Camp de Roms à Sarcelles - (Cliquez sur la photo)
Ils étaient 12 000 à 15 000 Roms en France avant la polémique de l’été dernier. Ils sont toujours autant aujourd’hui. Mais les conditions de vie de ces populations, venues pour la plupart de Roumanie, se sont aggravées, affirment les acteurs de terrain. Les destructions de campements, les éloignements du territoire — avec ou sans aide au retour — n’ont pas enrayé un phénomène migratoire stable depuis le début des années 2000.
« Comme d’habitude, les gens partent et reviennent, y compris dans des endroits où ils étaient installés avant », résume Samir Mile, responsable de La Voix des Roms.
Errance et précarité
En Seine-Saint-Denis, son organisation vient de lancer, avec d’autres, « une plate-forme de soutien aux Roms occupant des terrains », qui appelle « à la liberté de circulation et au respect des droits fondamentaux » de ces personnes. Non loin, Sarcelles (Val-d’Oise), où s’est constitué un immense bidonville de près de 1000 personnes, illustre les déplacements constants suscités par des expulsions régulières depuis ces dernières années. A Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), où l’incendie d’un camp a fait un mort le 6 février, la petite centaine de rescapés de ce sinistre, qui a ravagé les habitats de fortune, a d’abord été hébergée dans un gymnase de la ville, avant d’investir un terrain des Hôpitaux de Paris. Dans le même département, à Choisy, soixante Roms vivent depuis six mois, avec le soutien de la mairie (PC), dans des caravanes prêtées par Emmaüs sur un parking désaffecté. Aux alentours de Marseille, Bordeaux, Strasbourg, Lyon ou Toulouse, « où des municipalités ont parfois contesté les injonctions des préfectures », note Médecins du monde, squats et bidonvilles renaissent au fil des interventions policières, condamnant leurs habitants « à l’errance et à la précarité ».
Face à cette réalité, la commissaire européenne à la Justice, Viviane Reding, a rappelé il y a trois jours que « tous les Etats membres de l’Union devront avoir leur plan d’action en faveur des Roms ». « L’affaire française, c’était l’alarme. Je ne regrette pas », a-t-elle assuré, quant aux vives critiques qu’elle avait émises à l’encontre de la politique d’expulsions massives et à la polémique qui l’avait alors opposée au président Nicolas Sarkozy.
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.En quelques mois, un camp de Roms à Sarcelles (Val-d’Oise), qui avait été évacué pour partie l’année dernière, s’est transformé en bidonville de la taille d’un grand village. Il est vraisemblablement l’un des plus importants en France. Aujourd’hui, entre 800 et 1000 personnes y vivent dans des baraques de fortune.
Au bout d’un petit chemin boueux, les « baraquinas » ont été construites en un temps record, depuis l’été dernier. En quelques mois, des centaines de personnes se sont installées au moment même où les autres camps de la région, notamment celui du Stade de France en Seine-Saint-Denis, ont été évacués. « Je suis arrivé en France en 2006. J’ai d’abord vécu au Bourget, avant de m’installer à Sarcelles en 2007 », raconte Raymond, originaire de la région de Timisoara. Depuis, il est rentré plusieurs fois en Roumanie voir ses proches. « Une grande partie des Roms qui ont touché l’aide au retour, voire tous, reviennent dans les trois semaines, confirme Jean-Claude Vitran, président de la Ligue des droits de l’homme du Val-d’Oise. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Malgré le nombre d’expulsions, ils sont toujours aussi nombreux en France. »
Les Roms de Sarcelles organisent ainsi régulièrement des navettes pour rapporter des marchandises dans leur pays. Plusieurs fourgonnettes sont alors chargées de télévisions, de vélos et autres produits pour aider les familles là-bas.
En contrebas des rails du RER, le petit millier d’habitants vit au jour le jour. Dans les rues sinueuses, des femmes portent des robes longues, les cheveux nattés dans des grands foulards fleuris. Des hommes jouent aux cartes. Les familles les plus chanceuses ont la télévision grâce à des antennes satellites. Mais malgré le très précaire confort de quelques foyers, les conditions d’hygiène et de sécurité sont déplorables. Ici personne ne vient ramasser les tonnes de déchets qui s’entassent entre les constructions de fortune. L’eau se récupère au robinet d’une unique borne d’incendie à l’entrée du camp. Sans parler d’un accès au lieu quasi impossible en cas de feu. Coupés du monde, ils ne sont qu’une toute petite minorité à parler français.
Une poignée d’enseignants vient travailler sur place. Ces membres de l’association Aset (Aide à la scolarisation des enfants tsiganes) font partie des rares personnes à pénétrer dans le bidonville. Cinq camionnettes se transforment en salle de cours, garées sur le petit parking le temps d’un après-midi. « Nous prenons en charge une trentaine d’enfants en moyenne pendant deux demi-journées par semaine, confie Magali, une jeune enseignante. Les familles ont une véritable volonté de scolariser leurs enfants. Les petits sont d’ailleurs hypermotivés. Ils ont une capacité d’apprendre impressionnante. Certains d’entre eux sont déjà allés à l’école en Roumanie. » L’année dernière, quelques enfants ont suivi les cours dans l’école Emile-Zola, à quelques centaines de mètres. Mais c’est presque une école entière qu’il faudrait pour accueillir les 200 enfants qui vivent dans le campement.
Ces campements massifs rendent difficile leur évacuation par les forces de l’ordre. « A Sarcelles, on s’est tous fait surprendre par la rapidité avec laquelle le camp a grossi, les amis comme les adversaires des Roms sont impuissants », s’alarme Jean-Pierre Dacheux, président du collectif de soutien aux Roms du 95.
Commentaires
En fait on savait bien que ces expulsions étaient du pipeau ; une façon de leur payer le voyage aller-retour dans leur pays natal ! Est-ce que les Français vont encore se laisser abuser ?
Cher abad, je pense qu'il est bon de rappeler à quel point Hortefeux et Sarkozy nous ont menti cet été sur les roms de Roumanie, ainsi que sur les "efforts" qu'allaient faire les dirigeants roumains pour garder chez eux cette communauté qui déferle sur l'Europe de l'Ouest.
Ceux qui ont cru qu'on expulsait les Roms sont bien naïfs! On les renvoie pour trois semaines en Roumanie et ils reviennent en France, après avoir fait leurs trafics. C'est évident.