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Manifeste pour une nouvelle politique internationale de la France. Par Aymeric Chauprade

La France face à la question
islamique : les choix crédibles pour un avenir français

Publié par Aymeric
Chauprade
le 11 août 2014 dans Articles

 

Il est loin
le temps où le monde arabe rêvait de développement, de modernisation, de
sécularisation d’un islam sunnite toujours menaçant pour les minorités chrétiennes
et chiites. Ce temps-là c’était celui du nationalisme arabe, de Nasser jusqu’à
Saddam Hussein en passant par Hafez el Assad. Le temps de régimes autoritaires
tournés vers le développement et qui offraient aux femmes, aux chrétiens et à
toutes les minorités un rempart face au fondamentalisme sunnite autant que
d’inéluctables perspectives d’ouverture démocratique si l’on avait bien voulu
laisser les processus internes se dérouler à leur rythme historique. C’était
aussi le temps où la cause palestinienne était encore une cause nationaliste et
pas encore une cause islamique. Seulement voilà, de l’eau a coulé sous les
ponts et l’Autorité palestinienne comme le Fatah ont été effacés par le Hamas.

Prendre acte de la disparition du nationalisme arabe

Ce temps des
nationalismes arabes est bien révolu. Rongé par la corruption de ses propres
élites, dévasté volontairement par la politique américaine (ennemie des
nationalismes pétroliers) autant que par l’énorme erreur stratégique d’Israël
avec lequel il aurait pu s’entendre pour assurer à la fois l’existence d’un État
palestinien et la sécurité de l’État juif, le nationalisme arabe a signé son
acte de décès.

En septembre
2001, la collusion probable entre une partie de l’État profond américain et
l’État profond saoudien (ses services de renseignement), qui fut une sorte
d’aboutissement paroxystique d’une alliance monstrueuse née dans la guerre
d’Afghanistan face aux Soviétiques, créa une onde sismique mondiale. Le
fondamentalisme sunnite se déchaîna tandis que les États-Unis, profitant de la
“guerre contre le terrorisme” tentèrent d’opposer l’utopie d’un projet
unipolaire à l’évidence du monde multipolaire.

Les
partisans de la politique américaine purent successivement applaudir la guerre
en Afghanistan contre des Talibans que Washington, Islamabad et Riyad avaient
créés, la destruction du régime de Saddam Hussein à Bagdad, les révolutions
colorées en Géorgie puis en Ukraine pour faire pièce à une Russie renaissante
grâce à Vladimir Poutine, ou bien encore la politique d’isolement de Téhéran au
prétexte d’une possible bombe iranienne.

Fiction
occidentale, le “Printemps arabe” ne fut qu’un sombre festival qataro-saoudien.
Le Qatar et ses amis “Frères musulmans” purent s’offrir les régimes Ben Ali en
Tunisie, Moubarak en Égypte, Kadhafi en Libye, la terreur et le chaos en Syrie.
Quant à l’Arabie Saoudite, elle emporta le deuxième acte au Caire en éliminant,
grâce aux généraux égyptiens, Morsi et ses Frères musulmans mais elle disputa
au Qatar l’influence sur les groupes terroristes en Syrie.

Toute cette
œuvre funeste d’égorgements, de décapitations, de viols des jeunes chrétiennes
ou chiites vierges, d’exécutions sommaires, de prisonniers enterrés vivants, de
vidéos macabres postées sur Youtube et téléchargées des dizaines de milliers de
fois dans nos banlieues, tout cela nous le devons “à nos magnifiques alliés”,
nos nouveaux amis du Moyen-Orient, gorgés de pétro-dollars, le Qatar et
l’Arabie Saoudite.

Le bilan de Sarkozy et Hollande au Moyen-Orient :
chaos islamiste et crimes contre l’Humanité

La dernière
fois que nos gouvernants eurent un peu de bon sens au Moyen-Orient ce fut en
2003 quand Chirac refusa de s’associer à la guerre américaine en Irak. Certes
notre politique était alors à la remorque de l’Histoire ; certes elle
s’accrochait à des régimes finissants, mais c’était une politique “du moindre
mal” et ce n’était déjà pas mal. Du moins nos ambassadeurs arabisants de
l’époque, avant que Sarkozy et Hollande ne remplacent ceux-ci par des
humanitaires naïfs quand ils n’étaient pas des hommes d’affaires cyniques, du
moins ces vrais ambassadeurs (comme celui qui m’avait accueilli en février 2003
à Bagdad pour rendre à Tarik Aziz sans doute l’une de ses dernières visites)
connaissaient-ils cet Orient compliqué et anticipaient-ils les horribles
carnages communautaires qui devaient inéluctablement se produire en lieu et
place des vieux régimes “laïcs”.

