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Une police scientifique digne des "Experts"?

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De vrais experts « made in France », de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale. De gauche à droite : le lieutenant Déborah Donadille, le capitaine Xavier Desbrosse, le lieutenant-colonel Jean-François Voillot, l'adjudant Christine Levant et le gendarme Christophe Villena. Crédits photo : Le Figaro Magazine

1 800 gendarmes et 1 500 policiers formés aux techniques d'identification criminelles, 600 personnels scientifiques supplémentaires... Le ministre de l'Intérieur met la police technique et scientifique au premier rang de ses priorités.

Le Figaro Magazine: Vous annonciez en début d'année votre souhait de développer la police scientifique. Où en êtes-vous?

Michèle Alliot-Marie Pour moi, la police technique et scientifique (PTS) est «la» priorité. Dès mon arrivée au ministère de l'Intérieur, j'ai voulu lui consacrer des moyens financiers spécifiques. Ils figurent déjà dans le budget 2008, et j'ai inscrit cette priorité financière dans la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (Lopsi) qui devrait être votée au printemps. Elle comprendra également des dispositions destinées à renforcer la lutte contre la grande criminalité, le trafic de drogue, l'économie souterraine...

Pourquoi la police scientifique?

Pour trois raisons. D'abord, parce qu'elle permet d'élucider un plus grand nombre d'affaires. Ensuite, parce qu'elle constitue un moyen de rendre justice à la victime en retrouvant ceux qui lui ont causé un dommage. Enfin, parce que c'est un élément essentiel de la dissuasion : j'en suis persuadée, plus vous avez de risques d'être retrouvé, plus vous hésitez à commettre un délit. La société évolue, la délinquance change, et je veux donner à la police et à la gendarmerie un temps d'avance technologique sur les délinquants. Voilà pourquoi j'attache tant d'importance à la PTS.

Quel est votre projet?

Je veux que la PTS, utilisée aujourd'hui essentiellement pour les crimes et les délits les plus graves, devienne une police technique et scientifique de masse. Elle donne en effet des résultats excellents puisqu'elle permet un taux d'élucidation de plus de 80 %. Mon objectif est d'arriver, en 2010, à ce que 100% des cambriolages commis, 100 % des véhicules signalés volés et découverts, 100% des délits de voie publique fassent l'objet d'investigations de la PTS, dès lors qu'il existe des traces exploitables. Je veux que la police et la gendarmerie procèdent systématiquement aux relevés d'empreintes digitales et palmaires des personnes gardées à vue. Pour y parvenir, je vais étendre l'automatisation de ces relevés par la multiplication des bornes d'identification. Il en existe déjà 300 en France (bornes T1 et T4). Nous en mettrons 400 supplémentaires en service d'ici à 2010.

Il va falloir des moyens considérables.

Oui. Nous allons améliorer quantitativement et qualitativement nos capacités, qu'elles soient humaines ou matérielles. La gendarmerie nationale dispose aujourd'hui de 480 militaires se consacrant à la PTS, les techniciens d'identification criminelle (TIC). D'ici à 2010, elle en formera 1 800 supplémentaires. Dans le même temps, la police nationale disposera de 1 500 policiers polyvalents en plus des 1 100 d'aujourd'hui. Elle pourra également recruter 600 personnels scientifiques supplémentaires. Je veux créer une filière pour les policiers et gendarmes spécialisés qui leur permettra de faire tout ou partie de leur carrière dans la PTS.

Comment allez-vous financer un pareil projet?

Le coût global du plan PTS est de 40 millions d'euros : 2 millions ont déjà été débloqués pour 2008, et 38 sont prévus par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (Lopsi 2009-2014). Le coût de la formation et de l'accompagnement des personnels représente à lui seul 3 millions d'euros.

Cette «police technique et scientifique de masse» va forcément provoquer une consultation énorme des fichiers. Comment allez-vous gérer ce problème?

