Entretien avec Jean-Yves Le Gallou réalisé par Charlotte d’Ornellas
♦ « Depuis 1803 (Ire République !), la base de la nationalité est la filiation et, donc, le droit du sang : un expatrié a, par exemple, des enfants français. »
Le mot « Français » est souvent complété d’une appartenance communautaire… Que veut-il dire ?
Il existe deux sens très différents au mot « Français » aujourd’hui :
– un sens administratif, d’abord : être français, c’est avoir une carte d’identité française ;
– un sens historique et culturel, ensuite, pour les Français de civilisation européenne et d’expression française.
De ces deux définitions découlent une série de confusions devenues récemment caricaturales avec l’expression « djihadistes français ». Cette appellation est juridiquement vraie mais elle n’a aucun sens si l’on considère la définition culturelle et historique du mot « Français ».
Quelle évolution du Code de la nationalité a permis un tel fossé entre différents « Français » ?
Depuis 1803 (Ire République !), la base de la nationalité est la filiation et, donc, le droit du sang : un expatrié a, par exemple, des enfants français.
Mais cette règle a été progressivement déviée par l’ajout d’éléments de droit du sol : un enfant né en France de parents étrangers peut devenir automatiquement français entre 13 et 18 ans, et un enfant né en France de parents eux-mêmes nés en France est automatiquement français… S’ajoutent à cela des naturalisations de masse sans sélection. Résultat : on fabrique chaque année autour de 150.000 « Français » dont beaucoup ne sont absolument pas assimilés.
Il y avait eu un grand débat en 1986 autour de la suppression de ces éléments de droit du sol. Le slogan du FN était : « Etre français, cela s’hérite ou se mérite », mais ce point de vue était aussi défendu par le RPR et l’UDF ! Malheureusement, cette même année, de nombreuses manifestations étaient organisées contre la loi Devaquet qui voulait réformer l’Université et, à cette occasion, un jeune manifestant d’origine immigrée, Malik Oussekine, était mort… Victime d’une campagne de sidération médiatique, le gouvernement Chirac avait alors abandonné sa loi sur l’Université et la réforme de la nationalité.
Il créait à la place la Commission de la nationalité qui a théorisé la conception « citoyenne » de la nationalité contre la volonté du peuple qui avait soutenu à 55% des partis opposés à celle-ci.
Comment en est-on arrivé à parler de « Français de souche » ?
En 1987, la conception de la nationalité française dite « citoyenne » est donc adoptée.
En clair, tout le monde peut être français s’il réside en France et adhère à un minimum de « valeurs » républicaines (ce qui n’est même pas vérifié ni réellement défini) : une coquille vide, conception très abstraite, cache-sexe d’une communautarisation du pays. On s’est mis alors à parler de Français juifs, de Français noirs, de Français musulmans… Et le Français « moins », c’est-à-dire le Français tout court, s’est alors retrouvé dans l’expression de « Français de souche », résultat d’une conscientisation qui a débuté dans les années 2000 grâce au site François Desouche.
Le Français de souche, c’est un Français blanc, de civilisation européenne et de religion ou d’héritage chrétien.
Le problème, c’est que les Français « plus » sont particulièrement protégés : interdiction de les « stigmatiser », et des associations soi-disant représentatives (CRIF, CRAN, CFCM) font valoir leurs exigences. A partir du moment où l’on refuse toute spécificité d’origine, de culture, d’histoire, de civilisation au concept de Français, il ne reste plus rien et les revendications identitaires de toutes sortes divisent la France. Parler de « vivre ensemble » dans cette situation est totalement hors-sol : il n’existe nulle part, ni dans les habitudes alimentaires, ni dans le choix du lieu de vie, de l’établissement scolaire ou des références culturelles. Il est le cache-sexe d’une société éclatée puisqu’il ne peut y avoir de communauté nationale sans communauté de civilisation. Le problème n’est pas nouveau, Aristote le disait déjà !
Qui pourrait représenter les Français de souche ?
