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Les Khasars, une ethnie en marge du judaïsme

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Apogée et déclin du 10ème au 11ème siècles

Un trait caractéristique majeur dans l'histoire des populations juives, depuis la chute du deuxième royaume d'Israël en 70 sous l'empereur romain Titus, est leur dispersion partout dans le monde et leurs migrations innombrables, à la merci de brimades, spoliations et persécutions de la part des nations qui les avaient accueillies – avec tolérance ou réticence -, mais toujours sous le signe de préjugés.

Ceux qui résistèrent à l'assimilation eurent toujours deux soucis principaux : le rassemblement structuré en communautés culturelles et sociales, de nature à renforcer la préservation de "l'héritage ancestral" et à assurer un front solide contre les courants d'hostilité, et, à cette fin, le maintien de contacts suivis avec d'autres communautés.

C'est ce qui a permis aux élites intellectuelles, même au cours du Moyen Age dans le monde occidental, de ne laisser perdre aucune trace de la vie communautaire et de préserver une histoire ordonnée de chaque groupement.

Cependant, en marge des communautés organisées, il y a eu des groupes isolés, dont la judéité est historiquement prouvée pour certains, tandis qu'elle est, ou était, sujette à caution pour d'autres. C'est justement à cause de leur isolement que l'histoire de ces groupes reste entourée de légende quant à leur origine, et de confusion en ce qui concerne leur évolution.

Les Khazars

Il peut paraître étrange qu'on n'ait pas pu établir avec précision l'origine géographique d'une peuplade qui est pourtant entrée dans l'histoire sur un vaste territoire entre la mer Caspienne, la Volga, la chaîne des Carpates et la Mer Noire, et s'y est maintenue entre le 7ème et le début du 11ème siècle.

Cependant, alors que persistent des doutes sur l'étymologie du nom Khazar, on a bien identifié l'appartenance primitive de cette peuplade à des tribus turques et persanes de l'ancien Turkestan en Asie Centrale. Après une longue période de migration, une branche de ces nomades commença à s'implanter au Nord du Caucase vers l'estuaire de la Volga. C'est la première étape qui marque la naissance de ce qui deviendra l'empire des Khazars, entre deux puissances : les envahisseurs arabes venant du Sud et l'empire byzantin, successeur de Rome, déjà dominant toute la région des Balkans et l'Asie Mineure.

A la différence de ces deux géants voisins, solidement structurés, les Khazars apparaissent dépourvus de tous les ingrédients constituant une nation, étant, au surplus absolument incultes et analphabètes. Pourtant, sous l'influence de contacts suivis avec leur entourage, tout en se sédentarisant, ils parviennent progressivement à sortir de leur état de barbarie. Aux premiers rudiments d'une vie organisée sous une hiérarchie en éveil, vient s'ajouter la notion de valeur spirituelle qu'ils ne possédaient guère, et qui leur est inculquée par les contacts de plus en plus étroits avec les Byzantins et les Arabes, ainsi qu'avec les communautés juives solidement implantées depuis Byzance jusqu'au Caucase.

C'est ainsi que leur roi (Khagan), stimulé par un désir d'accès au monde civilisé, est incité à la connaissance des religions professées autour de son domaine. Des légendes entourent sa préférence du judaïsme, malgré les discriminations qui accablent l'existence des Juifs. La conversion du Khagan est historiquement attestée par ses correspondances avec Hadaï Ibn Shaprut, visir juif, ansi que par Yéhouda Ha-Lévi dans son ouvrage al-Khazari. Ce premier pas entraîne la conversion au judaïsme vers le milieu du 8ème siècle de toute la classe dirigeante et progressivement d'une grande partie de la population.

A l'apogée de sa puissance, l'empire Khazar est pris à partie par une nouvelle invasion venant du Nord d'un ennemi inattendu. Sous la poussée irrésistible des Russes, entre la fin du 10ème et le début du 11ème siècle, détruisant les principales forteresses, Itil, Samandar, et Sarkil – tout le territoire des khazars est annexé, étendant ainsi la domination de cet empire jusqu'en Crimée.

