelm, a assuré au Journal du dimanche que l'héritière de L'Oréal avait «aidé (...) Eric Woerth à hauteur de 7.500 euros». Sur quelle base légale? Pressé de l'expliquer, le gestionnaire de fortune a lâché une énormité, dans sa dernière interview au Figaro (le 25 juin), en déclarant que la milliardaire avait ainsi financé la «campagne des régionales» d'Eric Woerth...

 

Le hic, c'est que celui-ci ne s'est jamais présenté aux régionales de 2010: si une vingtaine de ministres ont concouru, il n'en faisait pas partie...

 

Il faut donc chercher ailleurs, en gardant à l'esprit la petite phrase lâchée par le maire de Chantilly lors de son «Grand jury RTL-Le Figaro-LCI» (le 27 juin dernier). Questionné sur l'existence d'une telle «remise d'argent» de la part de Liliane Bettencourt, il a en effet glissé: «Oui, dans le cadre de ma vie politique»... Sous-entendu: sa vie politique propre, pas celle du trésorier de l'UMP (fonction qu'il occupe depuis sept ans). Qu'est-ce que ça veut dire?

 

En fouillant, Mediapart est tombé sur un petit parti étonnant, agréé dans la seule région Picardie, où le ministre du travail est maire de Chantilly. Son nom: «Association de soutien à l'action d'Eric Woerth». Inconnu sur place (à l'exception sans doute de quelques proches), cette organisation a le statut de parti politique à part entière.

Tout à fait légal, il est doté d'une association de financement ad hoc (détachée de toute campagne électorale spécifique) pour collecter des fonds. C'est un parti intégralement dévoué à Eric Woerth, qui n'a touché aucune cotisation en 2008 (donc sans adhérent apparent à l'époque), d'après les derniers bilans comptables rendus publics.

 

Dès lors, est-ce à l'ordre de cette «Association», très personnelle, que Liliane Bettencourt a signé un chèque en mars 2010 (un don plafonné à 7.500 euros par la loi)? Interrogé par Mediapart, au travers de sa chargée de communication, le ministre n'a pas répondu.

 

Si cette piste était avérée, il pourrait s'en trouver gêné... Car c'est une chose de récolter de l'argent auprès de Liliane Bettencourt pour le compte de l'UMP; mais c'en est une autre que de bénéficier des fonds de la milliardaire, qui emploie son épouse, pour financer son parti «maison», sa petite machine électorale...

Par Mathilde Mathieu - MEDIAPART - 29 juin 2010

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