Malgré les appels à reporter le scrutin, la junte militaire birmane a organisé samedi un référendum sur une nouvelle Constitution une semaine après un cyclone qui a ravagé le sud du pays faisant 60.000 morts ou disparus et plus d'un million de sinistrés sans aide.
A l'instar des Nations unies, le parti de l'opposante Aung San Suu Kyi avait pressé la junte de repousser le référendum et de donner la priorité aux secours des survivants désespérés.
La Maison Blanche s'est quant à elle abstenue de critiquer directement la décision des autorités birmanes d'organiser le référendum, en soulignant seulement que le régime devrait se concentrer sur les opérations de secours.
Le cyclone, l'une des pires catastrophes naturelles de l'histoire récente, a fait quelque 23.000 morts et 37.000 disparus, selon un bilan officiel. Mais des diplomates occidentaux à Rangoun évoquent plus de 100.000 morts, et les organisations humanitaires redoutent un bilan encore plus lourd si les rescapés, qui n'ont ni à boire ni à manger, ne sont pas sauvés.
Réagissant à ce bilan effrayant, le président français Nicolas Sarközy a dénoncé samedi un régime "éminemment condamnable qui (...) refuse l'aide internationale".
La chancelière allemande Angela Merkel a jugé "inacceptable" le refus de Rangoun de collaborer avec les organisations humanitaires, au cours d'une conversation téléphonique avec le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon.
La Ligue nationale pour la démocratie de Mme Suu Kyi a aussi estimé que le bilan s'aggravait "de jour en jour" à cause des restrictions imposées par la junte à l'aide et a appelé l'ONU à envoyer une assistance "par tous les moyens".
Cette aide arrive au compte-gouttes, notamment parce que le régime birman, obsédé par la défense de sa souveraineté, refuse que les opérations de secours soient conduites par des étrangers.
Le cyclone Nargis a fait entre un million et demi et deux millions de sinistrés, mais 500.000 seulement ont reçu une assistance, ont estimé les Nations unies.
Un premier convoi de 20 tonnes d'aide est arrivé en Birmanie, par la route, en provenance de Thaïlande, a annoncé le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés.
Le Programme alimentaire mondial (PAM) a annoncé la reprise de ses vols humanitaires. Le PAM a également affirmé avoir récupéré une cargaison d'aide arrivée à bord d'un de ses avions en Birmanie. Mais la cargaison des deux autres avions du PAM arrivés vendredi était en revanche toujours entre les mains des autorités birmanes.
La Maison Blanche a confirmé que les généraux birmans avaient accepté une première aide américaine, et un avion militaire devrait se poser lundi en Birmanie.
La France a annoncé l'envoi d'un bateau chargé de 1.500 tonnes de produits et de matériels, qui pourrait arriver en Birmaniemercredi ou jeudi.
Un Illiouchine-76 affrété par Médecins sans frontières (MSF), avec 35 tonnes de matériel à bord, a quitté samedi la France à destination de la Birmanie. Un avion de Médecins du monde et de la Croix-Rouge, transportant 36 tonnes de matériel, qui devait partir samedi, a été retardé.
L'ONU a lancé un appel de fonds de 187 millions de dollars pour aider pendant six mois la Birmanie, mais M. Ban Ki-moon n'a toujours pas réussi à entrer en contact avec le numéro un birman, le généralissime Than Shwe.
C'était la première fois que les Birmans étaient appelés à voter depuis des élections législatives en mai 1990 très largement remportées par le parti de Mme Suu Kyi.
A l'époque, les militaires avaient refusé d'honorer les résultats, et l'opposante, prix Nobel de la paix, a été privée de liberté pendant la majeure partie des 18 dernières années.
Selon la junte, l'approbation de la Constitution ouvrira la voie à des "élections multipartites" en 2010 et à un "transfert de pouvoir" progressif aux civils, mais des dissidents estiment que le texte enracine au contraire la suprématie de l'armée, au pouvoir depuis 1962.
L'opposition n'a pas été associée au processus d'élaboration de la Constitution qui rendrait inéligible Mme Suu Kyi, au motif controversé qu'elle a été mariée à un étranger, le Britannique Michael Aris, décédé en 1999.