Nous avons
le résultat de cette folie sous nos yeux et ce bilan n’est pas seulement le
bilan de Washington. Non ce n’est pas seulement la faute de Washington car
Sarkozy et Hollande (et avec eux Juppé et Fabius) portent une très lourde
responsabilité dans les génocides communautaires (les chrétiens, les Alaouites,
les chiites duodécimains, les Yazidis…) en œuvre aujourd’hui en Syrie et en
Irak comme ils sont directement responsables des massacres tribaux en Libye.

Défendre militairement les Chrétiens d’Irak

À mes yeux
Sarkozy et Hollande se sont rendus complices, par ces choix, de crimes contre
l’Humanité. C’est à tout le moins ce qui devrait les disqualifier à jamais aux
yeux des Français.

Sarkozy plus
qu’Hollande d’ailleurs puisque c’est l’UMP qui, finalement, aura le plus
brutalement rompu avec les fondamentaux gaulliens de la politique étrangère
française pour nous aligner sur les politiques américaine, qatarie et
saoudienne. Mais Hollande vaut-il mieux lui qui, en 2012, voulait envoyer notre
armée attaquer l’État syrien, en tentant de nous refaire le coup américain des
armes de destruction massive? Lui qui ne propose aujourd’hui comme seule aide
aux Chrétiens d’Orient, face à la poussée de l’État islamique en Syrie et Irak,
que l’envoi de colis alimentaires?

Nous devons
aider les Chrétiens à rester chez eux, à défendre leurs villages, leurs
églises, car ils étaient les premiers sur la Terre d’Orient. Je soutiens
donc sans réserve les frappes militaires américaines contre l’État islamique et
j’affirme que c’est l’intérêt et l’honneur de la France que de se joindre à ces
frappes.
Moi qui suis le premier à m’opposer à la folle politique des

États-Unis en Ukraine, je sais aussi refuser le systématisme et dire que les
Américains ont fait le bon choix en aidant le gouvernement irakien.

Mais la
logique impose d’aller plus loin, d’avoir le courage d’accepter l’erreur
occidentale en Syrie ce qui signifie s’allier à nouveau avec Bachar al Assad et
l’aider à détruire les foyers islamistes qui gangrènent son pays.

Nous avons
mené une guerre pour rien en Afghanistan dans laquelle de nombreux soldats sont
morts pour la France et des milliers d’autres y ont perdu un membre, un œil,
une aptitude physique ou mentale. Nos Rafales ont pilonné l’Armée régulière
libyenne et nos hélicoptères lui ont infligé de lourdes pertes. Nos services
spéciaux ont vendu, avec l’argent du Qatar des armes aux islamistes syriens
dans le seul but de miner l’État syrien dans ses fondations. Devrions-nous
alors nous contenter d’envoyer quelques colis pour les Chrétiens d’Irak ?

Certes le
principe de non ingérence est un principe essentiel auquel je tiens
beaucoup. Mais je crois aussi au principe de solidarité civilisationnelle. La
France reste à mes yeux la Fille aînée de l’Eglise, celle qui a secouru les
Chrétiens du Liban en 1860, et ces chrétiens sont mes frères. C’est ce principe
d’ailleurs qui me rend critique à l’égard du traitement injuste de De Gaulle à
l’encontre des Harkis lesquels s’étaient battus pour la France. Je défends la reapolitik
mais jamais contre l’honneur de la France. La France est une personne, elle a
un honneur, pas seulement des intérêts. C’est donc ce principe de solidarité
civilisationnelle qui peut justifier exceptionnellement l’ingérence.

Il faut
choisir, soit nous accueillons ces pauvres gens au motif de la préférence
chrétienne qui devrait être une évidence en matière d’asile, soit nous aidons
activement (solution que Louis Aliot a préconisé le premier et qui a été
malhonnêtement déformée par les médias en une forme d’indifférence à l’égard
des chrétiens) les Chrétiens d’Orient à rester sur une terre où leurs prières
en araméen s’entendaient à l’époque du Christ, six siècles avant l’apparition
de l’islam.

