Les talibans assurent ne pas être impliqués dans l'enlèvement des deux journalistes de France 3, kidnappés mercredi au nord-est de Kaboul. Les forces françaises sont mobilisées pour retrouver les otages.
«Nous ne sommes pas impliqués». La petite phrase d'un porte-parole des talibans relance toutes les hypothèses sur l'enlèvement des deux journalistes français kidnappés mercredi en Afghanistan. «Nous avons demandé à nos combattants de nous informer s'ils avaient fait quelque chose mais nous n'avons aucune information venant de cette zone», a-t-il ajouté.
Cette déclaration, à prendre avec prudence, ajoute un peu plus à la confusion qui règne autour de la disparition des deux français. Selon Véronique Veber, une consoeur des journalistes, ils ont été enlevés par «des talibans qui leur ont tendu un guet-apens» dans le village d'Omarkheyl, à une dizaine de kilomètres au sud de Tagab où se trouve la base militaire française la plus proche.
La région où s'est déroulé l'incident est instable et sous l'influence du Hezb-e-Islami, groupe armé rebelle du chef de guerre historique Gulbuddin Hekmatyar, qui avait revendiqué l'embuscade du 18 août 2008 contre les militaires français. Mais les hommes d'Hekmatyar nouent des alliances ponctuelles avec des talibans contre les forces américaines et de l'Otan.
La plupart des étrangers enlevés en Afghanistan et qui sont restés détenus par leurs ravisseurs dans le pays ont été libérés relativement rapidement, après quelques semaines. Mais la situation se complique lorsque les ravisseurs donnent ou revendent leur otage à des groupes rebelles qui les emmènent dans les zones tribales instables, montagneuses et reculées, situées le long de la frontière afghano-pakistanaise.
Ce fut le cas d'un journaliste américain du New York Times, David Rohde, kidnappé en novembre 2008 au sud de Kaboul avec un journaliste afghan et un chauffeur. Les deux journalistes avaient été emmenés chez des talibans dans le Waziristan du Nord, un fief tribal des rebelles au Pakistan, et n'en étaient sortis qu'en juin 2009, plus de six mois après leur enlèvement.
Les recherches continuent
Pas question pour autant de ralentir le rythme des recherches. Les forces françaises, appuyées par des éléments de l'armée et de la police afghanes, se mobilisent ce dimanche pour retrouver les deux otages. Au total, près de 800 des 3.300 militaires que la France compte sur le sol afghan sont déployés en Kapisa. Pour eux, la recherche des otages français est devenue une priorité.
«Nous organisons en permanence des points de contrôle aléatoires sur l'axe Vermont», une route stratégique nord/sud qui permet de rejoindre Kaboul depuis Islamabad, au Pakistan, indique le «chef opérations» des forces françaises en Kapisa, tenu à l'anonymat, depuis son QG de la base de Tagab. Selon lui, «tous les véhicules remontant vers le nord en direction de Kaboul sont fouillés, 24 heures sur 24» depuis que la disparition des deux journalistes de France 3 a été signalée afin d'empêcher leur «exfiltration à bord d'un véhicule».
Participant également aux recherches, une trentaine de gendarmes français ont épaulé dimanche matin la police afghane près de la «base d'opérations avancée» de Tagab où ils ont établi un barrage de contrôle.
Mais les recherches sont difficiles à mener dans cette zone dangereuse, où les attaques sont fréquentes.Dimanche matin, les troupes françaises étaient impliquées dans un nouvel accrochage avec des insurgés. L'incident n'a fait aucun blessé mais a nécessité l'intervention dissuasive de deux chasseurs F-15 américains.
Le Figaro - 03.01.10