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entretien

  • Revu et corrigé par les censeurs de l'Elysée!

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    Les lecteurs du Parisien invités hier matin 25 février à l'Elysée
    Extraits de l'entretien

    C'est un entretien exceptionnel que le président de la République a accordé aux lecteurs du « Parisien » et d'« Aujourd'hui en France », hier à l'Elysée. Chute dans les sondages, mariage avec Carla, panne du pouvoir d'achat, affaire de la vidéo...

    IL Y A PLUS de trois mois que l'Elysée avait dit oui - sans qu'une date ait été fixée - à l'idée d'un face-à-face entre un panel de nos lecteurs et le président de la République. Il y a une semaine, soudain, les choses se sont précisées. Et le mardi 19 février en fin de journée une date a été fixée : ce serait le lundi matin 25 à l'Elysée.

    Vite, nous avons constitué un panel, et rendez-vous a été pris. Le tout n'a donc strictement rien à voir avec l'affaire de la vidéo tournée samedi au Salon de l'agriculture, et qui bat tous les records sur le site du Parisien.fr. Avant d'être reçus par Nicolas Sarközy à l'Elysée, nos lecteurs - compte tenu des horaires - ont préparé l'entretien en sélectionnant leurs questions dans une salle du palais mise à leur disposition. Alors que cette phase de préparation s'achevait hier matin, qui ont-ils vu surgir ? Carla Bruni-Sarkozy en personne, presque timide et souriante. Ayant appris leur présence, elle tenait, dit-elle, à saluer les lecteurs qui s'apprêtaient à questionner son mari.

    Tard hier soir, l'Elysée nous a fait parvenir sa version amendée et corrigée de cet entretien. La voici.

    NARCISSE EBONGUE MAKOLLE. Comment réagissez-vous devant le manque de confiance des Français à votre égard, dont témoignent les derniers sondages ?

    Nicolas Sarközy. Avec lucidité et avec calme.

    Pour devenir président, il faut en passer des collines, des vallées, des montagnes ! Il ne faut pas croire, quand les sondages sont bons, que tout va bien et quand les sondages sont mauvais, que tout va mal. Si on réagit comme ça, on n'arrive jamais au bout ou d'un projet. Mais je me dois d'être lucide et d'en tenir compte. Des épreuves, j'en ai connu dans ma vie comme tous les Français. J'ai été élu pour cinq ans pour transformer la France. C'est mon travail, c'est ce que je vais faire. On élit quelqu'un pour qu'il affronte les épreuves. Je m'y étais préparé. J'observe également le décalage immense entre ceux que le gouvernement met en oeuvre sur le fond des choses et la caricature qui en est parfois présentée. Je vais m'attacher à mieux présenter notre politique afin qu'elle soit mieux comprise.

    ANNE KAMINSKY. Vous déclenchez des sentiments exacerbés chez les Français, de l'admiration jusqu'à l'animosité, voire la « sarkophobie ». Vous sentez-vous responsable de ces sentiments ?


    Oui. Ce serait malhonnête de dire : quand je suscite des sentiments de grand amour je le dois à mon supposé charisme, et quand je suscite des sentiments de grand rejet, ce serait la faute des autres. Ma conception du rôle du chef de l'Etat, ce n'est pas de cultiver la sympathie, d'être le copain qu'on rêverait d'avoir. Pendant des décennies la France n'a pas fait les choix qu'elle aurait dû faire. Mon travail c'est d'affirmer des convictions et d'avancer. Forcément vous touchez des gens, en positif ou en négatif. Je suis donc responsable même s'il m'arrive de penser qu'il y a de l'outrance. Ainsi, me présenter comme raciste parce que je veux une véritable politique d'immigration dont la France a besoin. Ce n'est pas du débat, c'est de l'outrance. Quand le journal « Marianne » titre en couverture : « Sarkozy est-il fou ? ». Cela me blesse et c'est de l'outrance encore une fois.

    CLAUDE-SOPHIE GUIRAUDET. A propos de la vidéo qui circule sur Internet, avec votre apostrophe « Casse-toi, pauvre con », la mère que je suis se pose la question : le président peut-il se comporter comme Monsieur-tout-le-monde ? Cela me rappelle le « coup de boule » de Zidane...


    Il est difficile même quand on est président de ne pas répondre à une insulte, j'ai sans doute les défauts de mes qualités. Ce n'est pas parce qu'on est le président qu'on devient quelqu'un sur lequel on peut s'essuyer les pieds. Cela étant, j'aurais mieux fait de ne pas lui répondre.

    « Hyper médiatisé ? Je vous demande de me croire : je ne le cherche pas »

    PHILIPPE LARATTE. Est-il possible d'être hyperactif et aussi productif que vous l'êtes aujourd'hui sans être hyper médiatisé ? Ne faut-il pas prendre plus de recul ?


