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Les vieux de France: Geneviève, 93 ans

Geneviève 93 ans à Colombes (hauts-de-Seine).gif
A 93 ans, Geneviève vit seule dans son pavillon

Elle a entendu le message de prévention du ministère passer sur Radio Luxembourg en donnant à manger à son chat. Et balayé l’affaire d’un haussement d’épaule fataliste. « Faut pas s’inquiéter pour moi… » Geneviève est une forte tête, elle se « débrouille » avec une fierté touchante qui fait oublier ses 93 ans dans dix jours et sa frêle silhouette cramponnée à sa canne, dans son pavillon de Colombes (Hauts-de-Seine).

N’empêche, Geneviève n’a pas mis le nez dehors depuis Noël. Et Geneviève est toute seule. Sa plus proche parente, la femme de son fils décédé, lui passe un coup de fil chaque semaine. Mais ses petites filles ont oublié de lui souhaiter bonne année.


« Ce qui me sauve, explique-t-elle lucidement, c’est un petit monsieur très gentil du quartier qui me fait mon marché. » Grâce à lui, elle a pu se mixer du poisson frais, se réapprovisionner en fruits, en café. « Même si je n’ai pas très faim, je me force. Et je bois. Mon mari, qui est mort d’un cancer il y a onze ans, m’enguirlandait toujours parce que je ne buvais pas assez… Alors je pense à lui. » Un bol de café au lait le matin, un verre de rosé et un peu d’eau le midi, pareil au dîner et une tisane le soir… « Le compte y est, assure-t-elle. J’ai calculé tout ça avec mon médecin. »
Le thermomètre du salon affiche 24° : la chaudière, qui avait vingt-cinq ans, vient d’être changée. Elle fonctionne à plein régime. « Sinon j’ai froid », avoue Geneviève, fidèle à son tablier en cotonnade. « Mais je m’aère un peu quand même, la fenêtre de ma cuisine est fermée à l’espagnolette. Et je prends l’air en ouvrant la porte au chat. »

Le jardin, impraticable, est recouvert de glace, renforçant l’impression d’isolement. « Je ne suis pas du genre à demander de l’aide », avoue la vieille dame. « Mais j’ai de la chance. Des voisins solidaires qui passent régulièrement. » Ainsi Bernard s’est-il précipité l’autre soir quand le quartier a été plongé dans le noir après une coupure de courant. « Je l’ai bien épaté, sourit-elle. Je n’ai pas paniqué. Je me suis dit : Ma fille, fais comme si tu étais aveugle. J’ai réussi à trouver à tâtons une bougie, des allumettes, et je suis descendue avec ma canne dans la cave chercher la vieille lampe à pétrole de maman ! »
Combien de personnes très âgées vivant à domicile, comme Geneviève, sont aussi alertes ? Peu sans doute. Mais malgré tout l’isolement lui pèse, elle aimerait bien sortir, voir du monde, ou s’endormir paisiblement.
« Je n’ai qu’une frousse, c’est d’aller dans une maison de retraite. Qu’il m’arrive un pépin et que mon entourage dise : On ne peut pas la laisser comme ça … Alors ce n’est pas un gros coup de froid qui va me faire lâcher la rampe. J’ai vu le reportage des Infiltrés à la télé… Très peu pour moi ! »

 

Le Parisien -11.01.09

 

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