Telle est
donc ma position, que j’assume et que j’affirme, à savoir que la France devrait
s’associer aux frappes militaires américaines pour soutenir l’armée régulière
chiite et les Pershmergas kurdes dans leur combat contre l’État islamique.

Casser la dynamique califale et éliminer les
djihadistes citoyens français

Il y a un
enjeu essentiel dans la destruction de ce califat. C’est qu’il a muté du statut
de califat régional au statut de califat mondial. Son calife s’est proclamé
calife mondial et il a obtenu le ralliement de plusieurs imams radicaux
influents dans le monde islamique sunnite, dont un en Indonésie le plus grand
pays musulman du monde. Le risque de propagation est évident et les Américains
l’ont compris. Il faut impérativement écraser sous un déluge de feu ces fous
qui mutilent les femmes, les vendent comme esclaves sur les marchés de Mossoul,
assouvissent sur elles leurs instincts criminels et inondent le monde de leurs
vidéos macabres. Vladimir Poutine a eu des mots aussi brutaux que de bon sens
vis-à-vis de ces islamistes que les Russes ont combattu en Tchétchénie (tandis
que les Américains les aidaient) ou qui ont massacré des dizaines d’enfants à
Beslan. “Il faut butter les terroristes jusque dans les chiottes”. Ce n’est pas
très politiquement correct mais c’est le meilleur programme face à l’islamisme.

Et ce
programme ne doit pas s’arrêter là. Nous savons que près de 1000 djihadistes
disposant de la nationalité française sont partis combattre en Syrie et en Irak
et que beaucoup ont rallié le califat islamique. Nous ne devons pas les
considérer comme des égarés mais comme des ennemis qui reviendront bientôt en
France, forts de leur expérience militaire, l’esprit affranchi de toute limite
après les exactions commises (viols, tortures, décapitations). Nous devons les
éliminer in situ et ce devrait être le rôle de nos services spéciaux de
s’en occuper dès maintenant. Nous ne pouvons prendre le risque d’attendre
qu’ils reviennent. Arrêtés et emprisonnés en France ils seront de puissants
moteurs de conversion à l’islam dans les prisons et donc un facteur
supplémentaire de propagation du fondamentalisme islamique dans notre pays. Il
revient la responsabilité à chaque nation européenne (France, Royaume Uni…)
d’éliminer ses ressortissants djihadistes avant qu’ils ne reviennent.

Affronter la corruption de la politique et de
l’économie française par le Qatar et l’Arabie Saoudite

L’origine de
cette catastrophe, on ne le répètera jamais assez, c’est tout simplement qu’à
partir de la présidence Sarkozy la France a complètement mis sa politique arabe
dans les mains du Qatar et de l’Arabie Saoudite et que sa diplomatie est
devenue, de fait, la principale sous-traitante de ces deux puissances
islamistes.

La Libye a
été, par excellence, la guerre de sous-traitance des intérêts qataris. Le
calcul occidentaliste (États-Unis et forces européennes alignées) fut le
suivant : ajouter au Qatar (2e réserve gazière du monde après la
Russie) le formidable potentiel gazier de la Libye et briser ainsi (en plus du
gaz de schiste américain) la dépendance de l’Union européenne au gaz russe.
Voilà bien une étrange vision stratégique qui consiste, sur le long-terme, à
préférer dépendre d’un gaz “fondamentaliste” plutôt que du gaz russe!

Depuis
l’assassinat de Kadhafi (20 octobre 2011) cautionné par l’Occident
pro-américain après la violation des promesses faites à la Russie (s’en tenir à
la zone d’exclusion aérienne et ne pas aller jusqu’à la destruction du régime),
le résultat de l’opération libyenne ne s’est pas trop fait attendre: début 2013
la France devait intervenir militairement au Mali pour freiner la progression
fulgurante des amis du Qatar et de l’Arabie Saoudite, et au mois de juillet de
cette année, l’ONU, Washington et la quasi-totalité des pays occidentaux
décidaient de fermer leur représentation et d’évacuer leurs personnels.

On ne dira
jamais assez combien ce chaos libyen tient d’abord de la responsabilité de
Sarkozy et au moins autant de Juppé présenté pourtant comme un vieux “sage”.
Dès 2011, je prédisais que le pillage des dépôts d’armes en Libye par les
tribus et les milices islamistes conduirait à une situation chaotique
comparable à celle de l’Irak en 2003, lorsque les Américains choisirent de
détruire l’armature sunnite de l’État irakien qui allait constituer l’embryon
de ce qui est aujourd’hui devenu… l’État islamique.

