Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Affaire Merah: les services de renseignements ont-ils failli ?

Les critiques pleuvent sur la DCRI - notamment - qui n'a pas réussi à empêcher Mohamed Merah de commettre des attentats alors qu'il était recherché.

 
0
 

Le 22 mars 2012, les membres du RAID quitte le terrain après l'assaut donné contre Mohamed Merah. (AFP / PASCAL PAVANI)

La surveillance des réseaux islamistes radicaux exercée par le renseignement français a été critiquée –notamment par Marine Le Pen et Jean-Pierre Chevènement- après la révélation que Mohamed Merah suspecté de sept meurtres était suivi par ces services depuis plusieurs années.

Sévère, le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, a estimé qu'il fallait faire la lumière sur une "éventuelle faille des services de renseignements dans la surveillance de Mohamed Merah", même s'il a défendu l'administration. La DCRI, fusion de la DST (direction de la surveillance du territoire) et des RG (renseignements généraux) en prend pour son grade. Alors qu'elle dispose de tous les moyens nécessaires pour enquêter dans les meilleures conditions, elle n'a pas réussi à empêcher les tueries. Est-elle responsable ? Pourquoi Mohamed Merah n'a-t-il pas été arrêté alors qu'il était surveillé depuis 2011 ?

Mohamed Merah avait déjà été repéré par les services

Condamné à quinze reprises, Mohamed Merah présentait un "profil violent", des "troubles du comportement quand il était mineur, compatibles avec l'extrême violence".

Le Toulousain a été détenu deux ans de 2007 à 2009, condamné à un mois de prison ferme pour conduite sans permis, et effectué deux voyages suspects en Afghanistan et au Pakistan... le moins que l'on puisse dire c'est que le CV de Mohamed Merah ne passe pas inaperçu.

Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, a assuré que la poignée de djihadistes français recensés par les services de renseignements étaient "tous surveillés".

En effet, Mohamed Merah avait attiré l'attention des services. Après ses deux voyages en 2010 et 2011, - dont l'Afghanistan, le Pakistan, les forces américaines et de l'Otan disent n'avoir aucune trace - le jeune homme est fiché par les renseignements en 2011. Il est alors soupçonné d'appartenir à l'islamisme radical. Son frère Abdelkader, 29 ans, a lui aussi été inquiété dans une filière de djihadistes en Irak sans avoir été mis en examen. Mohamed Merah est alors convoqué en novembre 2011 par un service régional de renseignement intérieur pour connaitre le motif de ses voyages. Il explique alors y être allé pour faire du tourisme.

Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, a admis que le jeune homme était, comme les quelques dizaines de "djihadistes" de retour, surveillé depuis quelques années. Il a expliqué que c'était la procédure normale pour beaucoup de personnes qui se sont "engagées dans le radicalisme islamiste".

De plus, depuis les attentats du 11 septembre, les services de renseignements ont redoublé d'effort pour prévenir le terrorisme. "Jusqu'en 2001, les services secrets étaient dans une méconnaissance des structures djihadistes. Après il y a un resserrement et il y a eu une vaste surveillance des mosquées et des imams", rappelle Samir Amghar, auteur de "Le salafisme aujourd'hui. Mouvements secteurs en Occident" (Ed.Michalon 2011).

En effet, la France a mis en place une surveillance des imams et prédicateurs islamistes radicaux, qui risquent des poursuites s'ils sont français, et l'expulsion s'ils sont étrangers. Depuis 2005, des pôles régionaux, sous l'autorité des préfets, contrôlent salles de prière, commerces, cafés susceptibles de servir de lieux de financement ou de prosélytisme.

Si rien ne permet encore de savoir comment Mohamed Merah a basculé dans la violence, les moyens mis en oeuvre pour éviter les attentats auraient dû pousser la DCRI a plus de vigilance face au cas Mohamed Merah.

"Notre mission est de repérer les fanatisés et de les purger"

Claude Guéant a aussitôt pris la défense de la DCRI, notant que rien ne permettait de "penser qu'il préparait une action criminelle". Il a expliqué qu'"arrêter quelqu'un qui professe des idées salafistes, c'est absolument impossible. Il n'y a aucune base juridique (...) En France, il n'y a pas de flagrant délit d'opinion et c'est tant mieux".

