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Jean-Marie Le Pen: " Ce qui se passe en Angleterre, c'est la condamnation du multiculturalisme"

Le président d'honneur du Front National était aujourd'hui l'invité de RTL Matin où il a répondu aux questions de Philippe Corbé

Bonjour Jean-Marie Le Pen

Bonjour.

Est-ce que, comme beaucoup de Français, comme beaucoup de Français qui ont de l'argent peut-être en bourse, vous avez perdu de l'argent ces derniers jours ?

Non, parce que je m'étais dégagé des actions, prévoyant, comme nous l'avons fait depuis quelques mois, le cataclysme monétaire qui est en cours actuellement.

Parce que vous l'aviez prévu ?

Absolument. Prévu et annoncé, dix fois dans les conférences de presse que nous avons faites, qu'il y aurait une crise systémique qui pourrait mettre en cause l'existence même du dollar, sans parler bien sûr de notre monnaie, l'euro.

Alors, concrètement, qu'est-ce qui est en train de se passer ? Si vous l'aviez prévu, c'est que vous devez pouvoir l'expliquer clairement. Qu'est-ce qui est en train de se passer selon vous ?

Eh bien, écoutez, je crois que c'est la fin d'un système qui repose sur le, essentiellement d'ailleurs, sur le dollar, dont on sait qu'il est fabriqué à volonté par la banque américaine, qui fait marcher la planche à billets, et qui ne cesse de se dévaluer. Néanmoins, ça n'a pas empêché les, comment dirais-je, les états de s'endetter d'une façon massive et il était prévisible qu'à un moment donné, cette situation allait basculer dans le désordre. C'est ce qui est en train de se produire et qui n'en est probablement qu'à ses débuts.

Alors, qu'est-ce que devraient faire les dirigeants européens, et notamment Nicolas Sarkozy, pour résoudre cette crise de la dette en Europe ?

Nicolas Sarkozy s'est mis en train de réfléchir parce que la question a dû lui arriver ce matin sur son bureau.

Ca fait plusieurs années qu'il en parle.

Oui, il en parle mais il ne fait rien. Il ne fait rien, d'abord parce qu'il ne peut rien faire. La principale caractéristique du gouvernement français, c'est son impuissance et c'est la raison pour laquelle le Président s'agite beaucoup, fait de la com, comme on dit, de la communication.

Vous pensez que c'est de la com quand il est revenu du Cap Nègre hier pour Paris ?

Bien sûr, bien sûr, parce qu'il n'a pas de possibilité d'action. Il nous parle des niches depuis un certain temps sans en citer d'ailleurs aucune. Un petit peu, vous vous souvenez, comme Robespierre, qui avait dit : "Des têtes vont tomber", sans dire lesquelles. Moyennant quoi tout le monde s'est senti menacé et l'a mis en accusation.

Mais vous connaissez l'expression : "Dans chaque niche il y a un chien qui aboie". Quelle niche peut-il raboter ? Est-ce que la niche sur la restauration -la TVA à 5,5- il pourrait la raboter par exemple ?

Non, moi je crois que c'est beaucoup plus grave que ça. Je crois qu'il faut procéder à des examens très réels et profonds d'une situation comme celle par exemple de la santé. Il y a 10 millions de fausses cartes qui circulent, n'est-ce pas, et rien n'est fait pour y mettre fin.

Il y a des contrôles, plus qu'avant.

Mais beaucoup plus.

Cartes Vitales.

Il faut désactiver, à mon avis, l'ensemble de ces cartes et rétablir un autre système qui permette d'écarter les fraudes, qui sont gigantesques puisque, je crois, que le Parlement les évalue lui-même à 20 milliards. Rien que sur ce secteur là.

Est-ce que vous seriez prêt aussi à supprimer un certain nombre de prestations sociales si vous étiez aux responsabilités ?

Je crois surtout qu'il faut faire une réforme qui aille bien plus loin que ça. Il faut aller à une réforme politique. Ce qui caractérise nos états et en particulier le nôtre, c'est la volonté des élites politiques de se maintenir à tout prix au pouvoir en modifiant les lois électorales de telle sorte que le peuple a de moins en moins d'importance dans la vie politique. Et lui demander, à ce moment là, de faire des efforts considérables comme on va le faire, c'est un coup d'épée dans l'eau parce que le peuple ne suivra pas. Il ne suivra pas plus ici qu'il ne suivra en Grèce, en Italie ou ailleurs.

C'est-à-dire que le peuple français va se rebeller contre le gouvernement face aux nouvelles mesures d'austérité qui vont être prises dans quelques semaines ?

Je pense que le gouvernement est pris dans un dilemme entre, en effet, la nécessité, l'obligation dans laquelle il est placé de réduire ses dépenses.

Il est bien obligé, là.

