Marine Le Pen n’arrive pas à réunir plus de 350 signatures de maires pour se présenter à l’élection présidentielle. La "dédiabolisation" du FN a-t-elle échoué?
Cela n’a rien à voir! Les équipes de Marine se sont sans doute laissé abuser en pensant que ce serait plus simple qu’avec Jean-Marie. Mais le sujet n’est pas celui-là. La vérité, c’est que les maires font la grève des signatures. Ils se disent : pourquoi vais-je remplir une obligation dont je ne peux attendre que des inconvénients ? Bien sûr, Jacques Cheminade, qui est crédité de moins de 0,1 % dans les sondages, n’a pas de problème. Il ne gêne personne. Pour un candidat de la trempe de Marine, qui menace à la fois Hollande et Sarkozy, c’est une autre affaire…
Et si Marine Le Pen était empêchée, en quoi cela serait-ce si grave? Vous l’avez vous-même été en 1981…
Je pense que si ma fille ne peut pas être candidate, ce sont plus de 20 % des électeurs qui ne pourront s’exprimer. Ce serait la fin de M. Sarkozy. Il serait battu. Les électeurs du Front national ulcérés ne le lui pardonneraient pas et ils ne seront pas les seuls…
Notre sondage Ifop teste pourtant l’hypothèse d’une élection sans Marine Le Pen. Que pensez-vous de ces résultats?
C’est de la politique-fiction. Je vous l’ai déjà dit, je ne crois pas que les électeurs de Marine acceptent qu’on leur vole leur candidate. M. Sarkozy aurait tort de se réjouir, ce type de sondage pourrait inciter les maires à faire preuve de courage et réveiller leur sens de la démocratie.
Nicolas Sarkozy n’est tout de même pas responsable de la campagne du FN…
En tant qu’adversaire politique, sans doute pas. Mais il est le président de Marine Le Pen, comme de tous les Français. Il aurait été de son devoir de trancher ou de faire trancher cette question par son Premier ministre. Il leur suffisait de déclarer que ces parrainages n’avaient pas de signification politique, mais uniquement une fonction administrative.
Difficile d’échapper à une interprétation politique…
Je comprends que le candidat Sarkozy soit tiraillé. Il doit se dire, si Le Pen est dans la course, elle peut être devant moi, et si elle n’y est pas, ses électeurs me le feront payer. Pourtant, il faut revenir à l’esprit de la loi, qui n’avait pour but que d’écarter les candidatures farfelues. Le général de Gaulle ne voulait pas de parrainages. Il s’est laissé convaincre d’en accepter 100. Lecanuet, sur l’initiative de Giscard d’Estaing, en a imposé 400 de plus, et la publication du nom des maires signataires. C’est là que la magouille a commencé. En 1981, j’ai été piégé par la défection de dernière minute d’une centaine de parrains RPR. C’était une manœuvre de Chirac pour faire élire Mitterrand… Cela ne va pas recommencer!
Vos adversaires vous soupçonnent, comme à chaque élection, de dramatiser la situation…
C’est tout à fait faux. J’ai la conviction que Marine arrivera en tête du premier tour. Nous n’avons jamais menti. Lorsque j’étais candidat, j’ai dû appeler moi-même les maires pour arracher les signatures qui me manquaient. En 2002, j’avais évalué que la quête de ces 500 parrainages m’avait coûté entre 400.000 et 500.000 euros.
N’avez-vous pas de regrets de regarder, cette fois, le match sur le banc de touche?
J’ai mené sept campagnes et j’ai été cinq fois candidat. Si j’avais voulu l’être à nouveau, je l’aurais été. J’ai été élu député pour la première fois il y a cinquante-six ans, j’avais comme collègues Édouard Herriot et Paul Reynaud. Alors non, je n’ai pas de frustration.
Quel est votre rôle aujourd’hui?
J’apporte mon expérience. En tant que président d’honneur, je suis présent statutairement à toutes les réunions de décision du parti. Marine fera entre 10 et 15 grands meetings et moi deux, à Béziers et à Toulon, car on me demande. Je vais là où elle ne va pas.
Le JDD - 05/02/12
Commentaires
Il ne me parait pas évident que le hongrois serait battu si Marine était empêchée de se présenter. En tout cas, le fromage et le hongrois sont bien d’accord pour cette manœuvre : ils sont complices !