Dominique Strauss-Kahn risque jusqu'à vingt ans de prison s'il est reconnu coupable des crimes dont on l'accuse.
Inculpé pour «agression sexuelle», «séquestration de personne» et «tentative de viol», Dominique Strauss-Kahn risque jusqu'à 20 ans de prison s'il est déclaré coupable. Il devait comparaître dimanche après-midi devant un juge new-yorkais, après avoir passé la nuit dans une cellule de la police de Harlem spécialisée dans les crimes sexuels. Son avocat à New York, Benjamin Brafman, a annoncé qu'il plaiderait non coupable et niait en bloc tous les faits dont l'accuse la femme de chambre de l'hôtel Sofitel, qui a porté plainte samedi.
La comparution de Dominique Strauss-Kahn devant le parquet n'est que la première étape de la procédure judiciaire qui vient de s'enclencher à New York. Contrairement au système inquisitoire français, dans lequel un juge d'instruction met en examen le prévenu, puis décide ou non de le renvoyer devant un tribunal à l'issue d'une longue enquête à charge et à décharge, la justice américaine repose sur un système accusatoire. Autrement dit, le procureur rassemble les preuves pour démontrer l'éventuelle culpabilité de l'accusé. À la défense de prouver l'innocence de son client.
Extradition
Après la comparution de dimanche, le juge devait décider, soit de garder Dominique Strauss-Kahn en détention provisoire, soit de le libérer sous caution. Les avocats pénalistes de Washington, que Le Figaro a pu joindre, penchaient pour cette deuxième hypothèse, tout en restant prudents quant aux spécificités du droit dans l'État de New York. «Les conditions de sa libération et de la caution à payer seront sans doute soigneusement étudiées par le juge, ce dernier évaluera probablement le risque de fuite, vu que le directeur du Fonds monétaire international s'apprêtait à prendre un avion pour la France», commentait dimanche l'avocat pénaliste William Moore.
«Le souci de la justice américaine sera d'assurer qu'il se présente bien aux futures convocations. Je ne serais donc pas surpris qu'on lui interdise de quitter le sol américain», ajoutait-il, persuadé que le juge allait sans doute se pencher de très près sur les conventions d'extradition qui existent entre la France et les États-Unis. «Si c'était un citoyen ordinaire, l'interdiction de voyager serait plus que probable, mais dans le cas de Strauss-Kahn, une personnalité politique ultraconnue, peut-être sera-t-il autorisé à le faire», tempérait un autre avocat. Il soulignait toutefois que son départ apparemment précipité de l'hôtel, et le fait qu'il ait laissé derrière lui son téléphone portable et plusieurs effets pourraient être retenus contre lui comme des «preuves de la conscience qu'il avait de sa culpabilité».
Visa et immunité
L'importance de la caution devrait être à la mesure de la lourdeur des charges qui pèsent sur le prévenu, précisent ces avocats, parlant d'accusations «d'une extrême gravité». La libération peut être assortie d'autres conditions, comme celle de signaler en permanence où il se trouve. La procédure habituelle veut que le juge décide de convoquer dans les jours qui viennent un «grand jury» de 16 à 23 citoyens pour écouter la position du procureur, celle de la défense, et décider d'une inculpation formelle (appelée indictment). «L'accusation devra en principe fournir des preuves supplémentaires» pour que l'on puisse aller au procès, note un autre avocat sans lien avec la défense.
La police de New York a affirmé avoir relevé sur le corps de la jeune femme, des échantillons de preuves qui pourraient permettre d'identifier l'ADN du directeur du FMI, accusé notamment d'avoir forcé la femme de chambre à une fellation. Selon la législation de l'État de New York, une fellation non consentie est considérée comme un crime sexuel.
Bien que la police de New York ait affirmé que DSK ne bénéficiait d'aucune immunité, le Quai d'Orsay a battu dimanche le rappel de ses experts, pour vérifier si Dominique Strauss-Kahn ne pouvait exciper de la protection réservée aux diplomates français. Selon l'accord qui régit les relations entre le FMI et les États-Unis, l'immunité ne concerne que les activités menées par un éventuel accusé «dans le cadre de ses fonctions», a expliqué une source française. Mais une autre convention datant de 1947, concernant les organisations spécialisées des Nations unies, spécifie que tous les directeurs et secrétaires généraux bénéficient des mêmes immunités que les diplomates de leurs pays respectifs. «Apparemment, cette immunité ne s'applique pas à Strauss-Kahn, car il est sous visa G4 et non G1», affirmait toutefois une source informée dans les milieux des organisations internationales à Washington.
Source Le Figaro - 15/05/11
Commentaires
"le Quai d'Orsay a battu dimanche le rappel de ses experts, pour vérifier si Dominique Strauss-Kahn ne pouvait exciper de la protection réservée aux diplomates français"
Ben voyons !