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Tout le monde attend sans savoir ce que l'avenir réserve à ce confetti rectangulaire de 360 km2 peuplé de 1,5 million d'habitants. Une des plus fortes densités au monde, 1,5 million de personnes qui depuis plus de quatre mois sont littéralement séquestrées dans ce réduit. Sauf pour quelques chanceux qui parviennent à obtenir des autorisations israéliennes, il est impossible de s'évader de Gaza.
L'unique point de passage vers l'Egypte, celui de Rafah, est fermé ; celui de Karni, vers Israël, réservé aux marchandises, est une zone désertée. Seuls les produits alimentaires de première nécessité rentrent à Shoufa et à Kerem Shalom. Un goutte-à-goutte qui permet à la population de survivre. C'est tout. Le blocus est pratiquement total. La communauté internationale avait mis en place des sanctions après la victoire du Hamas aux élections du 25 janvier 2006, pourtant jugées démocratiques. Aujourd'hui, Israël donne le dernier tour de vis, laissant juste un filet d'air pour ne pas asphyxier tout un peuple. Le ministère de la défense a décidé le 25 octobre de réduire ses livraisons de carburant et de limiter la fourniture d'électricité en représailles aux tirs de roquettes palestiniens.
Personne ne meurt de faim, mais les premiers signes de pénurie sont apparus. Les prix se sont envolés, multipliés par trois pour la farine, par cinq pour le ciment. Il y a de plus en plus de mendiants, de moins en moins de mariages. Rien ne sort, le peu qui rentre est soumis au bon vouloir des Israéliens. Le filtre ne laisse plus passer que les produits israéliens, les autres sont interdits. "La bande de Gaza n'est plus considérée comme une identité commerciale. On a été rayé de la liste. L'occupation était mauvaise, mais maintenant c'est pire. Nous sommes écrasés, et tout le monde s'en lave les mains", s'indigne Mazen Shaquoura, représentant de l'Agence suisse pour le développement et la coopération. Les agriculteurs ne pourront pas exporter leurs fraises et leurs fleurs coupées. Quelque 670 étudiants, inscrits dans les universités en Egypte ou ailleurs, n'ont pas pu sortir, selon une ONG israélienne, Gisha, qui a intenté un recours devant la Cour suprême. La construction s'est totalement arrêtée. Plus aucun matériau ne rentre. L'UNRWA, l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, a interrompu tous ses travaux.
"Sur les 4 000 petites entreprises, il n'y en a pas plus de 400 qui fonctionnent ; et encore, à 60 % de leur capacité, constate Mohsen Abou Ramadan, directeur de l'Arab Center for Agricultural Development. Nous allons à la catastrophe, mais personne n'a l'air de s'inquiéter. C'est un siège ? C'est une punition collective ? C'est une violation de la convention de Genève, des accords d'Oslo et des droits de l'homme. Pourquoi n'y a-t-il aucune pression sur Israël ?" Ici, 70 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (moins de 2 dollars par jour) et 43 % en dessous du seuil d'extrême pauvreté (moins de 1 dollar). "Il faut laisser les gens vivre avec dignité. Il ne faut pas les priver d'espoir, sinon le pire peut arriver", s'inquiète l'économiste Omar Shaban.
Mazen Al-Amassi est désespéré. Ce fabricant de meubles a licencié ses 150 ouvriers. Ses hangars sont pleins, mais il ne peut exporter. Un million de dollars de marchandises dorment dans ses entrepôts, bien emballées, prêtes à partir depuis quatre mois. Toutes les activités sont touchées. Même le secteur bancaire, depuis que deux banques israéliennes ont décidé de ne plus faire d'opérations avec la bande de Gaza. Début octobre, le Hamas a payé quelque 20 000 fonctionnaires en espèces. Les banques qui le faisaient auparavant risquaient de subir des pressions d'Israël, qui exige de ne pas servir le Mouvement de la résistance islamique de quelque manière que ce soit. Des rumeurs circulent sur un manque de liquidités imminent.
Plus aucun produit manufacturé, plus aucune pièce de rechange n'est importé. Chaque jour, 106 camions permettent à la population de ne pas sombrer dans une crise humanitaire. Avant le coup de force du Hamas, il y en avait en moyenne 238. Dans les hôpitaux, le matériel en panne ne peut être remplacé. Il est bloqué sur le port d'Ashdod. Le 4 octobre, le ministre de la santé, Bassem Naïm, a lancé un cri d'alarme face à "la pénurie aiguë de médicaments et d'équipements médicaux". "Les malades qui ont besoin d'être soignés en Israël ou à l'étranger ne peuvent plus sortir. Alors, ils meurent chez nous", déplore le docteur Fayez Al-Hinawi, à l'hôpital de Jabaliya. Le journal Maariv a publié le témoignage d'un malade qui n'a pu obtenir le permis d'entrer en Israël, car il refusait, en échange, de devenir un collaborateur du Shin Bet, les services de renseignement et de sécurité intérieure. Plusieurs autres cas de chantage de cette nature ont été évoqués.
La pression est maximale. "Les gens n'ont plus qu'une envie : partir, s'échapper. Si les frontières s'ouvraient, ce serait le raz de marée", estime Khalil Abou Shammala, de l'association de défense des droits de l'homme Al-Dameer. D'après un sondage, ils seraient 47 %, soit plus de 700 000 personnes, à vouloir fuir ce qui est devenu un enfer. La bande de Gaza s'enfonce dans la pauvreté et le chômage, et ses habitants sont pris au piège. "Nous sommes kidnappés et, pour survivre, on paye la nourriture aussi cher qu'à Tel-Aviv parce que les Israéliens en profitent. Nous sommes devenus un marché captif. Les Israéliens ne vendent que leurs produits. C'est du colonialisme moderne ! C'est pire que l'occupation !", s'exclame l'économiste Omar Shaban. Pour lui comme pour beaucoup d'autres, il est temps que la communauté internationale commence à ouvrir les yeux.
Depuis le temps qu'elle les ferme...
Commentaires
Il est facile de condamner Israël, mais que faire face aux attaques terroristes ? La misère à Gaza est-elle la faute des Israéliens ou du Fatah qui détourne les aides internationales et du Hamas qui ne pense qu'à attaquer l'état hébreux pour que s'exercent des représailles qui leur permettra de recruter de nouveaux candidats au suicide ?