Il ne subsiste pas le moindre vestige témoignant de la longue existence des Khazars en tant que nation. On peut croire que sous la furie destructrice des envahisseurs russes, exacerbée par la résistance des Khazars à leurs efforts de conversion, toutes les villes et les villages furent anéantis, ne laissant aucune trace.

Ce qu'on connaît de l'histoire des Khazars,on le doit aux récits de nombreux historiens – juifs, grecs, arabes et russes – ainsi qu'aux correspondances échangées avec des personnages en Espagne. Leur essor semble avoir atteint un niveau considérable, à juger par de nombreux liens de mariage entre des princes ou princesses khazars et les familles régnantes de Byzance.

Après toute cette nébulosité historique, une question se pose : qu'est devenue la population khazar après la débandade effrénée sous l'invasion russe détruisant son empire ? Bien qu'ignorant son importance numérique, on peut imaginer qu'elle était considérable, à juger par l'impact qu'elle exerçait sur ses voisins byzantins et musulmans. Indéniablement, ceux qui restaient attachés à la religion nouvellement acquise n'avaient pas d'alternative entre une nouvelle conversion et l'exode, exposés comme ils étaient à une extermination certaine en cas de résistance.

On sait, d'après des témoignages historiques, qu'un groupe chercha refuge à l'Est parmi les communautés juives du Caucase. Un autre vers les Carpates, surtout en Hongrie et en Bohème- Moravie. Mais le gros de la population se dirigea au Nord vers l'Ukraine, la Biélorussie, la Pologne, la Lituanie et les zones limitrophes de Russie.

Partout dans ces territoires, où la population juive était numériquement insignifiante au début du Moyen-âge, l'affluence massive des fugitifs khazars rencontrait d'autres groupes d'émigrants venant des régions rhénanes de France et d'Allemagne ainsi que du Danube, échappant à la vague de persécutions par les bandes armée chrétiennes des premières croisades, en route vers la Terre Sainte via Constantinople. D'après de nombreux historiens du judaïsme européen de l'époque, c'est la jonction des Khazars aux fugitifs venant de l'Ouest et aux populations locales déjà organisées en communautés qui a donné lieu à la naissance du grand peuple ashkénaze, en se restructurant pour devenir, dès le 16ème siècle, la partie prépondérante des juifs dans le monde.

En quoi se justifie la dénomination ashkénaze (nom hébreu de l'Allemagne, mais primitivement celui d'une peuplade dans le Caucase, descendante d'Ashkénaze, fils de Gomer, fils de Yafeth, troisième fils de Noah) ? Par l'influence dominante qu'exerça l'élite intellectuelle   germanique sur cet amalgame hétéroclite de peuples, entraînant en même temps la création d'une langue commune à tous : le yiddish, agglomérat d'allemand et d'hébreu.

Source: Léon ALHADEFF

Commentaires

  • Quel régal historique comme je les aime! Merci Gaëlle.
    J'ai lu également que les ashkénazes seraient descendants de la tribu de Dan, d'où Danube, jusqu'au Danemark, marqueurs toponymiques de leur périple. J'ai une amie, de ligne noble danoise, qui a une grand-mère juive, justement. Rajoutez les yiddes du jutland, dans ce même pays, et la boucle est bouclée. C'était le "chaînon manquant".

  • @Arauris: je te remercie pour ton commentaire, mais je suis étonnée pour le Danemark qui n'a rien à voir avec une quelconque diaspora juive ou ashkénaze, quant à son origine (viking)! Il y a des juifs dans toute l'Europe, essaimés depuis l'Orient, et au Danemark aussi,mais ceci ne signifie pas qu'ils soient descendants de la tribu de Dan! Voici ce que j'ai trouvé sur le site officiel du Danemark:

    "Le mot Danemark apparaît déjà à l’époque viking sur la grande pierre runique de Jelling dressée au Xe siècle, mais la différence est très grande entre ce que le Danemark comprenait au Xe siècle et ce qu’il représente aujourd’hui.

