Depuis quelques jours, la presse de gauche se mobilise pour défendre Christiane Taubira, ministre de la Justice, « l’une des cibles privilégiées de la droite et de l’extrême droite sur le Web » (Le Monde du 21 mai). Mais la mission est difficile : si Mme Taubira est attaquée, c’est qu’elle est attaquable.
D’abord indépendantiste guyanaise, puis député non-inscrite, elle vote l’investiture du gouvernement Balladur mais devient subitement radicale en figurant en quatrième place sur la liste présentée par Bernard Tapie aux élections européennes de 1994. Candidate radicale de gauche aux élections présidentielles de 2002, elle obtient 660.500 voix ; il en manque 194.600 à Lionel Jospin pour accéder au second tour… Incontrôlable, elle s’oppose à la loi sur les signes religieux dans les écoles et vote « non » au référendum européen de 2005, contrairement à ses amis socialistes et radicaux, et s’incruste jusqu’en 2011 dans un HLM de la Ville de Paris.
Elle collectionne les gamelles aux élections cantonales, municipales et régionales, et a annoncé qu’elle renonçait au siège de député qu’elle occupait depuis 1993 plutôt que d’affronter à nouveau les électeurs au mois de juin. Son œuvre législative se compose essentiellement d’une loi mémorielle du 10 mai 2001 qui a fait de l’esclavage et de la traite transatlantique un crime contre l’humanité.
Or, pour sa première entrée dans un gouvernement, ce personnage sans envergure ni électeurs se trouve d’emblée propulsé à la tête d’un ministère régalien, au troisième rang protocolaire ! Il y a là un mystère que la règle de la parité ne suffit pas à éclairer. Personne n’a pu donner d’explication plausible à la promotion surprise de Mme Taubira.
Il y en aurait bien une, pourtant. Quand Jean-Marc Ayrault a inauguré son Mémorial de l’abolition de l’esclavage à Nantes, le 25 mars dernier, il a cherché à rassembler des personnalités en vue pour donner à l’événement un retentissement national, voire international. Il n’en a pas trouvé beaucoup : Nicéphore Soglo, ancien président du Bénin, Lilian Thuram, footballeur guadeloupéen… et Christiane Taubira (photo).
La nomination de celle-ci place Vendôme ressemble donc assez à un renvoi d’ascenseur. Elle pourrait aussi avoir un avantage pratique du point de vue de Jean-Marc Ayrault. Celui-ci, on s’en souvient, a été condamné en 1997 pour favoritisme envers un imprimeur. Comme le nouveau président de la République avait assuré que son gouvernement ne comprendrait pas de personnes condamnées, ce détail pouvait faire tache. Or Christiane Taubira a de son côté été condamnée par le tribunal des prudhommes en 2004 pour licenciement abusif de son assistante parlementaire. En la nommant à ses côtés, et au ministère de la Justice qui plus est, Jean-Marc Ayrault relativisait son propre passé judiciaire.
François Kernan
Crédit photo : Parti socialiste, via Flickr, licence CC
Article publié sur Novopress Breizh.
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Commentaires
Je ne crois qu’il s’agit d’une erreur de casting, car je trouve qu’elle est très représentative de l’état d’esprit de ce gouvernement : pleine de haine des Français et de la France !
Taubira pas d'tirer la chasse ;o)