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Ce pays se déteste à ce point qu’il s’apprête à ériger en héros nationaux ceux qui ont refusé de mourir pour son drapeau.
Comme il fallait s’y attendre, c’est avec la lancinante complainte des mutins, des déserteurs et autres fusillés pour l’exemple que la France va entamer la célébration du centenaire de la Grande Guerre. Ce pays se déteste à ce point qu’il s’apprête à ériger en héros nationaux ceux-là mêmes qui ont, un jour, refusé de monter au front et de mourir pour son drapeau.
Sept cent quarante fusillés, dont il faut rappeler que près de cent cinquante étaient des condamnés de droit commun, vont occulter médiatiquement et donc historiquement, car l’école va, à n’en pas douter, emboîter le pas des médias, un million trois cent mille soldats morts pour la France et plus de quatre millions de blessés.
Pour préparer cette réhabilitation en forme de triomphe inversé, les arguments compassionnels sont agités de toute part comme autant de petits drapeaux blancs, nouvel emblème d’une société qui ne peut plus regarder ni la mort ni le sens du devoir en face. Ces hommes, nous explique-t-on, n’ont pas déserté, pas même failli, non, en réalité, ils ont simplement fléchi…
Oui, simplement fléchi quand les autres, les centaines de milliers d’autres, eux, sont tombés sous le feu de l’ennemi sans un murmure, sans une plainte, à même la terre qu’ils défendaient pied à pied.
Avons-nous le droit de condamner ces déserteurs ou ces mutins qui, depuis des années, vivaient comme des rats écrasés par un déluge de métal et de feu ? Comment pouvons-nous imaginer ce que fut leur souffrance, leur terreur, leur rage et peut-être même leur honte ? Qu’aurions-nous fait à leur place, nous qui mobilisons une cellule de soutien psychologique chaque fois qu’une tempête un peu violente vient tout simplement nous rappeler que la nature n’est pas nécessairement bienveillante ? Ces questions sont évidemment brandies comme autant d’arguments en faveur de la réhabilitation des fusillés. Ces questions, chacun de nous, installé dans un confort inimaginable il y a un siècle, se les pose en conscience, mais seuls, à mon sens, ceux qui ont fait la guerre sont légitimes pour y répondre.
Pour autant, cette souffrance, cette terreur, cette haine et parfois peut-être même cette honte de ce qu’ils étaient devenus, pouvons-nous supposer une seule seconde que ceux qui essuyèrent continuellement le feu jusqu’au bout ne les éprouvèrent pas eux aussi ? Pourtant, ils ont tenu, ils n’ont pas fléchi, ils ont fait front.
Nous n’avons pas à juger ceux qui ont déserté, un tribunal militaire s’en est autrefois chargé, nous pouvons essayer de comprendre ce qu’a pu être leur calvaire, mais considérer, même à un siècle de distance, qu’ils sont morts pour la France, plus d’un million de croix de bois nous l’interdisent, à jamais.
VALEURS ACTUELLES 10/10/13
NdB: Ce n'est pas notre pays qui se déteste... ce sont ceux qui détestent la France qui veulent faire des déserteurs et des mutins des HEROS de la Nation.