Comme si
cela ne suffisait à leur incompétence et leur arrogance, Sarkozy et Juppé ont
ajouté l’erreur syrienne à l’erreur libyenne, une fois encore inspirés
(commandés?) par le Qatar et l’Arabie Saoudite. Hollande (qui aurait voulu sa
guerre aussi, comme Sarkozy) n’eut alors qu’à s’enfoncer plus avant dans
l’erreur de ses prédécesseurs. La France fut en pointe dans la volonté
d’emmener l’Occident en guerre contre Bachar el Assad jusqu’à se ridiculiser
lorsque les États-Unis, plus pragmatiques, finirent par trouver un accord avec
les Russes.

La poignée
de main avec le Diable se paie toujours très cher. Cette soumission de nos
choix diplomatique à Doha et Riyad est davantage qu’une faute extérieure, c’est
un crime intérieur. Mais ce crime a une explication : de nombreuses
personnalités clés de l’UMP et du PS ont été achetées par l’argent du Golfe ce
qui explique que Sarkozy ait défiscalisé les investissements qataris et laissé
le Qatar entrer au capital de plusieurs grands groupes stratégiques français.
C’est aussi ce qui explique que le Qatar ait proposé à l’ancien Président
français de diriger un fonds d’investissement qatari. Hollande lui-même n’a
rien fait pour arrêter la politique de pénétration du Qatar ; il a simplement
essayé de déplacer le curseur davantage vers l’Arabie Saoudite. Il faut dire
que l’Arabie Saoudite pèse au bilan de nombre de grands groupes français
(armement, construction, luxe…) et va investir 15 milliards d’euros dans le
Grand Paris. Je ne ferai pas ici le catalogue à rallonge de la pénétration de
l’argent saoudien et qatari dans nos industries, nos banques, nos banlieues…
Voyez un Dominique de Villepin prendre aujourd’hui des accents gaulliens dans
sa critique d’Israël mais qui fut un partisan acharné de l’intervention contre
Kadhafi probablement parce qu’il est un avocat attitré du Qatar. N’était-ce pas
lui qui, à défaut de devenir le candidat de l’UMP pour la présidentielle, tenta
de devenir le porte-drapeau des jeunes musulmans de banlieues?

Pendant que
nos médias font leur couverture sur les prétendus “agents russes” en France
(comme si l’on avait besoin d’être payé pour défendre la bonne entente avec la
Russie et pour prôner le monde multipolaire!), ils ferment les yeux sur les
millions d’euros qui abreuvent les politiques de l’UMP et du PS ou les
instituts de relations internationales, presque tous devenus pro-Golfe donc
anti-Iran, anti-Syrie et anti-Russie, mais favorables à l’intégration de la
Turquie. Dans ce contexte on comprend mieux aussi la “pensée unique”
anti-Israël qui s’installe dans ces milieux subventionnés. Israël ayant perdu
la guerre de l’image (et comment la gagner face à des images d’enfants
palestiniens déchiquetés?), on ne prend plus beaucoup de risque aujourd’hui à
taper sur Israël sur les plateaux de télévision.

Pour le
système UMPS et ses “experts” subventionnés, la double alliance avec les
musulmans de France et l’argent du Golfe est une aubaine : c’est le double
jackpot puisqu’ils empochent l’argent du Golfe en même temps qu’ils commencent
à récolter le vote musulman.

Par conséquent ne pas se tromper d’ennemi!

Je m’adresse
à ceux qui sont capables de regarder la réalité en face et donc de surmonter
leurs réflexes et héritages idéologiques. L’un des grands défis de la politique
tient en effet à la capacité de s’adapter à des circonstances qui changent afin
de rester soi-même. Pendant la Guerre froide, j’étais anti-communiste donc
anti-soviétique et favorable à l’alliance avec les États-Unis. Aujourd’hui je
défends l’indépendance de la France et de l’Europe face aux États-Unis et par
conséquent je regarde la Russie comme nécessaire partenaire stratégique,
d’autant qu’elle défend les fondamentaux de la civilisation chrétienne. Les
Rois de France ont fait des retournements d’alliance (vers l’Autriche sous
Louis XV) que les opinions publiques ne comprirent pas tant l’habitude de haïr
un ennemi séculaire était ancrée dans la conscience populaire.

