Le parquet requiert la fermeture de King Halal pour des motifs sanitaires
La boucherie, l'une des plus importantes de Marseille, emploie aujourd'hui une quinzaine de salariés.
Photo Pierre Schipman
L'ordre public économique doit pour une fois s'effacer devant l'ordre public sanitaire." L'hypothèse d'une mise au chômage de la quinzaine de salariés de King Halal, une grande surface de boucherie de la rue de Lyon (15e) n'a pas échappé au procureur Jean-Luc Blachon.
Mais "le cheptel d'infractions" reprochées à ses gérants, le risque sanitaire encouru par une clientèle nombreuse sont tels, aux yeux du magistrat, que "cet établissement n'a pas de légitimité à fonctionner à Marseille". Jean-Luc Blachon requiert donc contre la personne morale, la Société générale des viandes, une amende de 200 000 € et la fermeture de l'établissement durant trois années. Et contre l'ancienne gérante dix-huit mois de prison dont dix avec sursis et 50 000 € d'amende.
Le tribunal se prononcera le 17 décembre sur le sort de cette boucherie, l'une des plus achalandées de Marseille, avec un chiffre d'affaires de 5 millions d'euros par an. Une boucherie qui, il y a quelques années, à l'aide d'investissements importants, avait voulu "révolutionner le marché de la viande halal sur Marseille, en créant un établissement moderne de taille importante", rappelle son avocat Me Itey.
Provoquées par des clients préoccupés de la qualité de la viande vendue, les inspections des services vétérinaires d'octobre 2009 et juillet 2010 s'étaient soldées par un recensement d'infractions dont l'énumération couvre trois pages du rôle de l'audience. Les plus graves sont celles de tromperie sur une marchandise entraînant un danger pour la santé comme l'importation de Grande-Bretagne de têtes de moutons, interdite depuis des années par les autorités sanitaires nationales dans le but de protéger les consommateurs de l'encéphalopathie spongiforme bovine (le prion de la vache folle).
Erreurs d'étiquetage indiquant une provenance "France" sur des viandes d'origine belge ou espagnole, hachage opéré à l'avance sans l'agrément nécessaire, dates limites de consommation dépassées, matériel malpropre présentant un risque de souillure, "sols couverts de déchets et de sang séché", températures de conservation non respectées... La liste est interminable. Les mises en demeure de la Direction départementale de la protection des populations sont restées lettre morte.
L'ancienne gérante, absente à l'audience, ne s'en était que mollement défendu : "Nous allions faire le nécessaire, nous allions demander les autorisations, nous allions installer des lave-mains. Nous ne nous sommes pas mis en conformité". L'actuelle gérante, une ancienne caissière, s'étonne des poursuites. "Je ne vois pas l'intérêt de vendre des produits périmés et à ma connaissance, il n'y a jamais eu de plaintes de clients."
Soupçons sur les merguez
À l'été 2010, un urgentiste de l'hôpital Nord opérait un signalement après l'admission de trois personnes présentant des symptômes d'intoxication et disant avoir acheté des merguez à King Halal. Mais le lien de causalité n'a pas été démontré.
Le préfet avait ordonné une fermeture du 31 août au 22 septembre 2010. "Les mesures correctives ont été prises et la boucherie a été rouverte aux normes", précise Me Itey "abasourdi par ces réquisitions de condamnation à mort de la société". Aux réquisitions d'une "peine exemplaire", Me Itey oppose une mauvaise appréciation des choses : "On vous construit un inventaire à la Prévert et on complète avec des infractions non établies et sans importance pour la santé. Les errements du passé ne méritent pas que la société soit condamnée à la faillite".
La Provence
Commentaires
Au fait combien de bouchers ont été réduits au chômage par King Halal?