Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Révision des lois bioéthiques

La décision de la Cour de cassation sur les "enfants sans vie" a suscité une petite tourmente dans les services d'état civil. Réunions, notes internes, échanges de mails : perplexes, magistrats et officiers d'état civil se sont longuement interrogés sur la portée des arrêts rendus le 6 février par la haute juridiction. Ces décisions permettent de déclarer à l'état civil, sous la forme d'un "acte d'enfant sans vie", tous les foetus mort-nés ou non viables, quel que soit leur niveau de développement.

La notion d'"enfant sans vie" est apparue en 1993 : depuis cette date, les enfants mort-nés et ceux qui ne sont pas viables sont inscrits sur les registres de décès. "Ces "actes d'enfants sans vie" aident les parents à faire leur travail de deuil et permettent d'entretenir la mémoire familiale, note Frédérique Granet, professeure de droit à l'université Robert-Schuman de Strasbourg. Auparavant, ces enfants n'étaient pas enregistrés à l'état civil, comme si la grossesse et la naissance n'avaient pas existé."

Les "actes d'enfants sans vie" ne sont pas des actes de naissance : ils se contentent d'énoncer le jour de l'accouchement ainsi que le nom, la profession et le domicile des parents, qui bénéficient dès lors d'un congé. Les "enfants sans vie" peuvent recevoir un prénom, figurer dans le livret de famille et être inhumés mais ils n'acquièrent pas pour autant une personnalité juridique : ils n'ont ni droits, ni filiation, ni nom de famille.

Jusqu'à l'arrêt de la Cour de cassation, seuls les enfants viables au sens de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) - les foetus de plus de 500 grammes ou de plus de 22 semaines - pouvaient être reconnus comme des "enfants sans vie". Parce que ces seuils étaient fixés par une simple circulaire, la Cour de cassation les a supprimés. Désormais, c'est donc aux parents, et à eux seuls, de décider s'ils souhaitent un "acte d'enfants sans vie".

Cette décision a été saluée par les opposants à l'avortement. "Si l'on reconnaît à l'enfant mort-né une humanité intrinsèque, comment peut-on alors militer pour l'avortement ?", demande le député (UMP) Jean-Frédéric Poisson. "C'est une brèche importante dans le front du refus actuel de reconnaître un statut juridique au foetus", renchérit l'Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne (Agrif).

Le Mouvement français pour le planning familial se dit en revanche inquiet : "Si la douleur des femmes ou des couples vivant des fausses couches tardives doit être entendue, cela ne doit pas pour autant ouvrir la brèche aux dérives potentielles remettant en cause le droit à l'avortement pour l'ensemble des femmes." Quant à Choisir, le mouvement de Gisèle Halimi, il regrette que la Cour "semble indiquer que la vie commence à la conception de l'embryon".

Cet arrêt permettra-t-il à des parents de demander un acte "d'enfant sans vie" pour une fausse couche ou un avortement, thérapeutique ou non ? Nul ne peut aujourd'hui l'exclure. Dans ses conclusions, Alain Legoux, avocat général près la Cour de cassation, l'a lui-même suggéré, évoquant de tels actes pour des foetus mort-nés, "mais également de simples embryons dans le même état, sans limite minimum de poids ou de durée d'aménorrhée".

Ces hypothèses n'ont rien de fantaisistes : à Paris, les services d'état civil ont déjà été confrontés à des demandes d'actes d'"enfants sans vie" pour des avortements thérapeutiques. Le code civil précise que ces actes énoncent le lieu de l'"accouchement", ce qui semble exclure les fausses couches et les avortements, mais aucune définition de l'accouchement ne figure dans le code civil, ce qui rend la jurisprudence à venir très incertaine.

Lors des débats à la Cour de cassation, l'avocat général a clairement appelé les parlementaires à intervenir dans ce débat : il invitait alors le législateur à "faire oeuvre d'harmonisation". Pour le moment, la chancellerie se montre prudente - "il faut se donner un peu de temps" -, mais la révision des lois de bioéthique offrira bientôt aux parlementaires une occasion de débat : un nouveau texte doit être rédigé en 2009.

(Le Monde 11.02.08)

Commentaires

  • « Quant à Choisir…, il regrette que la Cour "semble indiquer que la vie commence à la conception de l'embryon » : Décidément, Choisir ne sait pas de quoi il parle :
    - la vie existe bien avant la conception : le spermatozoïde et l’ovule sont tout aussi vivants que l’œuf fécondé ;
    - Il s’agit, en fait, de savoir ce qu’est l’embryon : et là il n’y a pas de doute : l’embryon (de l’homme) est un être humain dès la fécondation, et pas le lendemain; c’est aussi simple que cela.
    Réjouissons-nous de cette décision de la cour de cassation (qui ne l’a sans doute pas fait exprès) : elle va dans le sens du respect de l’être humain. Une fois n’est pas coutume.

    PS ; Il est courant que des bébés pesant moins de 500g survivent parfaitement ; cette limitation est totalement absurde, voire criminelle.

