Par Cyrille Louis
Mis à jour le 26/12/2016 à 19h07
REPORTAGE - La nuit de Noël des enfants abandonnés de Cisjordanie se fête dans l'unique refuge établi pour eux en plein centre de Bethléem.
Envoyé spécial à Bethléem
Les petits pensionnaires de la crèche de Bethléem ont fêté Noël avec une semaine d'avance. C'était la condition pour que la cinquantaine d'enfants scolarisés avec eux puissent partager cet instant avant de rejoindre leur famille pour les congés de fin d'année. Un membre du personnel doté d'un léger embonpoint a pour l'occasion revêtu un costume grenat et une barbe blanche. Des fous rires et des chants ont retenti lorsqu'il s'est avancé dans le long couloir de l'«orphelinat» où quarante-six bambins, âgés de quelques jours à 6 ans, sont pris en charge par les Filles de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul.
Fondé en 1884, l'unique refuge pour enfants abandonnés de Cisjordanie est établi en plein centre de Bethléem. L'hôpital de la Sainte-Famille, principale maternité de la ville gérée par l'Ordre de Malte, occupe le bâtiment voisin, tandis que la basilique de la Nativité se trouve à moins d'un kilomètre. «Notre mission consiste à recueillir, en partenariat avec la police et les services sociaux de l'Autorité palestinienne, tout nourrisson trouvé sur la voie publique ou mis au monde par des femmes qui ne peuvent pas les garder», résume sœur Denise, responsable de l'établissement.
Deux autres religieuses, ainsi que quarante-cinq employés et cinq bénévoles, animent ce havre où vingt-deux nouveau-nés ont été recueillis depuis le début 2016. «Un record», assure le personnel de la crèche. L'un avait été abandonné sur le seuil d'une mosquée de Bethléem, un autre sur un terrain vague à la périphérie de Naplouse. «Certains ne passent ici que quelques jours, mais d'autres resteront jusqu'à leurs 6 ans et rejoindront ensuite un foyer pour enfants plus âgés», précise sœur Denise.
Les archives de la crèche, miroir d'une société dont les conservatismes placent parfois de très jeunes femmes face à des dilemmes impossibles, regorgent d'histoires dramatiques. Le 28 novembre, l'un de ses employés a dû se rendre en urgence à Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, pour recueillir un nourrisson abandonné quelques heures plus tôt au siège du Croissant-Rouge. Après une rapide enquête, les services de police ont retrouvé sa mère et l'ont mise en sécurité dans un foyer spécialisé. Le père de l'enfant a pour sa part été incarcéré. «Pour sa propre sécurité, précise Iskander Andon, un travailleur social employé depuis seize ans par les sœurs. S'ils les retrouvent, les membres de la famille de la jeune femme s'empresseront de tuer les parents et l'enfant pour venger ce qui est ici perçu comme une atteinte intolérable à leur honneur.»
Passant devant la pouponnière, sœur Denise s'arrête un instant pour cajoler le plus jeune de ses pensionnaires. La mère du bébé l'a mis au monde le 6 décembre dans la maternité voisine. Par césarienne. Quatre semaines avant le terme de sa grossesse. «Les services sociaux de la ville où elle réside, craignant que ses proches ne découvrent son état, leur ont fait croire qu'elle était gravement malade et qu'elle avait besoin d'être hospitalisée pour plusieurs semaines», raconte Iskander Andon.
Des naissances en catimini
Admise fin août à l'hôpital de la Sainte-Famille, la jeune femme a pu y passer la fin de sa grossesse à l'abri des regards, mais sous la surveillance des médecins. «Ces accouchements sont généralement pratiqués en fin de journée et toujours par le même médecin afin qu'il y ait le moins de témoins possible», ajoute Denis Sevaistre, le directeur de l'établissement. La jeune maman a regagné son foyer quarante-huit heures plus tard, tandis que le bébé était pris en charge à la crèche.
«Ce sont évidemment des situations très douloureuses, admet sœur Denise, mais il faut bien comprendre que la plupart de ces jeunes femmes risquent la mort si leur famille découvre la vérité.» Les responsables de la crèche savent de quoi ils parlent. Un jour de janvier 2003, une adolescente de 14 ans a été tuée par de proches parents dans un village voisin de Ramallah peu après avoir accouché, à l'abri des regards, d'un petit garçon qu'elle avait confié aux Filles de la Charité. «Victime d'un viol intrafamilial, elle avait pourtant été prise en charge avec l'accord de la police et du chef du village», se rappelle Iskander Andon. Les étudiants de l'université de Bir Zeit se mobilisèrent à l'époque pour dénoncer ce crime d'honneur. Mais les auteurs bénéficièrent des circonstances atténuantes prévues par une vieille disposition héritée du droit jordanien…
Les petits pensionnaires, une fois à l'abri derrière les murs épais de la crèche, ne sont pas pour autant au bout de leurs épreuves. Présumés musulmans, ils reçoivent un prénom, mais ne pourront jamais porter le patronyme de leur père. «Une marque indélébile aux yeux de nombreux Palestiniens», regrette sœur Denise.
L'adoption souvent interdite
La loi applicable en Cisjordanie, fortement inspirée du droit islamique, interdit l'adoption si bien que la majorité de ces bambins seront orientés vers d'autres foyers à l'âge de 6 ans. Quelques-uns seront pris en charge par une famille d'accueil, où leur intégration sera plus ou moins facile selon la réaction de l'entourage. «Dans certains cercles très conservateurs, les choses se compliquent lorsque l'enfant parvient à l'adolescence, car sa cohabitation avec des femmes qui ne sont pas ses parentes biologiques suscite des réticences», témoigne Iskander Andon.
Conscients de cet écueil, Kheir et Aoula se sont juré de tout faire pour en préserver leur petit Nour. Avant de recueillir ce bébé âgé d'un an à peine, ce couple établi à Bethléem a surmonté un parcours du combattant administratif et familial. «Nous avons dû subir une enquête de moralité et prouver que nous avons les moyens de subvenir à ses besoins», explique Kheir. «Il a aussi fallu rassurer certains membres de notre entourage, qui s'inquiétaient de voir un étranger arriver dans la famille», sourit Aoula.
Après des longs mois d'attente et d'innombrables visites à la crèche des Filles de la Charité, la jeune femme et son mari ont accueilli le garçonnet à la fin de l'été. Quatre mois plus tard, Nour se promène à quatre pattes dans l'appartement familial comme s'il n'avait jamais connu d'autre foyer. Ses parents, eux, ne se lassent pas de l'admirer. «Quoi qu'en pense le cheikh ou l'Autorité palestinienne, disent-ils, Nour est notre fils et nous donnerons tout pour qu'il ait une vie heureuse.»
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du 27/12/2016.
Commentaires
L'islam est une saloperie, on en a une fois de plus la confirmation avec le sort réservé aux filles et aux enfants !
Ces petits sont innocents de tout et doivent être protégés par leur communauté, quelle que soit celle-ci !
ces personnes : religieuses , employées , et bénévoles ont bien du mérite pour effectuer cette tâche , sauver et protéger de petits innocents , d,un monde en folie .
salutations.
Voilà des personnes, des religieuses que j'admire et que je respecte. Face à la cruauté stupide de l'islam envers les femmes, et aussi les enfants, elles témoignent de la véritable charité chrétienne, ne ménageant pas leur peine. Pour moi, ce sont de saintes personnes,