C'est vrai que nous avons actuellement un problème avec les fichiers des empreintes digitales, le fichier automatisé des empreintes digitales (Faed), et des empreintes génétiques (Fnaeg). Ils sont saturés. Le Fnaeg va disposer d'un nouveau moteur de recherche qui lui permettra d'intégrer à vitesse immédiate toutes les informations qui lui parviennent. Le Faed compte d'ores et déjà 2,79 millions d'empreintes digitales et le Fnaeg, 650 000 empreintes génétiques, mais nous en relevons de plus en plus. Pour le seul mois de janvier, par exemple, nous avons envoyé 85 000 signalisations supplémentaires sur les deux fichiers, 60 000 au Faed et 25 000 au Fnaeg. Il est évident que c'est l'augmentation du nombre d'empreintes fichées qui permet ensuite de faire les recoupements nécessaires et d'élucider un plus grand nombre d'affaires. Nous arrivons déjà à mesurer l'efficacité du système. Sur ce même mois de janvier, nous avons constaté une augmentation sensible du nombre d'affaires de viols, agressions sur personnes et cambriolages élucidées grâce à des recoupements réalisés par les fichiers. Nous avons même fait un test sur des infractions de moindre importance : la police scientifique a été déterminante dans l'élucidation de 80 % des affaires en question, y compris pour des petits délits.

Est-il question de regrouper les laboratoires de la police et de la gendarmerie nationale?

Le problème n'est pas le regroupement. Les uns et les autres mutualisent de plus en plus leurs connaissances. Avoir, par exemple, des fichiers police et des fichiers gendarmerie qui ne sont pas connectés est une ineptie. Quand je suis arrivée au ministère de la Défense en 2002, il était impossible à des gendarmes d'avoir accès à des fichiers police et réciproquement. Leur mission est pourtant la même, et je sais que tous en sont de plus en plus convaincus. Quand je suis arrivée au ministère de l'Intérieur, j'ai garanti aux uns comme aux autres qu'ils garderaient leur identité. L'identité militaire de la gendarmerie ne sera pas remise en cause. J'étais avec le président de la République quand il l'a répété. Chacun peut donc se sentir conforté dans son identité propre. La vérité, c'est que la police comme la gendarmerie me font de plus en plus de propositions de mutualisation.

La police technique et scientifique est un phénomène très à la mode et, par conséquent, un métier qui fait rêver de plus en plus de jeunes...

C'est vrai, et nous allons utiliser le « vecteur » de la police scientifique dans le cadre des opérations de rapprochement entre population, police et gendarmerie. C'est pour les forces de l'ordre une image valorisante, plus moderne. Cette année, j'ai donc décidé de donner une ampleur particulière à la Journée sécurité intérieure nation, avec de nombreuses présentations de la police scientifique. C'est un moyen d'attirer des jeunes vers les métiers de la police et de la gendarmerie. Je veux leur dire que le métier des forces de l'ordre est doublement valorisant et moderne. C'est une démarche généreuse de s'engager dans la protection des autres. C'est aussi choisir une profession moderne et passionnante. Pour des jeunes, ce sont des perspectives de carrières intéressantes, qui leur permettront d'être toujours à la pointe de toutes les nouvelles technologies.

(23.02.08)

Espérons que tout cela se concrétisera dans les faits! Nous croulons sous les promesses! D'autre part, il ne s'agit pas seulement d'élucider des "affaires" mais de châtier  les coupables. Ceci est une toute autre histoire...       

Commentaires

  • La police scientifique possède déjà des moyens techniques considérables qui lui sont très utiles et lui permettent souvent des avancées intéressantes dans les enquêtes. Mais elle est soumise aux injonctions politiques qui interfèrent souvent dans son travail. Elle est donc à double tranchant, surtout pour tout ce que l’on appelle la cybercriminalité, et elle camoufle le plus souvent une atteinte à la liberté d ‘expression.

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