    Hyperactif, c'est mon devoir pour réveiller un pays qui sommeillait. Je ne porte pas de jugement critique sur ce qu'ont fait, ou pas, les autres. Hyperactif, je le dois à la France parce que, si le président ne s'engage pas, ça ne bouge pas. De cette pièce où nous sommes pour prendre des décisions, à l'arrivée dans les administrations, quand je demande 100, j'obtiens 10. Si je ne tape pas du poing sur la table, si je n'exige pas des résultats, il ne se passe rien. C'est normal, les gens ne veulent pas d'ennuis. J'aurais moins d'ennuis dans l'inertie mais dans ce cas je ne ferai pas ce que j'ai promis aux Français. Hyperactif, il faut donc que je le sois car les Français ont le sentiment qu'on n'a pas tout fait pour obtenir des résultats. Hyper médiatisé ? Je vous demande de me croire : je ne le cherche pas. Je ne vois pas d'ailleurs comment je pourrais empêcher la publication de ces photos.

    MARIE-THÉRÈSE DESJARDINS. Aujourd'hui, c'est l'état de grâce pour votre Premier ministre François Fillon. Comment le vivez-vous ?


    C'est moi qui ai choisi le Premier ministre, c'était donc une bonne décision.

    L'évolution n'était peut-être pas prévisible cependant ?


    Dans les couples président-premier ministre, il y a toujours eu des épisodes comme ça. Mais ce n'est pas un problème pour moi, c'est plutôt une solution. Ça prouve que la politique qui est mise en oeuvre est la bonne et que le décrochage est dû non pas à la politique, mais à des événements qui sont apparus dans ma vie et que j'ai dû gérer. Par ailleurs, la raison de continuer avec un Premier ministre ne réside pas dans les sondages, mais dans la qualité du travail qu'il accomplit.

    NICOLAS TEINDAS. En Arabie saoudite, vous avez dit « Dieu est dans le coeur de chaque homme ». Est-ce votre opinion personnelle où vous exprimiez-vous en tant que chef d'Etat ?


    En Arabie saoudite se joue une partie absolument essentielle. C'est le pays gardien des lieux saints, la Mecque, et l'Arabie saoudite doit tenir face aux extrémistes. Le roi Abdallah d'Arabie saoudite, quelques semaines avant mon voyage, est allé voir le pape, ce qui est un geste extraordinaire pour le gardien des lieux saints de l'Islam. Il lui a dit: « Ce que nous avons en commun, les religions, est beaucoup plus important que ce qui nous divise ». C'est un geste considérable ! J'ai donc fait un discours sur les religions en disant qu'il était scandaleux de tuer, d'exclure au nom des religions. J'ai dit qu'il n'y a pas un mot de la Torah, pas un mot de la Bible, pas un mot du Coran qui prône la violence, la haine et l'extrémisme. Et que tout devait être fait pour éviter la guerre des religions entre l'Islam et l'Occident. Voilà pourquoi j'ai parlé des religions. Pour le croyant, Dieu est en chaque homme. C'est une phrase que j'ai reprise d'une homélie de Jean-Paul II quand il est venu parler aux JMJ à Longchamp. Je ne dis pas que la religion est la réponse à tous nos problèmes. Mais je constate que quand on a abandonné la morale religieuse, on a abandonné également la morale laïque, et on n'a plus du tout fait de morale. Je respecte ceux qui ne croient pas. Moi-même je ne suis pas pratiquant. Mais Malraux a dit « Le XXI e siècle sera religieux ou ne sera pas ». Le grand problème du monde, c'est d'éviter que les extrémistes fassent basculer le monde dans une guerre des religions. Je crois profondément à la laïcité, mais je ne pense pas que la laïcité doive être une laïcité de combat. La laïcité, c'est reconnaître un droit, le droit de croire ou de ne pas croire. La politique, ça sert à organiser la vie entre la naissance et la mort. Mais ce n'est pas la politique qui répond à la question « Pourquoi la naissance et quoi après la mort ? » C'est ce qu'on appelle la quête de sens. Je ne dis pas qu'il n'y a que le spirituel qui peut y répondre, mais pour beaucoup ça compte. Chaque fois qu'on va à l'enterrement d'un membre de sa famille ou d'un ami, on se dit : la seule chose dont on est sûr, c'est que ça nous arrivera. Je ne suis pas le seul à y réfléchir.

    RAJA YAGOUBI. Quand vous étiez ministre de l'Intérieur, vous avez décidé de supprimer la police de proximité. Il y a quelques semaines, votre ministre de l'Intérieur a annoncé de nouvelles mesures réinstallant cette police.


    Regrettez-vous votre décision de l'époque et quels seront les plus de cette police ? 1997-2002, la délinquance augmente de 15 %. 2002-2007, elle a reculé de 14 %, avec le même appareil statistique. Je ne veux pas rentrer dans la polémique, mais ça n'a pas du être tout à fait inutile ce que j'ai fait. Et d'ailleurs les gens sentent que ça va mieux. Il y a 25 % de délinquance en moins dans les trains. Tout n'est pas réglé, mais on a obtenu des résultats.