  • « Quant à Choisir…, il regrette que la Cour "semble indiquer que la vie commence à la conception de l'embryon » : Décidément, Choisir ne sait pas de quoi il parle :
    - la vie existe bien avant la conception : le spermatozoïde et l’ovule sont tout aussi vivants que l’œuf fécondé ;
    - Il s’agit, en fait, de savoir ce qu’est l’embryon : et là il n’y a pas de doute : l’embryon (de l’homme) est un être humain dès la fécondation, et pas le lendemain; c’est aussi simple que cela.
    Réjouissons-nous de cette décision de la cour de cassation (qui ne l’a sans doute pas fait exprès) : elle va dans le sens du respect de l’être humain. Une fois n’est pas coutume.

    PS ; Il est courant que des bébés pesant moins de 500g survivent parfaitement ; cette limitation est totalement absurde, voire criminelle.

  • il y a un rapport britannique qu'a évoqué je crois France-Info qui indique l'un certain nombre de foetus survivent à l'avortement parfois plus de 10 heures
    repris sur genethique .org
    http://www.genethique.org/revues/revues/2008/fevrier/20080205.1.asp
    à lire aussi sur le Bafweb de la même veine
    http://www.bafweb.com/2007/03/08/avortement-encore-un-salaud-de-survivant/

  • Merci, Paul-Emic pour ces intéressantes références.

  • Cher Paul-Emic, je viens d'aller sur ces sites. Ce que j'ai lu confirme les propos que m'avait tenus une infirmière: " Je donne ma démission de cette clinique... Je ne peux plus voir ces foetus s'agiter dans le "haricot"... c'est insupportable" - Je croyais qu'ils étaient morts? - "Mais pas tout! Il y en qui survivent encore une heure ou plus... Ils s'agitent... Mais ça, on ne le dit pas aux mères... je ne peux plus voir ça... Vous ne le saviez pas?" - Non.

    Non, je ne le savais pas, et je croyais à peine cette infirmière, j'étais à la fois bouleversée et incrédule. Une telle horreur, ce n'était pas possible que des médecins fassent ça...
    Cette infirmière, je l'avais rencontrée par hasard. Je lui disais banalement qu'elle faisait un beau métier que je serais incapable de faire. C'est alors qu'elle m'a raconté ça... la survie des foetus les plus résistants... - et voilà que ces articles que tu m'indiques confirment absolument les dires de cette femme. Qui donnait sa démisssion. Maintenant, je sais qu'elle me disait la vérité.

    Merci pour ces renseignements qui me confortent dans mon refus de l'IVG non strictement thérapeutique. Je suis encore un peu plus dégoûtée par les Simone Veil, Gisèle Halimi, et autres avorteuses. Ce sont des criminelles, IVG légalisée ou pas. Je ne juge pas les femmes qui se font avorter. J'en ai connu un certain nombre et toutes étaient très malheureuses d'avoir été "obligées" de le faire - souvent poussées par le mari, l'amant, ou la belle-mère.
    Une d'entre elles célébrait chaque année l'anniversaire du petit mort: elle se mettait à pleurer... Elle avait eu peur de la réaction de ses parents en la sachant enceinte d'un "grand amour" qui l'avait plaquée. Cette jeune femme était secrétaire dans une agence de publicité où j'ai travaillé quelque temps à Paris. Elle n'était pas croyante. Mais elle pensait à ce bébé avorté - on lui avait dit que c'était un garçon. Et elle l'imaginait...
    On ne parle JAMAIS des suites psychologiques pour la femme avortée.
    Voilà. J'avais le même âge qu'elle et elle se confiait à moi. Elle savait que j'étais anti-IVG, mais que je ne la jugeais pas pour autant.

    Amicalement

  • Merci, chère Gaëlle, pour ce très beau et très émouvant témoignage.

  • Cher abad, il est vrai. Quant à la jeune secrétaire, elle avait dans son sac une petite paire de chaussons: elle avait commencé à les tricoter AVANT de se faire avorter par peur de ses parents. Ce petit "ange", elle lui avait donné un prénom. Elle ne savait absolument pas comment se passait une IVG.
    Il y a une immense part de responsabilité de la part des parents et du lâche géniteur.
    Les choses ne sont JAMAIS présentées sous ces angles dans les médiats. Ni, encore moins, dans ces sales journaux "féminins".
    J'aurais préféré élever l'enfant de ma fille plutôt que de savoir qu'elle l'avait fait tuer. Je le lui ai dit dès qu'elle a eu 13-14 ans. C'était très clair. Mais il y a des parents qui pensent que leur file "va gâcher sa vie" à cause d'un bébé sans père. C'est faux. Tout vaut mieux que ces pleurs à la date anniversaire, et ces petits chaussons vides... - j'ai recueilli, sans les solliciter, bcp de confidences au sujet de l'IVG.
    ce que j'ai lu ce soir sur ces sites m'a bouleversée une fois de plus.

    Amitiés

    PS: Il semble qu'il n'y ait eu aucun lien de parenté entre Eugène Delacroix et Henri-Edmond Delacroix, qui a anglicisé son nom en Cross pour éviter toute confusion. Il était né à Douai.

  • Merci, chère Gaëlle, pour vos réponses. Vous êtes vraiment très précieuse !

Les commentaires sont fermés.