Marseille / Publié le Jeudi 25/09/2014 à 06H43
Après l'incroyable couac à l'aéroport mardi, la question de l'efficacité des contrôles aux portes de la ville se pose
Photo Nicolas Vallauri
Pouvons-nous dormir sur nos deux oreilles et placer une confiance aveugle en ceux qui sécurisent les grandes portes d'entrée de notre ville que sont l'aéroport Marseille-Provence, le port maritime, et la gare Saint-Charles ? Alors que trois djihadistes présumés - des proches de Mohamed Merah - ont débarqué sans être inquiétés sur le tarmac mardi, ces questions s'imposent d'elles-mêmes.
A l'aéroport
Chaque jour, ce sont 150 fonctionnaires de la police aux frontières (PAF) qui sécurisent les lieux, qui gèrent la sûreté des vols mais aussi et surtout le contrôle des passagers. Pour ceux qui voyagent dans l'espace Schengen, seul un contrôle aléatoire est en place. Pour les partants et arrivants de vols internationaux, il est systématique.
"On vérifie qu'ils ont bien une assurance, qu'ils ont l'argent nécessaire pour rentrer chez eux et on passe leur passeport au scanner. Là, notre logiciel Cheops (Circulation hiérarchisée des enregistrements opérationnels de la police sécurisés) détecte si la personne est en fugue ou recherchée, et les services de police concernés notent l'attitude à tenir : surveiller, prévenir simplement, ou intervenir", détaille un agent de la PAF. Il y a quatre jours, lorsque deux adolescentes - soupçonnées de vouloir rejoindre l'Irak pour y faire le djihad - se sont présentées pour embarquer vers la Turquie, elles ont été repérées et interpellées.
Mardi à 14 heures, les trois djihadistes présumés n'ont d'abord pas été annoncés par les autorités turques sur le vol qui filait vers Marseille, et en plus le trio a eu la chance que le fameux logiciel Cheops soit en cours de maintenance. "Du coup, on a juste vérifié que leur tête ressemblait à la photo sur le passeport dont on a aussi contrôlé la véracité, et point barre ! Quand on a eu l'info comme quoi ils avaient atterri chez nous, on les a cherchés mais on ne savait même pas comment ils étaient habillés", confiait un fonctionnaire inquiet. Et voilà comment trois djihadistes se retrouvaient libres comme l'air.
"Ce qui est dingue c'est que cette maintenance, qui peut durer plusieurs heures, est faite régulièrement. Et on n'a pas de système de substitution, donc clairement, pendant ces heures-là, la sécurité est zéro !Alors quand c'est pour chercher la fiche d'une voiture volée, ça peut attendre, mais quand ce sont des proches de Merah qui débarquent, ce n'est pas la même chose, peste cet agent de la PAF. Et cela représente un vrai danger : on a des contrats jeunes chez nous, des gens qui ne restent que peu de temps, et il peut y avoir des fuites..."
Dans le port
Reçus par centaines chaque année à Marseille, les plus grands paquebots du monde et leurs 5 000 à 8 000 occupants constituent autant de cibles potentielles pour des terroristes déterminés. Identifiée par l'AIS, véritable carte d'identité électronique des navires de commerce, leur route comme d'ailleurs celle de tous les bateaux à risque, est suivie par le système français Spationav.
Celui-ci fait la synthèse de l'ensemble des informations recueillies par tous moyens terrestres, aériens, maritimes et spatiaux afin de repérer très en amont un navire qui s'approcherait dangereusement d'un autre ou mettrait le cap à grande vitesse sur un site littoral sensible comme le complexe industrialo-portuaire de Fos. Les deux bassins de Marseille, dont le commandant du Grand port maritime (GPMM), Amaury de Maupeou, rappellent qu'ils appliquent à la lettre les mesures du code de sûreté international ISPS, imposé par les États-Unis après les attentats du 11-Septembre.
Les croisières sont également très surveillées à quai, précise Jacques Massoni, directeur du MPCT, l'immense terminal privé de Marseille. "Les passagers sont soumis à un contrôle à l'entrée du site et à un autre lors de l'embarquement avec double contrôle d'identité, double passage sous portique et contrôle par scanner de 100 % de leurs bagages".
Concernant les lignes de la Corse et de l'Afrique du Nord, la SNCM a mis en place à bord de tous ses bateaux un plan de sûreté dont le détail reste confidentiel mais qui a été audité avec succès en 2013. "Les mesures adoptées sur le Maghreb ont été étendues, à l'identique, à la Corse", souligne Jacques Vincent, officier de la SNCM en charge de la Sûreté, ajoutant que la compagnie participe à de nombreux exercices simulant des attaques terroristes.
Hasard du calendrier, le prochain se déroule ce matin à bord du cargo-mixte Jean Nicoli, conduit en collaboration avec le Peloton de sécurité maritime et portuaire (PSMP). "La prévention de la menace terroriste est à l'origine de la création des deux PSMP de Port-de-Bouc en 2009 et de Marseille en 2010", rappelle pour sa part le chef d'escadron Jean Pasquier-Bernachot, patron de la Compagnie de gendarmerie maritime de Marseille.
Tous deux réunissent 65 militaires rompus à ce type d'intervention, équipés de bateaux rapides, bien armés et très manoeuvrant pour intervenir dans les zones les moins accessibles des bassins portuaires.
LA PROVENCE