PARIS (Reuters) - Les députés français ont provoqué un incident diplomatique majeur avec la Turquie en votant jeudi une proposition de loi visant à pénaliser la négation des génocides, notamment le génocide arménien.
Ankara, qui ne reconnaît pas que les massacres d'Arméniens en 1915 relèvent d'un génocide, a réagi immédiatement en qualifiant le texte adopté à l'Assemblée nationale d'inacceptable et en rappelant son ambassadeur en poste à Paris.
Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a estimé que ce vote avait ouvert des plaies qui seraient difficiles à refermer.
Pour le chef du gouvernement turc, qui a protesté à de multiples reprises avant le vote, le texte adopté à Paris relève d'"une politique fondée sur le racisme, la discrimination et la xénophobie".
La Turquie, a-t-il ajouté, annule toutes les rencontres politiques, économiques et militaires prévues avec la France. Elle annule également l'autorisation qui était faite aux avions de chasse et aux bâtiments de guerre de l'armée française d'atterrir ou d'accoster en Turquie.
Paris a déploré le coup de colère du gouvernement turc et a rappelé que la France considérait la Turquie comme un partenaire important. "Je regrette cette réaction", a dit le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, sur i>Télé. "J'en appelle au bon sens et à la mesure."
Dans une lettre adressée la semaine dernière à Nicolas Sarkozy, le Premier ministre turc avait prévenu des graves conséquences d'une telle législation sur les relations entre les deux pays, déjà compliquées par la candidature turque d'adhésion à l'Union européenne à laquelle Paris n'est pas favorable.
UN AN DE PRISON
Le texte, déposé par la députée UMP Valérie Boyer, a été validé par les députés français lors d'un vote à main levée. Les quatre groupes de l'Assemblée nationale avaient appelé à voter pour mais des députés de la majorité comme de l'opposition ont voté contre ou se sont abstenus.
Le texte initial visait à sanctionner la seule contestation du génocide arménien mais il a été modifié le 7 décembre pour s'étendre à "la contestation de l'existence des génocides reconnus par la loi".
Il prévoit de punir la négation d'un génocide d'un an de prison, d'une amende de 45.000 euros ou des deux.
L'examen s'est déroulé dans un climat d'émotion. Un important dispositif de sécurité a été mis en place à l'extérieur et à l'intérieur du Palais-Bourbon, aux abords duquel quelque 3.000 personnes ont manifesté dans la matinée, selon l'estimation de la police.
"Je ne comprends pas pourquoi la France censurerait ma liberté d'expression", a dit à Reuters Yildiz Hamza, un Français d'origine turque qui préside une association de familles turques. Juger de la vérité historique, "c'est le travail des historiens, pas des politiciens", a souligné pour sa part Aytem Doguant, une Française d'origine turque.
A quelques mois de l'élection présidentielle en France, "la majorité veut récupérer le vote des Arméniens juste avant les élections", a-t-elle ajouté.
ENJEU ÉLECTORAL
La diaspora arménienne en France, forte de 500.000 personnes, est à nouveau un enjeu électoral à l'approche des élections présidentielle et législatives du printemps 2012.
De nombreux représentants des organisations arméniennes ou turques étaient présents dans le tribunes du public de l'Assemblée, où les médias turcs et arméniens étaient fortement représentés.
Valérie Boyer a jugé que le texte n'était "absolument pas dirigé contre la Turquie" et l'UMP Patrick Devedjian, ancien ministre d'origine arménienne, l'a qualifié de "texte de dignité".
L'Arménie, soutenue par de nombreux historiens et parlements mondiaux, estime à 1,5 million le nombre de victimes des massacres de 1915, qu'elle considère comme le fruit d'une politique délibérée de l'Empire Ottoman dans ce qui est aujourd'hui l'est de la Turquie.
Ankara affirme de son côté qu'il ne s'agissait pas d'un génocide et que de nombreux Turcs musulmans et Kurdes ont également été tués lors de l'invasion des troupes russes en Anatolie orientale, parfois avec l'aide de milices arméniennes.
Tandis qu'Ankara donnait de la voix, les autorités arméniennes ont salué chaleureusement le vote des députés français.
"Par l'adoption à l'Assemblée nationale de cette proposition de loi criminalisant la négation des génocides, la France a de nouveau confirmé sa haute mission de berceau des droits de l'homme et démontré une fois plus son engagement en faveur des valeurs humaines universelles", dit le ministre arménien des Affaires étrangères, Edward Nalbandian, dans un communiqué.
La proposition de loi pourrait être examinée début 2012 par le Sénat. Valérie Boyer a souhaité que le texte soit inscrit "très vite" à l'agenda de la haute assemblée afin, a-t-elle dit, "d'avoir une loi effective à la fin de cette législature".
Emile Picy, avec Ibon Villelabeitia à Ankara et le service France, édité par Patrick Vignal
Yahoo!Actu - 22/12/11
Commentaires
Les Allemands doivent se frotter les mains. Les liens économiques, déjà fort étroits qui existent entre la Turquie et l'Allemagne vont pouvoir se renforcer à nos dépends. Mais cela ne gêne pas du tout nos élus, les privilégiés du système. Ils sont vraiment à vomir.
C’est l’occasion de rappeler qu’en 1897 (donc à peine plus d’un siècle) aux Etats-Unis, dans l’état d’Indiana, les députés voulaient voter une loi imposant comme valeur du nombre Pi (qui représente le rapport de la longueur d’un cercle à son diamètre) le nombre 3,2. Outre que cette valeur est une très mauvaise approximation (3,1 est plus près de Pi que 3,2), mais cela aurait rendu toutes les mathématiques incohérentes (ou contradictoires) : autrement dit, avec cette loi, il n’y aurait plus de mathématiques. Heureusement, les efforts des mathématiciens ont réussi à faire échouer le projet, sauvant les mathématiques.
Moralité : ce n’est pas au législateur de définir les vérités, qu’elles soient scientifiques ou historiques. Et quand il s’en mêle, il est dangereux : c’est pour énoncer des inepties et des contre-vérités, car la politique se moque éperdument des vérités VRAIES ! Cette loi, qui n’est qu’une resucée de la loi Pleven-Gayssot n’échappe pas à ce principe !
Et des génocides, il n’en manque pas : le génocide vendéen, celui des Harkis et des pieds-noirs, du Ruanda, etc…
Conclusion : Tous les Faiseurs de Lois sont...HISTORIENS, et si vous refusez de l'admettre vous tombez sous le coup de la Loi du (Zut, elle n'a pas encore été fabriquée ou pondue, demandons qu'une Loi soit faite pour que cette Loi soit fabriquée ou pondue, sinon demandons qu'une Loi soit faite pour ....etc , c'est hégélien; çà y est, v'là un théorème Con plus que la Lune, une intuition en quelque sorte , résumée ainsi : Toutes les lois pour la défense de la liberté de ne pas avoir le droit de penser autrement , sont Hégéliennes, c'est un peu difficile à comprendre, le mieux c'est d'obéir aux injonctions sans discuter, et là, çà devient une Loi.)
"Et des génocides, il n’en manque pas : le génocide vendéen, celui des Harkis et des pieds-noirs, du Ruanda, etc…"
Bien d'accord avec abad... on pourrait rajouter le génocide des russes blancs massacrés par les bolchéviques russes plus russes que les russes. Voir le livre de Anne Kling.
En route pour 1984 !
Nos "zélus" sont des "megasionistes" ;o)
@ babotchka: sans oublier le génocide des Indiens d'Amérique du Nord! Ni celui des Aborigènes d'Australie, de Nouvelle-Zélande, et celui des Canaques dans les Antilles.