Par lefigaro.fr Mis à jour le 06/04/2012 à 17:48
L'avocat général a demandé l'annulation de toute la procédure judiciaire, estimant que la justice française n'était pas compétente dans cette affaire. La décision est attendue le 24 mai.
C'est le procès de l'une des plus graves catastrophes écologiques que la France ait connu qui risque d'être balayé le 24 mai. La Cour de cassation devra alors se prononcer sur la procédure judiciaire qui a fait suite au naufrage, le 12 décembre 1999, du pétrolier Erika au large de la Bretagne. Or l'avocat général, qui représente l'État, préconise dans un document transmis récemment aux parties civiles et révélé par Ouest-France et Libération, «la cassation sans renvoi de l'arrêt» confirmé il y a deux ans par la cour d'appel.
La Cour de cassation ne peut pas se prononcer sur le fond du dossier mais uniquement sur la procédure elle-même. Ici, l'argument de l'avocat général est simple: selon lui, la justice française était «incompétente» à statuer sur cette affaire car l'Erika, au moment du naufrage, était «un navire étranger se trouvant en zone économique exclusive», c'est à dire hors des eaux territoriales. Ce serait donc la loi de l'État du pavillon du navire, en l'occurrence Malte, qui s'appliquerait.
Le «préjudice écologique» remis en cause
Quatre responsables avaient été condamnés au plan pénal par la cour d'appel de Paris le 30 mars 2010. La société de classification Rina, l'armateur Giuseppe Savarese et le gestionnaire Antonio Pollara avaient respectivement écopé de 375.000 euros et deux fois 75.000 euros d'amendes. Contre Total, affréteur du pétrolier, les juges avaient retenu une imprudence dans la sélection du navire, qui a valu au groupe une amende de 375.000 euros. Pour le «préjudice écologique», reconnu pour la première fois par la justice, le montant des dommages et intérêts avait été fixé à 200,5 millions d'euros. C'est Total qui le premier s'est pourvu en cassation.
Si la cour décide de suivre l'avis de l'avocat général, les condamnations seront annulées. Or au conseil régional des Pays de la Loire, on indiquait jeudi soir qu'un autre document crucial pour l'audience du 24 mai, le rapport préparatoire au débat contradictoire devant la cour, va dans le même sens que celui de l'avocat général. En outre, les conclusions du ministère public tendraient aussi à «balayer le préjudice écologique», une notion que précisément la procédure de l'Erika avait permis d'introduire en droit. «C'est une situation invraisemblable de retour à la case départ», s'alarme l'entourage du président du conseil régional, Jacques Auxiette.
De son côté, l'ONG Greenpeace dit craindre «une catastrophe juridique après la catastrophe écologique». Dans un communiqué, l'organisation explique que ce jugement s'apparente à «mettre en place le mode d'emploi du parfait pollueur pour obtenir une immunité». Greenpeace parle d'une «jurisprudence très grave» et propose une réforme du droit maritime «pour que ce soit les états victimes qui aient la compétence pour poursuivre les responsables d'une marée noire ou d'un préjudice enrionnemental».
Un pas important pour la «sécurité juridique», selon Total
Pour l'avocat de Total, la décision de la Cour de cassation serait au contraire importante pour la «sécurité juridique». Cette analyse «conforte» ce que le groupe pétrolier avait dit au procès sur «l'incompatibilité entre les traités internationaux et le code pénal français», a estimé vendredi Me Daniel Soulez Larivière. De même, la fédération française des armateurs a estimé qu'il fallait «juger et punir les vrais responsables dans le respect des règles du droit international».
Selon l'avocat de Total, les «171 millions d'euros» de dommages et intérêts déjà versés aux parties civiles à l'issue du premier procès ne seraient toutefois pas remis en cause si la cour de cassation suivait l'avis de l'avocat général, «pas plus que les 200 millions d'euros versés», notamment pour le nettoyage des plages.
Commentaires
Il leur a fallu plus de dix ans pour se rendre compte de cela ?
"La décision est attendue le 24 mai."
Quelques semaines après les élections.
Ce tas de ferraille ne méritait pas ce nom là ;o)