Vous avez le sentiment que les prix du lait ou des œufs explosent en grande surface? Une étude publiée aujourd'hui le confirme. Ces produits ont augmenté respectivement d'environ 12% et 13% dans les supermarchés en un an, selon l'étude mensuelle de Nielsen distribution.
Une conséquence de l'explosion du prix des matières premières qui se répercute aussi sur les produits transformés : les pâtes augmentent de près de 12% sur la même période, fromages et yaourts de 6%, la bière de plus de 3%. "Cette surchauffe est encore plus impressionnante sur les premiers prix de nombreux produits de base", pointe l'étude, "près de 30% sur les pâtes, plus de 20% sur les oeufs ou les farines, plus de 15% sur les huiles alimentaires".
Les ménages modestes très touchés
Si les produits "premier prix" augmentent autant, c'est que la plus grosse part de leur prix dépend directement de leur coût de production, et donc des matières premières qui ont servi à leur fabrication. Au contraire, dans les produits de marque, une grosse partie du prix sert à financer des dépenses accessoires comme les campagnes de publicité ou un emballage plus "luxueux". En conséquence, la moindre augmentation du lait entraîne une augmentation plus forte, en proportion, sur un yaourt premier prix que sur un pot Yoplait ou Danone, par exemple.
Il y a donc un paradoxe : c'est aujourd'hui chez les "hard-discounters", ces grandes surfaces qui proposent presque exclusivement des produits de base à prix cassé, que l'inflation est aujourd'hui la plus forte. Les ménages les plus modestes qui achètent déjà au prix le plus bas possible sont donc les plus durement touchés par ces hausses.
Du jamais vu en dix ans
En janvier, les prix ont globalement bondi en moyenne de 2,4% dans l'ensemble des supermarchés. Il s'agit de la quatrième hausse consécutive, les prix ayant commencé leur ascension en octobre. "Une telle accélération n'avait jamais été constatée dans la dernière décennie même lors de la mise en oeuvre de la loi Galland ou du passage à l'euro - les deux dernières recrudescences notables de l'inflation sur la décennie", note l'étude.
Cette accélération peut s'expliquer par les négociations ouvertes depuis septembre entre fournisseurs et distributeurs dans un contexte très tendu, symbolisé par le clash entre Leclerc et certaines marques, la grande surface ayant retiré de ses rayons des produits emblématiques comme la Vache qui Rit parce qu'ils augmentaient trop.
Si les fournisseurs augmentent fortement leurs prix, peut-être à outrance, c'est aussi parce qu'ils cherchent à se couvrir en cas de nouvelles augmentations des matières premières, les prochaines négociations ne s'ouvrant qu'au moins de septembre prochain. "C'est vrai en particulier pour les produits frais", explique Christine Bellurier du marketing Nielsen "car, par définition, les industriels ne peuvent pas les stocker longtemps pour se protéger de nouveaux dérapages". En conséquence, la hausse des prix devrait se poursuivre jusqu'à avril.
Dentifrice à prix réduit
Un élément pousse toutefois à la relativiser : entre 2006 et 2007, les grandes marques avaient fortement baissé. Pour Christine Bellurier, "l'inflation est notable mais il faut faire attention, en comparant une saison de hausse après une saison de baisse : il y a aussi un effet optique. C'est comme comparer les températures d'un été chaud à un autre particulièrement doux l'année d'avant".
Depuis un an, les produits d'hygiène sont les bons élèves de l'inflation. "Sur ces produits qui sont liés au rapport au corps, les consommateurs ont longtemps favorisé les grandes marques, notamment grâce au marketing très efficace d'une société comme L'Oréal. Mais on observe aujourd'hui un développement des marques de distributeurs dans ce domaine, ce qui fait stagner les prix", explique encore Christine Bellurier. Concrètement, cela veut dire que les Français hésitent de moins en moins à utiliser un après-shampoing Leader Price ou un déodorant de la marque d'un distributeur comme Carrefour.
Malgré l'augmentation soutenue de leurs produits, les magasins de hard discount comme Lidl, Aldi, ou Ed devraient tirer profit de prix à la hausse. En plein débat sur le pouvoir d'achat et tandis que le budget des ménages est toujours plus serré, l'année 2008 devraient leur être favorable. Pour combattre l'inflation, "il va falloir mettre de la concurrence, faire attention à ce que notamment dans les grandes surfaces, les prix ne s'envolent pas", a déclaré Nicolas Sarközy ce jeudi. Une motivation pour favoriser le développement du hard discount, bridé par la loi depuis 1996?