La Région Paca et le Mémorial de la Shoah ont emmené des jeunes de l'académie d'Aix-Marseille et de Nice pour un voyage d'étude. Bouleversant
Son pas est un peu hésitant dans les allées aux pavés irréguliers du camp de Birkenau, rendus glissants par la neige et le gel. Des pavés qu'elle a dû si souvent poser, entre des fossés parfois creusés de ses propres mains. Ginette Kolinka, 93 ans, n'y voit plus très bien et n'a plus la démarche de sa jeunesse mais elle n'a rien perdu de sa vivacité d'esprit, de son humour, ni de ses souvenirs. Aux côtés des lycéens de l'académie d'Aix-Marseille, mardi, puis mercredi avec ceux de Nice, elle a témoigné de sa vie ici, à Auschwitz, pendant sa déportation.
"Les mots ne suffisent pas, il faut aussi voir"
"Je ne sais pas comment on a fait, mais on l'a fait, raconte-t-elle dans l'un de ces baraquements où elle et les autres déportées passaient leurs nuits, serrées à six, tête-bêche sur des paillasses. Avec les coups, les humiliations, les cris, l'odeur, la saleté, les latrines. Vous avez appris tout ça dans les livres mais les mots, ça ne suffit pas, il faut aussi voir. Et encore, ce n'est pas assez. Même ici, vous ne voyez plus rien." Les adolescents sont immobiles, silencieux, le visage grave. Le récit de Ginette se fait colère : "Je suis révoltée contre cette idée : comment des êtres humains ont-ils pu faire ça. Par haine. Voilà où mène la haine", assène-t-elle avec force.
Un peu plus tard, c'est Christian Estrosi, maire de Nice et président délégué à la Culture de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui est venu déposer des gerbes de fleurs devant le monument dédié aux victimes. "C'est un devoir d'emmener des jeunes ici, chaque année depuis 15 ans, explique l'élu. Lorsque je croise certains d'entre eux, qui ont aujourd'hui 30-35 ans, et qui me disent "Ce voyage nous a transformés, ça a changé notre vie", je me dis que c'est une victoire de plus."
Les petits groupes avancent dans l'immensité du camp, sous de timides flocons. Ils écoutent les guides, observent les photographies miraculeusement sauvées du chaos et surtout ne manquent pas une miette du récit de Ginette Kolinka. "Derrière les chiffres, les ruines, il y a le sort des individus. C'est une chance de pouvoir passer une journée avec elle", explique Olivier Lalieu, le responsable des projets externes au Mémorial de la Shoah, l'autre grand acteur de ce déplacement.
Il y a aussi la mobilisation des profs. Sophie Le Guen, professeur d'histoire au lycée Langevin de La Seyne-sur-Mer, travaille avec sa classe sur un projet de bande dessinée. "Nous retraçons le parcours de déportés varois, précise-t-elle. Nous avons travaillé avec des archives, un illustrateur, tenté de mettre des noms et des histoires sur l'Histoire. Mon but, c'est de faire réfléchir les jeunes sur la société actuelle également. Ils ne sont pas responsables du monde dans lequel ils vivent mais peuvent y contribuer. En tout cas, j'y crois."
"Bientôt, je ne serai plus là. Et ce sera à vous de raconter tout ça."
Étape ultime dans l'un des imposants bâtiments de brique rouge du camp d'Auschwitz. Une montagne de cheveux est exposée derrière une immense vitre. "Regardez, c'est tout ce qui reste d'un million et demi de personnes, reprend Ginette dans un souffle. Il n'y a plus que ça." Les lycéens qui l'entourent restent muets. "Bientôt je ne serai plus là. Et ce sera à vous de raconter. Parce qu'il y a eu tant de morts et pas une seule tombe", prévient-elle.
"On réalise, ici, ce qui s'est passé. On percute, tranchent Saskia et Léa, 20 et 21 ans, qui étudient les métiers d'art au lycée du domaine d'Eguilles, à Vedène. C'était intense, éprouvant, surtout la fin de la visite, où l'on pouvait voir des objets, mettre des visages et des noms sur ce drame." Théo, 17 ans, en classe de première métiers de la sécurité au lycée professionnel de l'Estaque à Marseille, partage ses sensations "bizarres" à la fin de ce périple, son malaise face au "vide" des camps : "J'ai l'impression d'avoir compris des choses", résume-t-il pudiquement. Lui et ses camarades réaliseront un web-documentaire. Une façon de devenir les témoins de ce témoin qu'ils ont rencontré. Des graines, en tout cas, auront été plantées durant ces deux journées. Puissent- elles être fécondes.
