par Emmanuel BERRETTA
La municipalité de Fréjus a réagi à la vive émotion créée dans la ville à la suite de la diffusion sur Arte d'un documentaire allemand, le 22 janvier, attribuant à un attentat du FLN la catastrophique rupture du barrage de Malpasset en décembre 1959 qui avait causé plus de 400 morts à Fréjus, en contrebas. "Nous pensons que la ville de Fréjus, qui a déjà beaucoup souffert, se doit de protéger la mémoire des victimes et de leurs familles dans le respect de la vérité", communique le cabinet du maire Élie Brun. Néanmoins, puisque le doute est semé, la ville va "saisir les ministères concernés pour qu'une enquête soit diligentée".
La thèse de l'accident - un glissement de terrain après des pluies diluviennes - a toujours été la version officielle des autorités françaises, confirmée par un arrêt du Conseil d'État de 1971. C'est donc une bombe que la chaîne Arte a lâchée le 22 janvier au détour d'un documentaire nourri par les archives de la Stasi et des services d'espionnage de l'Allemagne de l'Ouest.
"Allégation"
De son côté, Arte défend le sérieux de l'enquête, et notamment le témoignage de M. Schmidt-Eenboom, spécialiste reconnu de l'histoire des services secrets allemands, président de l'Institut de recherche pour une politique de paix (Forschungsinstitut für Friedenspolitik e.V.). Ce spécialiste affirme que la catastrophe de Malpasset était due à un attentat du FLN dont l'espion ouest-allemand Richard Christmann (un ancien espion du IIIe Reich) avait eu vent, avant de répercuter l'information précise à ses supérieurs. Une thèse qu'il avait développée dans un livre, Dans l'ombre du IIIe Reich - Le BND et son agent Richard Christmann, paru en 2011, qui "avait donné lieu en Allemagne à des débats, mais qui n'avait cependant pas eu d'écho significatif en France," précise Arte.
"Cette allégation n'est corroborée par aucune preuve tangible ni démenti quel qu'il soit ! réagit la municipalité de Fréjus. Jamais aucune trace d'explosifs ou de malveillance n'a été retrouvée !" Et la mairie de rappeler l'énorme travail d'enquête de l'époque : une commission rogatoire conduite par un juge d'instruction du parquet de Draguignan a été nommée dès le lendemain de la catastrophe. Le site a été immédiatement interdit au public et sécurisé. Le juge a nommé par ailleurs des experts scientifiques en matière de géologie, hydrologie et travaux publics. Les conclusions de l'enquête ont été confirmées sous serment en octobre 1964. On peut revoir ici le reportage de la télévision française de 1959.
Le Point - 28/01/13