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Pourquoi les pays de l'OTAN ne reconnaîtraient-ils pas l'Ossétie du Sud?

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Flotte russe de la mer Noire

Par Alexandre Khramtchikhine, pour RIA Novosti - 15 septembre 2008

Malheureusement, tout le monde ne voit pas aujourd'hui que l'OTAN réduit très rapidement son potentiel militaire, et que l'élargissement de l'Alliance à l'Est, au lieu de la renforcer, l'affaiblit, que presque tous les pays d'Europe continentale envoient des contingents très insignifiants en Afghanistan et refusent d'y combattre, alors que les Anglo-Saxons ne parviennent pas à mener deux guerres à la fois (en Irak et en Afghanistan).

Les événements en Géorgie ont entièrement confirmé ces tendances.

La sympathie de tous les pays de l'Alliance est allée à Tbilissi, ce qui était parfaitement évident. Cependant, lors de sa guerre contre la Russie, la Géorgie n'a reçu aucune aide militaire de l'OTAN. Aucune arme ne lui a été livrée, sans même parler d'une intervention directe dans les combats. Bien plus, l'OTAN n'a même pas pu adopter de résolution politique un tant soit peu intelligible sur les événements en Géorgie (quant à l'UE, au lieu de prendre des sanctions contre la Russie, comme elle l'avait initialement annoncé, elle s'est contentée de l'appeler à ne pas "s'isoler elle-même"). La composition de l'escadre de l'OTAN apparue en mer Noire à l'issue de la guerre a confirmé que le bloc s'était avéré inefficace.

L'OTAN dispose formellement de forces navales bien plus puissantes que la Flotte russe de la mer Noire. Elle dispose, entre autres, de 17 porte-avions, mais aucun d'entre eux n'est apparu en mer Noire. Aucun avion militaire des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France, de l'Allemagne, de l'Italie, du Canada, des Pays-Bas ou d'autres pays de l'Alliance ne s'est posé sur les aérodromes de Turquie, de Bulgarie et de Roumanie. Autrement dit, l'escadre est restée sans aucune couverture aérienne (l'aviation turque, sans parler des aviations roumaines et bulgares, n'a pas le potentiel suffisant pour assurer ce genre de couverture). Rien que cela témoigne du fait que l'OTAN n'a pu exercer aucune pression sur la Russie (sans parler d'actions militaires réelles). De tous les navires de l'escadre, seul le destroyer américain USS McFaul avait des moyens lui permettant de frapper des cibles terrestres. D'ailleurs, à cause de l'absence susmentionnée de couverture aérienne, la majeure partie des 90 silos de lancement Mk41 à bord du McFaul contenaient non pas des missiles de croisière Tomahawk, mais des missiles de DCA Standart. En envoyant une telle escadre vers la Géorgie, l'OTAN a en fait montré, à la Russie, qu'elle était impuissante et tentait tant bien que mal, au minimum, de ne pas perdre la face (c'est-à-dire, tout simplement, de rappeler son existence).

Hélas, la Russie, plus précisément les médias russes, se sont comportés de façon inadéquate, en semant une panique indécente, humiliante pour une grande puissance. On se demande bien quelle menace peut représenter cette escadre. 3-4 porte-avions avec leurs formations, autant de groupes opérationnels de navires lance-missiles et une dizaine d'escadrilles d'avions sur des aérodromes de pays riverains de la mer Noire: voilà qui aurait pu inquiéter. Mais il n'y a rien eu de tel.

L'admission éventuelle de l'Ukraine et de la Géorgie à l'OTAN signifierait le maintien des tendances apparues dès les années 90, qui se résument au fait que l'OTAN se trouve face à la nécessité de défendre un territoire de plus en plus grand avec des forces qui se réduisent. L'Alliance admet dans ses rangs des pays de moins en moins efficaces sur le plan militaire, alors que ses "vieux" membres perdent, d'année en année, le désir et/ou la possibilité de faire la guerre. C'est pourquoi la crainte éprouvée par les Russes face à l'élargissement de l'OTAN à l'Est ne peut être expliquée que par une sous-information sur la situation réelle et des complexes psychologiques hérités de l'époque de la guerre froide.

