Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

hormone de croissance

  • La mort des autres

    1022222360.jpg
    Fernand Dray, 85 ans

    AFP. 24 mai 2008. Quatre peines de prison avec sursis et trois relaxes requises: l'accusation a fait mercredi la part des responsabilités dans "l'accumulation invraisemblable d'imprudences et de négligences" commises dans le scandale sanitaire des hormones de croissance remontant aux années 80.

    1830168117.jpg
    Photo de David Lasserre mort en 1991
    Après trois mois et demi d'audience au tribunal correctionnel de Paris, les vice-procureures Danièle Mirabel et Dominique Pérard se sont relayées durant cinq heures pour un réquisitoire fleuve.

    Le but : montrer les "graves fautes d'imprudence et de négligence" commises dans la collecte, le conditionnement et la distribution à 1.698 enfants de cette hormone fabriquée alors à partir de l'hypophyse, une glande crânienne prélevée sur les cadavres.

    "Le quantum des peines demandées, a prévenu d'emblée Danièle Mirabel, est sans rapport avec la douleur difficilement quantifiable" des familles des 114 jeunes morts de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) après s'être fait injecter de l'hormone de croissance infectée.

    Mais ces condamnations sont là pour "marquer la réprobation de la société", a-t-elle dit.

    C'est donc quatre ans de prison, la peine maximale mais assortie du sursis, qu'elle a réclamés pour Jean-Claude Job, l'ancien président de l'association France Hypophyse, qui avait le monopole du traitement.

    "Il était le coordinateur de tout le système", a-t-elle assuré, le disant mené par "sa volonté de renommée et de gloire".

    Même peine demandée pour Fernand Dray, lui aussi âgé de 85 ans, ancien responsable de l'extraction et de la purification de l'hormone dans son laboratoire de l'Institut Pasteur.

    Chercheur, et non industriel, il n'avait pas les qualifications pour surveiller la fabrication d'un médicament, mais il a accepté car il pouvait ainsi extraire d'autres hormones de l'hypophyse et donc "poursuivre ses recherches", a-t-elle dénoncé, demandant la relaxe pour des accusations de malversations financières.

    Un an avec sursis a été requis pour la pédiatre Elisabeth Mugnier. Alors jeune fille en train d'écrire sa thèse, c'est elle qui allait de morgue en morgue collecter les hypophyses, sans aucune précaution, selon l'accusation.

    Pour Marc Mollet, ancien responsable du conditionnement du médicament à la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH), deux ans avec sursis ont été requis.

    "Même une quincaillerie aurait été mieux tenue", a lancé Mme Pérard, reprochant à ce pharmacien de ne pas avoir "rejeté les lots douteux", et d'avoir mis en circulation en 1985 des lots non purifiés à l'urée, alors que les risques avaient été démontrés.

    La relaxe a en revanche été demandée pour son supérieur hiérarchique Henri Cerceau, à qui il n'y a guère à reprocher que "d'avoir manqué de curiosité".

    Relaxe également pour le médecin prescripteur Micheline Gourmelen, et pour le haut fonctionnaire du ministère de la Santé Jacques Dangoumeau.

    Il y a aussi eu "tromperie", a insisté Mmme Pérard, car l'information des familles sur les risques "a été vague, approximative et mensongère".

    "La transmissibilité de la MCJ avait été démontrée bien avant les années 80", a affirmé Danièle Mirabel, tentant de parer par avance les arguments de la défense, dont les plaidoieries débutent jeudi et qui a déjà maintes fois répété que les connaissances scientifiques de l'époque ne permettaient pas aux prévenus d'appréhender les risques.

    Après l'audience, certaines familles avaient du mal à accepter ces réquisitions : "une demande de simple sursis pour 114 victimes !", s'indignait une mère en pleurs.