    A certaines périodes, par exemple au XIIIe et au XVIIe siècle, le Danemark fut une grande puissance dont l’influence était l’égale de celle des plus grandes nations européennes.

    Le Danemark moderne
    Le milieu du XIXe siècle vit se dérouler des événements d’une importance cruciale : la monarchie absolue fut abrogée en 1848, le Danemark se dotant d’une constitution et d’un parlement, et en 1864 le Danemark subit une cuisante défaite face à la Prusse au cours de la deuxième guerre du Slesvig, défaite qui contraignit le royaume à abandonner les 2/5 du territoire national : la population du Danemark chuta d’un coup de 2,6 à 1,6 millions d’habitants.

    Une société homogène:
    Une des conséquences de cette défaite fut de transformer le Danemark en une société ethniquement presque parfaitement homogène, dans laquelle la population partageait la même langue et la même culture – si l’on met à part l’Islande (qui quitta complètement le royaume en 1944), les îles Féroé et le Groenland. "

    Les Juifs ne sont nullement à l'origine du Danemark, royaume viking. La grande saga des Dé Danaan ou Danas fait partie de la Mythologie et des contes purement celtiques. Les Celtes peuplent la région du Danube depuis la plus lointaine antiquité, depuis la préhistoire. On a là-dessus nombre de preuves archéologiques.
    Mais des Danois ont pu se marier à l'époque moderne avec des Juives. Ou l'inverse. Bien que la question de la religion et des coutumes religieuses soit en général un obstacle à des unions mixtes. Les cas particuliers étant l'exception qui confirment la règle.

    Amicalement

  • @Arauris: je viens de chercher pour le Jutland, ou terre des Jutes: il n'y a aucune origine juive, en dépit du "J" qui peut être trompeur! Voici qui étaient les Jutes:

    "Peuple germanique de la mer du Nord localisé aux premiers siècles de l'ère chrétienne dans la partie méridionale de la péninsule du Jutland au Danemark, à laquelle ils ont donné leur nom.

    À partir du milieu du Ve siècle, certains d’entre eux s’enrôlent comme mercenaires au service des chefs bretons de (Grande-)Bretagne. Ils s’installent surtout dans le Kent, où selon la tradition, leurs chefs les frères Hengist et Horsa, d’abord au service du roi breton Vortigern, se révoltent et fondent un royaume englobant également l’île de Wight, peuplé de Jutes. Leur capitale est l'actuelle Canterbury. Ils sont touchés par le Christianisme dès la fin du VIe siècle avec la conversion en 597 de leur roi Ethelbert (mort en 617).

    Les Jutes restés au Jutland se confondent ensuite avec les Danois, dans la mouvance des Vikings.

    Les Jutes du Kent sont assez vite absorbés par leurs voisins saxons et frisons, probablement plus nombreux, et ils cessent de former un peuple distinct après le milieu du VIIe siècle." (Wikipédia)

    Les Jutes étaient un peuple germanique de la mer du Nord. On les voit mal arrivant de Byzance ou de Khazarie! - ils se fondent ensuite avec les Vikings. Ethniquement parlant, ils n'ont aucun rapport avec les Ashkénazes venus de l'Est ou des pays slaves. Mais qu'il y ait des Juifs au Jutland actuellement n'a rien de surprenant! mais ils ne sont pas à l'origine du nom de la péninsule du Jutland.

    Rendons à César ce qui est à César!

  • Merci pour toute cette connaissance!
    Ma source était "La race fabuleuse" de Gérard de Sède.

  • @Arauris: j'ai presque lu tous les ouvrages de Gérard de Sède:il est passionnant, mais il n'est pas très sérieux! On ne voit plus ses livres, je ne sais ce qu'il est devenu? Il lançait des hypothèses, se prenait à son propre jeu (pour notre plus grand plaisir!), mais en Histoire, les choses sont complexes, il y faut des documents, des preuves, et il faut être très prudent. Sur le Net, en recoupant les informations, cela me semble plus sûr.

    Merci pour votre comm!

  • J'ai beaucoup appris

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