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Rondot en eaux troubles

PARIS (Reuters) - Le général Philippe Rondot a témoigné à charge lundi contre Dominique de Villepin au procès du complot Clearstream, qui aurait visé Nicolas Sarkozy, mais la défense est parvenue à relativiser sa déposition.

Ce spécialiste du renseignement qui compte à son palmarès l'arrestation en 1994 d'Ilich Ramirez Sanchez, dit "Carlos", au Soudan, a fait état de plusieurs interventions de l'ex-Premier ministre dans cette affaire qu'il a consignées dans un "carnet de marche".

Détachant bien ses mots, il a dit penser qu'on s'était servi de lui dans les manoeuvres menées en 2004 avec de faux listings de comptes bancaires de la société luxembourgeoise, confirmant ce qu'atteste ce carnet saisi et versé au dossier.

Philippe Rondot a déclaré que, contrairement à ce qu'affirmait le prévenu la semaine dernière, il avait été question de Nicolas Sarkozy lors d'une réunion le 9 janvier 2004 sur ces listings, organisée au ministère des Affaires étrangères par Dominique de Villepin, alors locataire des lieux.

"Le nom de Nicolas Sarkozy a été cité par les uns et par les autres. M. Jean-Louis Gergorin (alors vice-président d'EADS-NDLR) a évoqué un compte couplé sur un certain Bocsa le liant à Nicolas Sarkozy", a-t-il précisé.

Les noms de Bocsa et Nagy, patronymes hongrois de Nicolas Sarkozy, figuraient parmi des centaines d'autres sur les listes produites déjà fin 2003 par Jean-Louis Gergorin et sur lesquelles Rondot avait commencé à enquêter.

Villepin a dit ce 9 janvier agir sur instructions du président Jacques Chirac, selon le général, qui dit avoir cherché à voir ce dernier mais sans succès.

Le militaire s'est senti manipulé. "On me confie une enquête et je vois débarquer Dominique de Villepin, je ne dis pas qu'il s'empare de cette affaire mais au minimum il s'y intéresse et donne des instructions. Donc, on se sert de moi", a-t-il dit.

"JE N'AI PAS UN QI DE PÉTONCLE !"

Philippe Rondot a affirmé que Dominique de Villepin l'avait appelé au téléphone en mars 2004 pour qu'il demande la remise en liberté d'Imad Lahoud, auteur présumé des faux listings, alors en garde à vue pour une autre affaire.

Rondot a par ailleurs confirmé que de Villepin lui avait dit en juillet 2004 à propos de l'affaire: "Si nous apparaissons, le président de la République et moi, nous sautons".

Enfin, le militaire a expliqué que le ministre lui avait "donné son accord" pour détruire des notes synthétiques sur l'affaire, quand la supercherie a été démontrée.

Cette déposition est gênante pour Dominique de Villepin, poursuivi pour "complicité de dénonciation calomnieuse" et qui nie la réalité de tous ces épisodes.

Le général Rondot a rapporté de surcroit que Jean-Louis Gergorin lui avait dit en avril 2004 avoir transmis les listings au juge financier Renaud Van Ruymbeke - l'acte constitutif de la "dénonciation calomnieuse" - sur demande de Dominique de Villepin.

Selon lui, c'est en juillet 2004 que Dominique de Villepin a reçu un rapport de sa part catégorique sur la falsification, mais il aurait souhaité néanmoins poursuivre l'enquête.

Philippe Rondot a défendu son rôle dans l'affaire. "Je sais qu'en France, les militaires n'ont pas bonne réputation (...) Tout de même, je n'ai pas un QI de pétoncle !", a-t-il dit.

La défense de Dominique de Villepin, questionnant le général Rondot, a fait apparaître que selon le témoin, rien ne permettait de dire que l'ex-Premier ministre savait que les listings étaient faux, avant juillet 2004, ce qui exclurait toute dénonciation calomnieuse de sa part.

Me Gabriel Metzner, avocat de Dominique de Villepin, a lu aussi cette autre note personnelle prise par le général Rondot le 3 mai 2004 : "confirmation de la volonté de Nicolas Sarkozy de pulvériser Dominique de Villepin". C'est Imad Lahoud a qui a dit cela, a expliqué le général Rondot.

Imad Lahoud disait alors avoir rencontré Nicolas Sarkozy. Sur ses notes, le général a aussi noté au même moment : "contact Madhi (Lahoud-NDLR)-Sarko. Retournement, effet boomerang".

Le Monde - 05.10.09

 

 

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