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Les Etats-Unis, l'Inde, le Tibet et la Chine: une longue histoire

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La question du nucléaire n’a pas cessé de compliquer les relations entre l’Inde et les Etats-Unis. Dès l’indépendance l’Inde s’intéresse au nucléaire civil. Elle achète sa première centrale au Canada, façon hypocrite pour les Etats-Unis de laisser faire. Il s’agit d’une centrale à eau lourde, comme les premières centrales françaises, et donc productrice de plutonium à usage militaire. L’eau lourde sera fournie directement par les Etats-Unis. La brouille sino-soviétique, la bombe française (1959) et la bombe chinoise en préparation (le premier essai aura lieu en 1964) renforcent la conviction des dirigeants indiens qu’ils doivent eux aussi posséder l’arme nucléaire qui n’est plus réservée aux deux superpuissances. Pour y parvenir ils auront habilement utilisé les Etats-Unis en jouant sur la question tibétaine.

En 1951 la RPC nouvelle accorde au Tibet un statut de région autonome. Le Dalai lama reste au pouvoir mais différentes réformes, à commencer par l’abolition de l’esclavage, lui sont imposées. Mais les Etats-Unis mettront longtemps à admettre que le PCC est au pouvoir, maintiendront la fiction de Taiwan représentant de la Chine sur la scène diplomatique internationale et tenteront diverses actions pour faire tomber le nouveau régime. L’affrontement est évidemment au comble sur le front coréen mais d’autres actions sont menées que ce soit en Birmanie où des généraux du KMT s’installent et vont tenter mais en vain de ré-envahir les provinces du Sud-ouest chinois ou au Tibet où la CIA va prendre en main le Dalai Lama, former et armer les opposants à la RPC qu’il est facile de recruter chez les religieux anti-communistes qui ont été dépouillés d’une partie de leur pouvoir. C’est pour couper court à cette menace de sécession organisée par Washington que Pékin occupe militairement la province du Tibet en 1959 et chasse le Dalai Lama.
Les Etats-Unis souhaitent le Dalai Lama et son entourage en Inde à proximité du Tibet et dans un pays où le bouddhisme, bien que très minoritaire est vivant. Ils pensent aussi que le ressentiment anti-chinois de cette petite diaspora pourra peut-être un jour ou l’autre être utilisée contre la RPC. C’est en effet à partir de la ville indienne de Dharamsala, où s’installe le Dalai Lama que vont s’organiser les réseaux du « Tibet Libre » soutenus sans discontinuer par les dollars de la CIA. Plus de 40 ans ont passé et ces réseaux qui ont essaimé dans le monde entier sous le couvert d’une religion fonctionnent bien.

De ce point de vue ce qu’on pourrait appeler le tibetisme, qui n’est pas le Bouddhisme tibétain, mais l’usage militant et politique de cette religion, a des ressemblances avec le sionisme en tant qu’il est l’instrumentalisation à des fins impérialistes dans le cadre d’une lutte contre le communisme athée d’une religion hyperminoritaire dont les Etats-Unis flattent et soutiennent l’appétit bien réel et bien matériel de pouvoir séculier. Le tibetisme est un sionisme asiatique.

Selon les révélations récentes du Major William Corson, ancien collaborateur du Président Eisenhower, l’Inde va négocier l’installation du « gouvernement tibétain en exil » sur son territoire en échange de la formation aux Etats-Unis de 400 ingénieurs nucléaires.

Disposant ainsi progressivement des compétences nécessaires, d’uranium sur son sol, et la volonté politique aidant, l’Inde qui ne signe pas le Traité de non prolifération nucléaire, ratifié en 1970, fait exploser sa première bombe dans le désert du Rajasthan en 1974. Pour rétablir l’équilibre stratégique, le Pakistan va alors se lancer à corps perdu dans son propre programme nucléaire.

La non prolifération apparaît alors pour ce qu’elle est : un double langage permettant aux puissants d’interdire à certains Etats l’accès à l’arme nucléaire et de fermer les yeux sur les programmes des autres.

Cette Inde, tiraillée entre des intérêts contraires, est évidemment très attentive à ce qui se passe sur sa frontière Nord.

Elle a soutenu autant qu’elle a pu la monarchie hindouiste népalaise dans sa lutte contre la guérilla maoïste entamée en 1994. Encadrement militaire, fourniture d’armes, rien n’a manqué pour tenter d’éviter ce qui, à Delhi, était considéré comme le pire : l’installation d’un régime prochinois à Katmandou.

A cet égard, la situation au Népal n’est pas encore clarifiée. Au terme de 12 ans de guerre, le Parti Communiste Népalais Maoïste (PCNm) qui, dans ce conflit, n’a reçu aucune aide de la RPC, a accepté, alors qu’il contrôlait très largement la campagne népalaise, de déposer les armes en échange de sa participation à un gouvernement provisoire, de la mise à l’écart au roi et de l’élection d’une assemblée constituante devant instaurer la République du Népal.

A quelques semaines de l’élection de cette assemblée, la situation est encore instable. La république est installée dans les faits et le roi n’exerce plus aucun pouvoir, mais les forces conservatrices qui lui sont fidèles, soutenues par l’Inde et les Etats-Unis, fomentent des révoltes anti-communistes dans certaines régions du pays et assassinent des militants maoïstes. Le PCN maoïste tente, de son côté, de rassembler autour de lui une majorité parlementaire et politique et dans le pays. S’il y parvient, l’assemblée constituante devrait confirmer la fondation définitive et la consécration internationale de la République du Népal.

Cette nouvelle république devra trouver sa place entre ses deux énormes voisins et ne pas se fâcher avec l’Inde avec laquelle elle est très imbriquée économiquement tout en intensifiant ses relations avec la Chine voisine via le Tibet. Il est dans les plans de la Chine d’améliorer les relations routières avec le Népal et même de prolonger jusqu’à Katmandou le chemin de fer de Lhassa et donc d’entretenir avec la république nouvelle des rapports économiques de plus en plus étroits.

Les Etats-Unis surveillent le processus comme le lait sur le feu mais savent très bien que la nouvelle république népalaise laissera les coudées moins franches à leurs espions, à leurs forces spéciales chargées de déstabiliser le Tibet et aux activistes du « Tibet libre » et ils n’ont de ce point de vue guère de solution de rechange.

L’Inde qui, tout en hébergeant le Dalai Lama n’a jamais reconnu le « gouvernement tibétain en exil », a toujours considéré la question tibétaine comme une affaire intérieure chinoise et l’a clairement réaffirmé ces derniers jours. Quant au Pakistan, il ne fera rien, lui non plus, pour remettre en cause son alliance historique avec la RPC et d’autant moins qu’il refuse de plus en plus d’être réduit par les Etats-Unis au rôle de simple supplétif dans le conflit afghan.
(Source: Voxnr - avril 2008)


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