Absolument, et la capacité qu'aura le pays d'accepter ces mesures. Or, dans un pays où règne le système majoritaire, qui est en fait la représentation d'une minorité au pouvoir, où il n'y a pas de représentation proportionnelle, le Front National a des millions d'électeurs qui ne sont pas représentés. Sans oublier que, tout de même, les députés français ne votent que 20% des lois. 80% des lois qui s'imposent en France viennent de Bruxelles.

Alors, justement, pour qu'il y ait une sorte de, comment dire, de concorde générale, est-ce que vous souhaitez être reçu à l'Elysée par Nicolas Sarkozy, avec d'autres chefs de partis, pour discuter de ce problème de la dette ?

Non pas du tout. Je ne crois pas du tout au mérite de cette discussion. Je crois que nous sommes engagés dans un véritable tunnel et qu'il faudrait des réformes fondamentales que M. Sarkozy et sa majorité ne sont pas prêts à faire.

Augmenter les impôts. Augmenter les impôts par exemple.

Non non. Mais il va, il va augmenter les impôts, en le déguisant parce que, chacun sait que le gouvernement français n'a pas fait de nouveaux impôts, il n'a fait que 25 nouvelles taxes, je crois. C'est le nouveau nom des impôts. C'est la manière dont on présente la note pour qu'elle passe mieux.

Jean-Marie Le Pen, comment est-ce que vous regardez ce qui se passe en ce moment en Angleterre ? La nuit a été plutôt calme, mais ces derniers jours, on a vu des émeutes dans plusieurs grandes villes. Est-ce que ça ressemble, selon vous, aux émeutes françaises en 2005 ?

Oui, bien sûr, et ça témoigne de la prégnance de plus en plus pressante du phénomène de l'immigration massive. Ce qui se passe en Angleterre, c'est la condamnation du multiculturalisme. C'est, malgré les mesures extrêmement énergiques prises après coup par le gouvernement de M. Cameron, c'est le fait que des communautés s'affrontent, des communautés ethniques s'affrontent, étrangères d'ailleurs, d'origine en tout cas, à l'Angleterre. Et que ceci peut déboucher sur la guerre civile, là et ailleurs.

Ce sont des jeunes qui n'ont souvent pas accès à l'université parce que ça coûte trop cher en Angleterre, qui n'ont pas de boulot, qui n'ont pas d'avenir visible pour eux.

Non non. Mais ça, l'explication sociale est trop facile. A chaque fois, les dirigeants, aussi bien politiques qu'intellectuels bottent en touche. A force de botter en touche, on finit par sortir du terrain, et c'est le cas actuellement.

Ca ne vous chose pas quand même les appels à la délation lancés par la presse anglaise, notamment le Sun ?

Non, mais la dénonciation des criminels n'est pas la délation. C'est une morale de truands ça. C'est la morale des voyous qui consiste à dire qu'on ne doit pas dénoncer les assassins ou les criminels. C'est un acte civique.

On a de mauvais souvenirs, en France, de ces dénonciations. C'est un climat quand même assez particulier.

Oui, le climat particulier, c'est le climat de désordre qu'on a laissé s'instaurer, dans ce pays là comme dans d'autres d'ailleurs, et qui nous guette nous-mêmes. Nous aurons des événements de ce style, c'est sans doute, et ça gagnera d'ailleurs le monde entier puisque, aussi bien, la crise mondiale naît du fait que la population n'a cessé d'augmenter, tandis que les biens de consommation, eux, n'ont pas augmenté dans la même proportion. Donc, le fossé entre les besoins et les possibilités de les satisfaire s'est creusé et nous allons vers des événements graves dans tous les pays du monde.

Jean-Marie Le Pen, vous ne regrettez pas d'avoir mis votre fille dans l'embarras en regrettant que le gouvernement norvégien, il y a quelques jours, ait été "naïf" à propos de la tuerie d'Oslo ?

J'ai été extrêmement poli. J'avais pensé à un terme beaucoup plus fort que ça.

Lequel ?

Vous l'avez imaginé, M. Corbé, je pense.

Non.

D'accord. Et je crois que d'ailleurs...

Stupide ?

Le gouvernement et la police de ce pays ont fait amende honorable en reconnaissant les faiblesses qui ont été démontrées dans cette affaire. Je rappelle tout de même que la première mission d'un état, c'est la défense de la sécurité de ses citoyens et quand il ne prévoit pas, or gouverner c'est prévoir, il ne remplit pas sa mission. Je l'ai dit immédiatement. Un tollé d'accusations, d'injures diverses, mais moi, je pensais politique. J'essayais de savoir quelles étaient les raisons politiques et je ne sombrais pas dans le délire sentimental sur un sujet comme celui-là. J'allais à l'essentiel : quelles étaient les responsabilités du gouvernement dans cette affaire ?

RTL Matin - 11/08/11

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