370 mots font leur entrée dans l'édition 2009 du dictionnaire le Petit Robert, qui sort aujourd'hui en librairie. Des mots communs comme des noms propres.
Chaque année, les mots se pressent à l'examen. Ils plaident leur fréquence, leur utilité, ils jurent être à la mode mais avoir de l'avenir. La lutte est rude pour entrer dans le dictionnaire le Petit Robert.
« Le mot doit avoir une certaine utilité sociale, un contenu affectif très fort, être légitime, et le tout doit être reflété par la fréquence », souligne Alain Rey, le pape de la langue française et conseiller éditorial de l'ouvrage. Pour le cru 2009, qui sera disponible ce matin en librairie*, 370 mots (10% des candidats) ont gagné leur Panthéon.
Les lauréats
« Blog », le plus moderne. Ça y est ! Les blogueurs peuvent sabrer le champagne. Leur univers, la « blogosphère», vient d'entrer dans le Robert. Et leurs « blogs» aussi pourront se jouer au Scrabble: « Les blogs sont considérés comme une facette de l'opinion publique. Les médias traditionnels ont une langue cadrée politiquement et socialement. Alors qu'Internet est un lieu de liberté. » Autres clins d'oeil à la modernité, le « podcast » ou le verbe « pixeliser ».
« Aïd » et l'année Maghreb. Après les québécismes en 2007, le Robert a fait la part belle au Maghreb cette année. Et l'« aïd », « toute fête religieuse musulmane », arrive: « Comme il y a une grande communauté musulmane, il était normal qu'on le mette. » La créativité du Maghreb sur les mots permet d'adouber « chainard », celui qui fait la chaîne, la queue.
« Escagasser », le plus chantant. Juste à côté d'« escaloper», couper en tranches fines, un mot débarque du Sud: « escagasser », « blesser quelqu'un, détériorer, ou fatiguer, ennuyer ». « C'est l'exemple de notre politique de régionalisation. Il fait naturellement penser à Pagnol. » (On n'entend plus ce mot à Marseille depuis quelques années...)
Voilà Nadal et Guy Môquet. Ceux-là, on en a entendu parler. Le tennisman Rafael Nadal, qui vient de gagner son quatrième tournoi de Roland-Garros, est intronisé.
Un autre homme a été élu : Guy Môquet. Et « ça n'a rien à voir avec une demande de l'Elysée », s'amuse-t-on au Robert. En fait, le domaine des résistants français a été révisé.
Les recalés
« Bling-bling ». Ah, le fameux... Sonore, scintillant, limite toc. La France l'a redécouvert avec Nicolas Sarközy, juste après son élection. C'est justement son problème. « Il est trop attaché à sa personnalité politique, commente Alain Rey. On a un correspondant, c'est "tape-à-l'oeil".» Le mot est, pour l'instant, « au purgatoire ».
« Bravitude ». Ségolène Royal l'a fabriqué du haut de la Grande Muraille de Chine. Mais, là aussi, l'emploi du mot n'a pas dépassé son inventeur. « On n'entend pas dire à propos de quelqu'un: Il a manifesté une bravitude. » Ce mot aussi est en attente: si son usage s'étend, il sera du cru 2010.
« Biloute ». Pas de chance pour Dany Boon. Malgré le succès de son « Bienvenue chez les Ch'tis », il n'a pas réussi à offrir le dictionnaire à « biloute ». « On apprend par le film qu'il est courant dans le nord de la France. Et si 10 %des Français utilisent quotidiennement un mot, il n'y a pas de raison de l'éliminer. » Du coup, il devrait faire son apparition l'an prochain.
« Barack Obama ». La sélection est aussi sévère dans le Robert des noms propre. Regardez Barack Obama. Recalé. Le cas du candidat démocrate américain à la présidentielle a divisé le comité. « Il y a deux tendances: celle qui suit l'opinion publique - c'est mon cas -, et il y a une tendance qui consiste à contrôler tout ça avec des résultats objectifs. Je me battrai pour qu'il y soit. » Ironie du Robert, Hillary Clinton, femme de président et femme politique aguerrie, elle, y entre.
Comme Medvedev, le nouveau président de la Russie. (Ce qui est la moindre des choses!)
* Dictionnaires « Robert 2009 » et « Robert 2009 des noms propres», Ed. le Robert, 59€. Pour voir les nouveaux mots: www.lerobert.com/bacdesmots
Le Parisien - 11 juin 2008
Commentaires
Chère Gaëlle, d’après ce que vous nous dites du nouveau Robert dans cette note, je crois que le regretté Paul Robert en aurait honte : « le Robert a fait la part belle au Maghreb cette année ». Que viennent faire des mots arabes, plus exactement, algériens, dans un dictionnaire de français ? Lui, qui était pied-noir et dont la famille était si engagée et a tant œuvré pour le développement et la mise en valeur de l’Algérie, connaissait bien toutes les fêtes musulmanes qui étaient célébrées en Algérie, laquelle était belle et bien française à cette époque ! S’il l’avait jugé utile ou intéressant il l’aurait fait de son vivant ! En réalité ce « nouveau Robert », qui ne mérite plus cette appellation, révèle simplement la dhimmitude de la France et des responsables qui nous gouvernent.
Et ce n’est pas en arabisant notre langue, qu’on apprendra le français aux immigrés !
A maï ! On ne dit plus escagasser dans le Midi, de nos jours?
Mais où habitez vous? Tous des cafélos dans ce ROBERT. C'est pour les coucoumelles, et les trempe cul-cul. Pas de quoi se tordre le vier. Méfi! Ouvrez vos esgourdes! Le français est une langue d'occupation. La province= pro vincia= pays soumis, en latin. Demain, c'est escartefigounasse qui embroquera le ROBERT. Sinon, pa peus, pécaïre. A dicias!
Cher abad, c'est un aricle du Parisien - intéressantes, les dérives du ROBERT! Moi qui aimait tant ce dictionnaire! - je sais qui était Robert: c'est à pleurer... et ça ne fait que commencer!
Mais vous avez lu la définition de blog! "Espace de liberté" ... de plus en plus restreint!
Amitiés
PS: Corrections:arTicle, et moi qui aimaiS!
Oui, chère Gaëlle, j’ai vu le mot blog. Bien que sa racine soit française (log= loger), c’est un mot que je n’aime pas : en fait c’est du mauvais franglais (comme presque tout ce qui est franglais). Je préfère utiliser le mot site, même s’il est moins bien adapté, ou à la rigueur, comme les Canadiens de langue française, le mot blogue, qui est cohérent avec les dérivés : blogueur, bloguer, etc.
Mais cela n’est pas très important. A vrai dire, je n’ai pas compris si le qualificatif de blog : « espace de liberté » fait vraiment partie de la définition qu’en donne le Robert. Si c’est le cas, je crains qu’avec les lois que nous préparent les gouvernements, il faille réviser très vite le Robert ! Pas belle, la vie, Gaëlle ?
Amitiés.