Après un véritable psychodrame, la direction d’Itélé a censuré un entretien que Robert Ménard avait enregistré avec l’africaniste Bernard Lugan dans le cadre de son émission quotidienne « Ménard sans interdit ». Bernard Lugan avait été invité pour présenter son essai Décolonisez l’Afrique qui vient de paraître chez Ellipses.
L’émission a été enregistrée puis déprogrammée. Cette décision relève de la censure et de l’atteinte à la liberté d’expression dont se réclament pourtant les journalistes. Une telle mesure montre que ceux qui se permettent de donner des leçons de démocratie, de tolérance et de « droits de l’homme » au monde entier ne supportent pas le parler vrai. Décryptage des interdits dominants. Récapitulatif de ce qu’il est interdit de dire sur les médias de l’oligarchie.
« Les Africains ne sont pas des Européens pauvres à la peau noire »
Quelle était donc la teneur des propos « scandaleux » tenus par Bernard Lugan ? Robert Ménard avait posé à ce dernier quatre grandes questions :
1-Dans votre livre vous écrivez que les Africains ne sont pas des « Européens pauvres à la peau noire » ; selon vous, c’est pourquoi toutes les tentatives de développement ont échoué en Afrique :
Réponse de Bernard Lugan : le refus de reconnaître les différences entre les hommes fait que nous avons imposé à l’Afrique des modèles qui ne lui sont pas adaptés. Nous l’avons fait avec arrogance, comme des jardiniers fous voulant greffer des prunes sur un palmier et noyant ensuite le porte-greffe sous les engrais. C’est ainsi que depuis 1960, 1000 milliards de dollars d’aides ont été déversés sur l’Afrique, en vain. De plus, nous avons voulu européaniser les Africains, ce qui est un génocide culturel. De quel droit pouvons-nous en effet ordonner à ces derniers de cesser d’être ce qu’ils sont pour les sommer d’adopter nos impératifs moraux et comportementaux? L’ethno-différentialiste que je suis refuse cette approche relevant du plus insupportable suprématisme. Contre Léon Blum qui déclarait qu’il était du devoir des « races supérieures » d’imposer la civilisation aux autres races, je dis avec Lyautey qu’il s’agit de pure folie car les Africains ne sont pas inférieurs puisqu’ils sont « autres ».
« Repentance européenne + victimisation africaine = Afrique immobile »
2-Dans votre livre vous proposez de supprimer l’aide.
Réponse : Oui, car l’aide, en plus d’être inutile, infantilise l’Afrique en lui interdisant de se prendre en main, de se responsabiliser. Dans la décennie 1950-1960, les Africains mangeaient à leur faim et connaissaient la paix tandis que l’Asie subissait de terribles conflits et d’affreuses famines. Un demi-siècle plus tard, sans avoir été aidées, la Chine et l’Inde sont devenues des « dragons » parce qu’elles ont décidé de ne compter que sur leurs propres forces, en un mot, de se prendre en charge. Au même moment, le couple sadomasochiste composé de la repentance européenne et de la victimisation africaine a enfanté d’une Afrique immobile attribuant tous ses maux à la colonisation.
« Ingérence humanitaire : un impérialisme hypocrite »
3- Vous dénoncez l’ingérence humanitaire que vous définissez comme un hypocrite impérialisme et une forme moderne de la « guerre juste », mais n’était-il pas nécessaire d’intervenir en Libye pour y sauver les populations ?
Réponse : Parlons-en. Nous sommes en principe intervenus pour « sauver » les populations civiles de Benghazi d’un massacre « annoncé ». En réalité, nous avons volé au secours de fondamentalistes islamistes, frères de ceux que nous combattons en Afghanistan. Cherchez la logique ! Violant le mandat de l’ONU et nous immisçant dans une guerre civile qui ne nous concernait pas, nous nous sommes ensuite lancés dans une entreprise de renversement du régime libyen, puis dans une véritable chasse à l’homme contre ses dirigeants. Or, le point de départ de notre intervention reposait sur un montage et nous le savons maintenant. Que pouvaient en effet faire quelques chars rouillés contre des combattants retranchés dans la ville de Benghazi ? On nous a déjà « fait le coup » avec les cadavres de Timisoara en Roumanie, avec les « couveuses » du Koweït ou encore avec les « armes de destruction massive » en Irak. A chaque fois, la presse est tombée dans le panneau, par complicité, par bêtise ou par suivisme.