Ginette Kolinka déportée à auschwitz le 13 avril 1944 : "Avignon, les Baumettes... et les camps"
Longtemps, Ginette Kolinka - la mère de Richard Kolinka, batteur du groupe Téléphone - n'a rien dit. À personne. "J'avais juste l'impression d'avoir eu la chance d'être rentrée. Et que c'était déjà beaucoup. Certains ont repris leurs études. Moi, je suis devenue vendeuse de culottes et de chaussettes sur les marchés", confie-t-elle en souriant. Et puis, en 2000, elle a décidé de ne plus s'arrêter de raconter l'enfer d'Auschwitz. Depuis, elle est sur toutes les routes de France, de Saint-Malo à Toulouse. Dans les lycées, les médiathèques, elle parle de son histoire, sait bien qu'elle est l'un des derniers témoins de la tragédie. Six fois par an, elle accompagne des lycéens à Auschwitz-Birkenau, là où elle a été déportée. "Et puis ça me fait du bien, ça stimule", sourit-elle.
Née à Paris, quartier du Marais, dans une famille modeste de sept enfants, Ginette Kolinka échappe à la Gestapo en 1942 en réussissant à rejoindre la zone libre. Elle vit dans la région d'Avignon, travaille sur les marchés, mais elle est dénoncée et arrêtée avec son père et son frère le 13 mars 1944. "Vous avez ceux qui aident et vous avez ceux qui dénoncent", regrette-t-elle. Après 15 jours à la prison des Baumettes, à Marseille, elle rejoint Drancy. Puis Auschwitz, par le convoi nº 71, le 13 avril 1944. 1 500 personnes sont déportées ce jour-là. 1 265 sont gazées dès leur arrivée. Seuls 165 hommes et 91 femmes sont "sélectionnés" pour entrer dans le camp.
"Là, on passe très vite à l'état de bête. Mon cerveau était vide, je ne réfléchissais plus. Comment pouvez-vous d'ailleurs penser quand vous avez tout le temps la mort en face, questionne celle qui est devenue ici l'amie de Simone Veil, internée à la même époque. Je crois que j'ai laissé mes sentiments ici. Depuis, je ne sais plus ce que c'est de pleurer." Malgré tout le temps passé à raconter, Ginette Kolinka se pose toujours autant de questions. "Je n'arrive toujours pas à comprendre comment tout ça a pu exister, s'interroge-t-elle. Parfois, je me demande aussi si tout ce que je dis, tout ce que je raconte, va laisser des traces. Tous les jeunes que je rencontre semblent émus... Mais après ?"
Commentaires
Ce n'est nullement la place d'adolescents mineurs dans ces lieux: on peut leur raconter n'importe quoi sans qu'ils aient un sens critique à même de pouvoir faire la part des choses et poser les bonnes questions. Tout repose uniquement sur l'émotionnel et un sens unique de développement de l'Histoire, toujours le même...
"Je n'arrive toujours pas à comprendre comment tout ça a pu exister..." : bonne question ;o)
j,ai visité le camp de Dachau , cela n,a pas changé ma vie , un cousin de ma mère est mort six mois après le retour de sa déportation , arrêté et torturé pour faits de résistance , d,autres membres de ma famille ont été résistants , je n,ai jamais entendu des cris de haine envers le peuple Allemand de leur bouche du temps de leur vivant .
salutations.
Ginette "n'a rien perdu de son humour" (sic).
Au passage, elle confirme le chiffre réactualisé des morts à Auschwitz, 1,5 millions (sic) au lieu des 4,5 millions indispensables pour faire 6 millions, chiffre religieux inamovible sous peine de prison. Soit 3 millions de moins (un détail) que le chiffre Malgré cela, 6-3= toujours 6 !
L'endoctrinement des jeunes, et des moins jeunes, à la nouvelle religion de la shoah est indispensable pour maintenir la culpabilité des Européens, pas seulement allemands (la Pologne vient de s'en rendre compte !!).
Auschwitz est le socle sur lequel s'appuient toutes les forces mondialistes et remplacistes. Si Auschwitz n'avait jamais existé, ils auraient trouvé autre chose !