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Jacques Le Goff - Une vie pour l'Histoire

 

JACQUES  LE GOFF - Une vie pour l'Histoire

 

Une vie pour l'Histoire



Jean Pierinot
le 01/04/2014
Jacques Le Goff est mort, ce 1er avril, à Paris, âgé de 90 ans. Né en 1924, à Toulon, il a consacré sa vie à l'exploration du Moyen Âge. Normalien et agrégé d'Histoire, il a participé aux belles heures de l'École des Annales avec les disciples de Marc Bloch (1886-1944) tel Fernand Braudel et Lucien Febvre. Tous ses ouvrages évoquent un Moyen Age qui serait un «tremplin pour l'avenir, Moyen Age qui apparaît comme la matrice de notre modernité ». A la question «l'Europe est-elle née au Moyen Age ?», Jacques Le Goff n'apporte qu'une réponse: « Oui, et c'est une bonne nouvelle.» Agnostique et Européen convaincu, il est mondialement connu comme l’un de nos plus grands médiéviste. Il est considéré comme "le père de la Nouvelle histoire".
 
 
Dans "L'Europe est-elle née au Moyen Age? " ( Ed. Seuil), il expose sa conception de la naissance de l'idée européenne. Il divise son étude en quatre périodes, de la fin de l'empire romain à la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb.

Selon Jacques Le Goff : « La mémoire ne cherche à sauver le passé que pour servir au présent et à l’avenir ». Pour lui, l’inscription dans le temps est un élément constitutif de l’identité collective. Tout groupe est en effet confronté à la question de la pérennité de son identité. La mémoire participe à la construction de l’identité de nos sociétés.

Jacques Le Goff  était aussi un historien ancré dans le monde. Dans une interview à La Vie  (2004) il expliquait sa position hostile à l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne : « Quel est le territoire de l’Europe? La géographie a fait qu’au Nord, à l’Ouest et au Sud, la question soit facile à trancher. En revanche, à l’Est, pas de frontières nettes... Or, il n’y a pas d’espace politique sans une certaine conformité à la géographie. Pour l’essentiel, la Turquie est une puissance asiatique, pas européenne. La question se pose différemment pour la Russie, qui, culturellement et historiquement, fait partie de l’Europe. Pour moi, l’Europe s’arrête à l’Oural et au Bosphore, même s’il est clair que la Russie n’entrera dans l’Union qu’avec ses territoires asiatiques. La question est partiellement résolue depuis 1989, puisque la plupart des territoires non russes de l’URSS ont pris leur indépendance. »

 
Dans un article intitulé « Le pouvoir et l’histoire » ( Libération, 19/10/2007), face aux lois liberticides, il défendait la liberté pour l’histoire : « Laissons aux historiens le soin d'établir les faits. Et, si une situation historique est complexe, si une mémoire est tourmentée, laissons aux citoyens le soin de se faire une opinion en fonction des informations. »

Héritier de l'école des Annales, il fut l'auteur d'une oeuvre monumentale et très dense. Parmi ses plus récentes publications: "Le Moyen Age et l'Argent" (2010), "Le Moyen Age expliqué en images" (2013) ou encore, paru en janvier 2014, "Faut-il vraiment découper l'histoire en tranches?" aux éditions du Seuil. Son ouvrage le plus connu est consacré à Saint Louis (Gallimard, “ Bibliothèque des Histoires ”, 1996 »), une somme de 1000 pages. On note aussi  "Les intellectuels au Moyen Âge" (Seuil, 1957)," La civilisation de l'Occident médiéval" (Arthaud, 1964) etc. Il se situe dans la lignée des Marc Bloch, Lucien Febvre, Fernand Braudel, Georges Duby,  Maurice Lombard  et Jean Favier.

Jacques LE GOFF, un Européen pour qui  « Il n’y aurait pas eu d’Europe sans les bibliothèques, sans la présence du savoir gréco-romain dans l’enseignement. Platon, Aristote, Cicéron, c’est bien le Moyen Âge qui les a fait connaître et qui les a installés dans la pensée européenne ! L’apport grec se résume, au plan politique, à la démocratie et, au plan du savoir, au goût de la science et à l’esprit critique. Tout cela, aujourd’hui encore, reste très européen. La plupart des autres civilisations sont restées imperméables à l’esprit critique. Dans l’apport romain, je retiens essentiellement le droit. Un apport que le Moyen Âge va considérablement enrichir. Au droit romain, il a ajouté le droit canonique et le droit coutumier, qu’il a couchés par écrit au XIIIe siècle.»

Jacques Le Goff rejoint Jean-François Mattéi au Panthéon des Européens illustres.
 
METAMAG

Commentaires

  • Un avis personnel sur le "Saint-Louis" de Jacques Le Goff...

    Plus qu'une simple biographie, c'est là une véritable somme sur Saint Louis que nous livre Jacques Le Goff. L'ouvrage, d'une grande érudition, demeure néanmoins agréable à lire de part le style à la fois vivant et didactique de l'auteur.

    Après avoir abordé dans une première partie le règne de Louis IX de façon chronologique, Jacques Le Goff poursuit avec une étude thématique du personnage et de l' époque. Le lecteur se familiarise ainsi tout d'abord avec la vie au XIIIe siècle, puis est entraîné peu à peu par l'auteur dans l'intimité du roi.

    Un chef-d’œuvre littéraire indispensable pour tout amateur ou passionné d'histoire de France.

    E.L.

  • Jacques Heers l'an dernier, Jacques le Goff aujourd'hui, le Moyen-âge vient de perdre l'un de ses plus grands historiens. Quelle période passionnante - qui a duré 1000 ans, quand même ! - Jacques Heers avait expliqué l'origine des impostures
    sur cette période par les pionniers de la Renaissance italienne, les Pétrarque, Boccace et Cie., qui, pour réhabiliter les auteurs Romains de l'Antiquité avaient besoin de dépeindre le Moyen-âge comme une période obscure, barbare et inculte; cela leur permettait, par contraste, de mieux se mettre eux-mêmes en pleine lumière.
    Ces préjugés seront soigneusement entretenus au cours des siècles, jusqu'à nos jours, où le terme "moyenâgeux" est le repoussoir préféré des "progressistes" !
    Mais lisons et relisons Le Goff et offrons ses ouvrages comme cadeaux intelligents à nos enfants !

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