Examinons la question de l'adhésion éventuelle de la Géorgie à l'OTAN.

Le fait que Tbilissi n'ait pas bénéficié d'une aide réelle de l'OTAN lors de la guerre contre la Russie peut donner lieu à deux questions. Premièrement: pourquoi la Russie craint-elle tellement l'adhésion de la Géorgie à l'Alliance (en effet, peut-on considérer comme un malheur l'adhésion des pays baltes à l'OTAN)? Deuxièmement: pourquoi la Géorgie veut-elle adhérer à un bloc inefficace?

L'OTAN ne fera jamais la guerre à la Russie (à moins que celle-ci ne s'effondre de l'intérieur). Cela concerne d'autant plus la Géorgie, indépendamment de son adhésion ou non à l'OTAN. Après la défaite essuyée dans la guerre des cinq jours, une nouvelle guerre est impossible dans ce pays. Au mois d'août, Tbilissi pouvait encore supposer que la Russie, qui avait formellement reconnu à ce moment-là l'intégrité territoriale de la Géorgie, n'interviendrait pas dans le conflit. A présent, toute tentative de récupérer l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud entraînerait une guerre contre la Russie. Quelles que soient les circonstances, la Géorgie ne pourra la gagner. Mais pourquoi donc Tbilissi a-t-il besoin de l'OTAN? N'a-t-il pas encore compris qu'aucun pays du bloc n'entrerait en guerre pour le rétablissement de l'intégrité territoriale de la Géorgie? Bien plus, à mon avis, les pays européens de l'OTAN feront maintenant tout leur possible pour que la Géorgie ne soit jamais admise à l'Alliance. La possibilité, même théorique, d'un conflit militaire contre la Russie est la dernière chose dont ils ont besoin. Les Européens ne le diront certainement jamais ouvertement, ils tâcheront de noyer cette question dans des procédures bureaucratiques.

Un "échange de pièces" serait à coup sûr l'issue la plus raisonnable à cette situation. La Géorgie et tous les pays d'Occident reconnaissent l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud, après quoi la Géorgie dans ses nouvelles frontières peut adhérer à n'importe quelle organisation. La Russie ne s'y opposera pas, même sur le plan de la rhétorique. Bien plus, cette décision ferait l'affaire de la Géorgie. Il est parfaitement évident qu'elle ne pourra récupérer les deux républiques, à moins que la Russie ne se désintègre, et même dans ce cas, uniquement au moyen d'un génocide.

La Géorgie doit reconnaître qu'elle a créé elle-même cette situation: d'abord, par le nationalisme primitif de Gamsakhourdia, ensuite par l'aventure insensée de Saakachvili. Elle doit cesser d'accumuler cette haine insensée qui ne trouvera aucune issue, et gagner enfin une authentique liberté. Ce pays s'intégrera ainsi bien plus facilement aux structures occidentales (Qu'est-ce que cela lui apportera? C'est une autre question).

Quant à l'Occident, il doit reconnaître que ses actions à l'égard du Kosovo ont créé pour la Russie la possibilité de reconnaître l'indépendance des anciennes autonomies géorgiennes. Il doit cesser d'employer les doubles standards. Moscou, pour sa part, pourrait comprendre enfin que sa peur irrationnelle de l'OTAN est une chose indigne. Cet "échange de pièces" et la constatation de la réalité permettraient à toutes les parties de sortir de l'impasse actuelle et de reprendre l'établissement de relations normales.

Alexandre Khramtchikhine est chef du service analytique de l'Institut d'analyse politique et militaire.

Commentaires

  • Merci, Gaëlle de nous donner cette analyse fouillée et assez réaliste de la situation de la Géorgie et des conséquences de la dernière guerre. Je trouve que Khramtchikhine est un peu optimiste concernant la position de l’OTAN et ne prend pas assez en compte d’autres facteurs géopolitiques intervenant dans la région. Il se place dans l’hypothèse où l’OTAN n’agit qu’en fonction des intérêts occidentaux. C’est loin d’être le cas, d’autres intérêts, ni américains ni européens, s’imposent aux décisions de l’OTAN. Les questions d’Israël, de l’Iran et du pétrole sont les premières motivations des actions de l’OTAN.

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