Pourtant, Bernard Squarcini, le chef de la DCRI, avait dans une interview au "Figaro" affirmé que "avec la DGSE, la DCRI [pêchait] à la fois de manière intense au chalut pour débusquer les filières djihadistes qui partent en Afghanistan, mais aussi au harpon, en ciblant des individus fanatisés mais isolés, n'appartenant à aucune cellule.

Notre mission est de les repérer et de les "purger" au plus vite, avant qu'ils ne commettent l'irréparable." Dans cette interview, il explique en détail l'interpellation préventive de deux personnes, dont l'une au moment où elle se procurait des armes sur Internet.

Pourquoi les service de renseignements n'ont-ils pas détecté que Mohamed Merah se procurait des armes ? Un arsenal important a été retrouvé dans l'appartement où il s'est retranché.

Une cellule dormante à lui tout seul, donc plus difficile à repérer

"Nous n'avons aucun élément" permettant de rattacher Mohamed Merah "à une organisation quelconque sur le territoire", a dit aussi le procureur de la République de Paris François Molins, parlant de son "profil d'autoradicalisation salafiste atypique". "Il est allé en Afghanistan sans passer par les filières connues, par ses propres moyens, sans passer par les facilitateurs et les pays surveillés", a expliqué le procureur.

Pourtant le profil de Mohamed Merah est certes "atypique" mais pas méconnu. Il est ce qu'on peut considéré comme une "cellule terroriste dormante" autonome. A cet égard, il aurait dû être une cible prioritaire de surveillance. Gilles Kepel explique que depuis la mort de Ben Laden, Al-Qaïda est encore moins centralisé. "Un militant islamiste post-Al Qaïda, Abou Moussab al-Souri, qui a écrit "Appel à la résistance islamique mondiale", 1.500 pages publiés sur Internet, considère que le djihad peut être 'individuel avec de toutes petites cellules terroristes'.

L'idée c'est que des cas endoctrinés vont pouvoir fonctionner de manière quasi-autonome. Les attaques dispersées sont alors une phase initiale qui vise à déstabiliser l'ennemi." Des cellules qui ont aussi l'avantage d'être plus difficilement détectables.

En 2010, on comptabilisait 14 Français dans la zone pakistano-afghane

Les moyens d'action de Mohamed Merah s'inscrivent parfaitement dans cette approche et difficile d'imaginer que les services de renseignements ignoraient ce type d'actions. En février 2011, le "Figaro" publie des notes confidentielles de la DCRI qui révèlent que la zone pakistano-afghane, est la "première pourvoyeuse de menaces" contre l'Europe, continue d'attirer "les volontaires au combat, notamment européens. Ceux-ci sont passés, en moins de trois ans, de quelques cas isolés à plus d'une centaine d'individus". Selon la DCRI, "la présence de 14 Français a été signalée en 2010" dans les camps jihadistes de la région.

Le Nouvel Observateur - 22/03/12

Commentaires

  • Mais enfin, la DCRI ne va pas s’attaquer à une Chance Pour la France, voyons ! Les Chances Pour la France sont sacrées !

  • Cette affaire pue le coup fourré !
    C'est comme une grosse saucisse de Toulouse, un genre de patriot act à la française ;o)
    La preuve en est que le nain n'a rien trouvé de mieux que de choisir de faire surveiller les sites internet dits "extremistes" plutôt que de réduire l'immigration allogène !

  • une sorte de franc-tireur djihadiste en quelque sorte!!
    les services de renseignements doivent surement bien faire leur boulot , mais aprés il doit avoir le coté politique , en plus la France étant la championne mondiale des drh , donc la marche sur des oeufs ne doit pas étre facile , sans compter les médiats ,les assocs préts à dénoncer toute tentative de dérive ultra-sécuritaire qui pourrait rappeler des heures sombres de l,histoire ancienne!
    sous la révolution Française , la loi sur les suspects ne génait point les autorités de l,époque , autres temps autres moeurs!!

  • @ telephobe,
    la conclusion et les mesures sarkozistes ultra-pertinentes que tu soulignes rappellent le "chercheur" qui ordonne aux puces de sauter puis leur coupe successivement les pattes, sa conclusion : "quand on coupe 4 pattes a une puce, elle devient sourde", d ou mesures appropriées !

Les commentaires sont fermés.