Mais allons plus loin et oublions un moment les incontournables et fumeux « droits de l’homme » pour enfin songer à nos intérêts nationaux et européens, ce qui devrait tout de même être la démarche primordiale de nos gouvernants. Nos intérêts étaient-ils donc menacés en Libye pour que nos dirigeants aient pris la décision d’y intervenir? Etaient-ils dans le maintien au pouvoir d’un satrape certes peu recommandable mais qui, du moins, contrôlait pour notre plus grand profit 1900 kilomètres de littoral faisant face au ventre mou de l’Europe ? Nos intérêts étaient-ils au contraire dans la déstabilisation de la Libye puis son partage en autant de territoires tribaux livrés aux milices islamistes? Sans parler des conséquences de notre calamiteux interventionnisme dans toute la zone sahélienne où, désormais, nos intérêts vitaux sont effectivement menacés, notamment au Niger, pays qui fournit l’essentiel de l’uranium sans lequel nos centrales nucléaires ne peuvent fonctionner…
« Le printemps arabe » : un miroir aux alouettes
4- Votre conception du monde n’a-t-elle pas une influence sur vos analyses et prises de positions ?
Réponse : J’ai une conception aristocratique de la vie, je dis aristocratique et non élitiste, la différence est de taille, et alors ? Depuis 1972, soit tout de même 40 ans, je parcours toutes les Afriques, et cela du nord au sud et de l’est à l’ouest, ce qui me donne une expérience de terrain unique dans le monde africaniste ; c’est d’ailleurs pourquoi mes analyses ont du poids. Dès le mois de décembre 2010, dans ma revue, l’Afrique réelle, j’ai annoncé ce qui allait se passer en Egypte trois mois plus tard. De même, dès le début, j’ai expliqué que le « printemps arabe » n’était qu’un mirage, un miroir aux alouettes autour duquel tournaient les butors de la sous-culture journalistique cependant que, méthodiquement et dans l’ombre, les Frères musulmans préparaient la construction du califat supranational qui est leur but ultime.
Voilà les propos que les téléspectateurs d’Itélé n’ont pas eu le droit d’entendre.
Comment riposter à cette censure?
- - En rejoignant les 350 000 internautes qui, cette année, ont visité le blog officiel de Bernard Lugan : www.bernard-lugan.com
- - En s’abonnant à la revue mensuelle par PDF, L'Afrique réelle , la seule publication africaniste libre http://bernardlugan.blogspot.com/p/comment-sabonner.html
- - En achetant Décolonisez l’Afrique (Ellipses, novembre 2011).
- - En faisant savoir autour de vous que dans la « Patrie des droits de l’homme », un directeur de chaîne de télévision peut impunément censurer un universitaire auteur de plusieurs dizaines de livres consacrés à l’Afrique, conférencier international et expert de l’ONU.
Bernard Lugan
18/12/2011
Bernard Lugan, Décolonisez l’Afrique, Ellipses Marketing, 15/11/2011, 176 pages
Voir aussi :
Robert Ménard dénonce la lâcheté des journalistes
Révolutions arabes ? Non révoltes ethniques et religieuses !
L'histoire de l'Afrique doit-elle être enseignée dans le secondaire aux dépens des fondamentaux de l'histoire de France ?
Le décalogue de l'idéologie dominante
Correspondance Polémia – 20/12/2011
Image : 1re de couverture
20/12/11
Commentaires
Merci, chère Gaëlle de nous informer de ce nouveau cas de censure. C’est ça, leur démocratie et leur liberté d’expression. Il est clair que les radios officielles (d’état on non !) ne peuvent supporter qu’un Bernard Lugan puisse donner son avis sur la situation en Afrique.
rien d,étonnant que B L soit censuré par les journaleux de la bien-pensance , eux vont à la soupe du politiquement correct!
quant à B L, il est un grand journaliste et grand spécialiste de l,Afrique.
salutations.
C'est purement scandaleux! Et les mêmes dénoncent la dictature en Corée du Nord! Pauvres imbéciles!