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  • La Mosquée de Cologne et l'invasion musulmane

    La construction, sur les bords du Rhin, du plus grand centre musulman du pays est critiquée par la population.

    Qualifiée d'événement « quasi historique » lors de sa première édition l'année dernière, la réunion au sommet des principaux acteurs de l'immigration en Allemagne, qui se tient aujourd'hui à Berlin sous la présidence d'Angela Merkel, pourrait bien tourner au vinaigre. Les principales associations turques, qui représentent la principale communauté d'immigrés, ont décidé de la boycotter. Motif : les restrictions apportées par le gouvernement Merkel à l'immigration et notamment au regroupement familial.
     L'association turco-islamique Ditib s'insurge contre des mesures « discriminatoires ». En parallèle, elle milite pour la construction d'une mosquée au coeur de Cologne, un projet qui suscite une controverse.

    « C'EST UN PAS en avant, se réjouit Fatma. Et pas seulement pour les musulmans. » Aux abords de la mosquée d'Ehrenfeld, quartier de Cologne où un lieu de culte flambant neuf devrait remplacer le vieux bâtiment délabré, on est plutôt enthousiaste. La nouvelle mosquée, au style d'inspiration ottomane, attirera les visiteurs et renforcera la « communication » entre les groupes qui se côtoient, affirme Fatma.

    Mais, jusqu'à présent, le projet a plutôt suscité l'opposition et le scepticisme d'une partie des riverains et conservateurs locaux. « Les gens ont peur », souligne le maire de Cologne, Fritz Schramma (CDU). Non sans mal, l'Allemagne prend conscience que les « travailleurs invités » venus contribuer à la reconstruction du pays dans les années 1950 s'installent durablement. Sur plus de 80 millions d'habitants, le pays compte désormais 15 millions de personnes d'origine étrangère, dont 2,5 millions d'origine turque. À l'occasion du premier sommet sur l'intégration l'année dernière, la chancelière Angela Merkel avait qualifié son pays de « terre d'immigration », une réalité longtemps ignorée. Les querelles provoquées par le projet de mosquée à Cologne en sont un signe.

    Crainte d'une société parallèle
    Malgré les hésitations, le maire est catégorique. « La mosquée viendra, c'est sûr », affirme Fritz Schramma. Au plus tôt, la décision définitive serait prise à l'automne. Actuellement, Fatma et les autres musulmans d'Ehrenfeld disposent d'un vaste hangar en guise de salle de prière. Les murs ont été rachetés par l'association turco-islamique Ditib au début des années 1980. En plus de la mosquée, on y trouve un salon de thé, une agence de voyages, des services sociaux et une salle de jeux pour les jeunes du quartier.

    Pour les autorités locales, reste à arrêter la forme du nouveau lieu de culte. Les deux minarets de 55 mètres et la coupole de verre d'une hauteur de 34 mètres prévus par l'architecte sont loin de faire l'unanimité. Agrémentée d'un centre culturel et commercial pour une surface totale de 22 000 m², ce qui en ferait le plus grand établissement musulman d'Allemagne, la nouvelle mosquée financée par les dons et les revenus de location pourra accueillir jusqu'à 4 000 personnes. « Je trouve le projet un peu trop imposant », confie cette habitante d'Ehrenfeld. « Du moment qu'elle ne dépasse pas la cathédrale !», réplique Tarek Abulzahab, qui soutient la construction sans être pratiquant.

    De l'avis du maire, le Ditib devrait « faire un pas en direction des riverains » et réduire la voilure. Outre les questions soulevées par l'aspect monumental du futur établissement, la crainte de voir se constituer une société parallèle est fréquente. Elle est devenue un thème central pour le parti Pro-Köln (« Pour Cologne »), formation d'extrême droite qui dispose de cinq sièges au conseil municipal. « La taille du bâtiment conférera de facto une grande autorité aux imams, qui pourront alors exercer un pouvoir quasi juridique », dénonce Manfred Rouhs, de Pro-Köln.

    Le maire entend pour sa part « poursuivre le dialogue » avec le Ditib afin d'éviter la constitution d'un « club fermé », d'« une ville dans la ville ». Le Ditib se dit d'accord pour ouvrir le centre commercial à des enseignes non turques. « Nous n'avons rien contre !», affirme le porte-parole de l'association Bekir Alboga.
    La volonté de s'intégrer doit en effet venir des deux côtés, souligne le maire, Fritz Schramma. En outre, le processus ne peut réussir qu'avec une « connaissance suffisante de la langue ». Or, « il est difficile de maintenir un niveau convenable » dans les établissements scolaires où la majorité des élèves est d'origine étrangère.


    Autre inconvénient, les traitements spéciaux exigés pour les jeunes filles de confession musulmane : les autorités allemandes attendent du Ditib qu'il soutienne activement la participation des filles aux cours de sports et voyages de classe. « Notre société ne connaît pas une telle séparation homme-femme », souligne le maire.

    Enfin, les actes de violence intervenus dans certains établissements - notamment à Berlin - ont poussé le gouvernement à placer éducation et alphabétisation au coeur du dispositif d'intégration. À ce titre, le Ditib a l'intention de développer un véritable centre de formation au sein de la nouvelle mosquée d'Ehrenfeld. Reste que l'association doit encore « gagner à sa cause le tiers des habitants qui est encore sceptique », reconnaît Bekir Alboga. À cela s'ajoute déjà le tiers qui s'est dit favorable. Un dernier tiers, sur le million d'habitants que compte Cologne, s'y oppose catégoriquement

    LE FIGARO - 14.10.2007