Pour les Français de souche, le vote FN est la voie politique la plus évidente pour exprimer leur « cri de douleur ». Mais les dirigeants du FN entendent, eux, s’adresser aux « Français de toutes origines » – ce qui peut se comprendre – et ne sont pas loin d’adhérer à la conception citoyenne de la nationalité…
Il y a, là encore, un fossé qui se creuse : les deux principaux dirigeants rejoignent cette conception citoyenne de la nationalité alors que les militants, les adhérents et une très grande partie des cadres et des élus défendent une conception civilisationnelle de la nationalité. Les Français de souche sont encore en grande majorité, mais ils sont les véritables orphelins de la République.
On ne parle plus que de « République ». Où est passée la France ?
Le mot « République » est effectivement devenu un mot-valise pour désigner tout ce qui est politiquement correct : il a remplacé les mots « nation » et « identité ».
On ne parle plus de France mais de République. Rappelons-nous pourtant que si la Guerre de 1914 a été conduite par des « nationaux républicains » (Poincaré, Clemenceau, les généraux), les soldats, eux, sont morts pour la France ! On meurt pour quelque chose de charnel, pas pour une idée abstraite.
Quelles solutions ?
Même si l’expression « Français de souche » est sortie de la bouche du président Hollande dans un contexte ultra-stigmatisant puisqu’il s’agissait de qualifier le profanateur du cimetière juif de Sarre-Union (qui, par ailleurs, est d’extrême gauche), il s’est imposé quand même. C’est une première victoire sémantique pour tous ceux qui développent une volonté de réappropriation de leur identité.
Ce combat trouve désormais un relai intellectuel chez Zemmour, Juvin, Finkielkraut, Camus, Millet mais également dans LMPT, les Veilleurs ou les propos de Béatrice Bourges.
Ces discours permettent une conscientisation des origines de la France. Il y a donc une demande populaire et une expression intellectuelle : les Français de souche sont encore très largement majoritaires ; l’enjeu est donc désormais de tenter un renversement politique malgré la dictature médiatique.
Il faut enfin s’affranchir de la culpabilisation imposée dans la sphère publique : ce système communautaire qui détruit la France ne tient plus que grâce à une propagande intense qu’il faut contrer. Et à laquelle, surtout, il ne faut pas céder !
Jean-Yves Le Gallou
Président de Polémia.
Ancien député européen
essayiste
1/03/2015
Source : Boulevard Voltaire.fr
Polémia – 2/03/2015
Commentaires
La France est Veuve sans son Roy, tout simplement.
Qu'il se libère de cette peste, il retrouve très vite une grande santé, l'Histoire l'a montré partout, comme en Espagne par exemple.
Excellente mise au point de Jean-Yves Le Gallou sur la citoyenneté française !
Ajoutons qu’il est urgent de stigmatiser le mot « république ». Ce dernier est désormais la nouvelle appellation de notre pays dans la bouche de nos dirigeants : ceux-ci répugnent à utiliser le mot « France » : il est évident en effet que la « France « est en train de disparaître et donc il vaut mieux ne plus en parler. Mais le peuple, lui continue à croire en la France et à penser français ! En outre la république n’a que 150 ans au plus alors que la Royauté a plus de 15 siècles d’histoire, et en comptant nos racines gréco-latines, on a derrière nous 3000 ans d’histoire non républicaine,, au moins : par exemple les monuments mégalithiques du bassin méditerranéen ou de Bretagne ont 7000 ans d’histoire! Autrement dit la « république », dite la « gueuse » représente une court instant, probablement éphémère, de notre histoire ! On peut parfaitement être Français et ne pas reconnaître la république! Voilà pourquoi ce mot ne peut remplacer la France et nous devons dénoncer avec force son usage totalement dévoyé et inapproprié en matière politique !
... et un excellent commentaire, merci, cher abad!
C'est d'ailleurs plus qu'un commentaire, mais un véritable petit article que j'ai le plaisir de publier ici!
Dans la bouche de l' AntiFrance maçonnique, le terme République ne désigne pas un mode de gouvernance politique, comme dans beaucoup de pays, mais une entité divine, aboutissement de ses espérances " planetariennes ".
Il est aussi lancé comme un mot magique , dont le contenu n' est jamais précisé, destiné à hypnotiser le citoyen et à le ranger de façon pavlovienne aux côtés du pouvoir.