Mes
positions politiques ne sont pas et ne seront jamais déterminées par mes
amitiés personnelles et je sais même qu’aujourd’hui certains de mes amis
pro-palestiniens auront du mal à les comprendre. Je connais tous les pays
arabes, j’ai même été longtemps consultant pour un Royaume arabe, et je n’ai
jamais été en Israël. J’ai une histoire personnelle avec le monde arabe et les
positions que je prends me coûtent sur le plan affectif mais c’est le devoir de
celui qui aspire à gouverner derrière Marine Le Pen de ne penser qu’à l’intérêt
supérieur du pays. Car un vrai patriote français doit être capable de
hiérarchiser les dangers qui menacent la France, de refuser l’idéologie et les
constructions intellectuelles simplistes lui désignant un ennemi mondialiste
imaginaire contre lequel il faudrait mener une révolution mondiale. Israël
n’est pas l’ennemi de la France. La France n’a aujourd’hui qu’un véritable
ennemi : le fondamentalisme islamique sunnite. Certes Israël est aujourd’hui
encore très lié aux États-Unis mais ceux-ci commencent à s’en détourner et
Israël adopte une posture multipolaire en construisant des relations fortes
avec la Russie, l’Inde, la Chine. A moins donc qu’il ne soit gouverné par un
antisémitisme obsessionnel, un patriote français ne peut chercher à former, contre
Israël, et avec l’extrême gauche pro-palestinienne, la racaille de banlieue et
les islamistes une alliance à la fois contre-nature et sans issue politique.

Certains
m’objecteront qu’Israël a tout fait pour créer cette situation qui a conduit au
remplacement du nationalisme palestinien originel par le Hamas, tout ceci afin
de renforcer la cohésion des Occidentaux autour de l’État juif. C’est possible
(on se souvient que Cheikh Yacine fut en effet ramené en Palestine par les
Israéliens pour faire contrepoids à Arafat), mais si c’est le cas, cette
stratégie a réussi et, de fait, les Européens de l’Ouest se trouvent dans le
même bain que les Israéliens. Par conséquent, je ne vais pas attendre que mon
pays soit repeuplé par une majorité de musulmans radicalisés pour déclencher le
grand soir contre un capitalisme dit apatride! Je n’ai qu’une priorité,
impérieuse, c’est le peuple français, et mon combat politique ne s’articule pas
autour de la lutte contre le sionisme!

Regarder en face le problème islamique en France

Ne nous
laissons pas gouverner par des obsessions idéologiques. Regardons la réalité.
L’histoire est largement le produit des dynamiques démographiques. Mon
engagement politique est d’abord fondé sur la volonté de maintenir la France
dans sa civilisation, la civilisation française elle-même composante de la
civilisation européenne. Je défends la nation française, sa civilisation qui a
1500 ans comme je défends la civilisation européenne. La France a évidemment
besoin de profondes réformes économiques, et d’une réforme morale sans doute,
mais elle est, avant tout, menacée par le remplacement de sa population
historique par une population en majorité africaine et musulmane. Il s’agit là
d’une évidence qu’aucun déni de réalité ne saurait masquer. Les Français de
souche sont peu à peu remplacés et comme l’assimilation ne fonctionne que pour
une partie seulement de cette nouvelle population extra-européenne (celle qui a
eu la volonté de s’assimiler), la France s’expose mécaniquement à la
perspective de ne plus être, d’ici une ou deux décennies, ce qu’elle a été
depuis son origine c’est-à-dire une nation de souche européenne et de culture
chrétienne. Ce phénomène n’est pas propre à la France. D’autres pays d’Europe
occidentale le connaissent et les États-Unis aussi qui voient leur population
WASP (White Anglo-Saxon Protestants) en voie de minorisation.

Or je suis
certain qu’il existe une majorité des Français qui ne veulent pas voir la
France perdre sa civilisation et je suis certain aussi qu’une majorité politique
peut se construire avant 2017 autour de cette idée que Marine Le Pen incarne
mieux que quiconque. Il n’y aucune autre solution crédible que de construire
cette majorité avec ceux qui ont déjà compris le lien entre le défi islamique
intérieur et le défi islamique extérieur.

De ce point
de vue, le sort des minorités chrétiennes d’Orient, projection dans l’avenir de
ce que pourraient vivre les Français dans une France majoritairement islamisée,
comme le sort des Juifs de France de plus en plus victimes de brimades quand il
ne s’agit pas de violence, devraient aider les Français à comprendre que
l’unité de la France ne va plus de soi et que de grands périls pèsent sur elle.

Le nouvel
antisémitisme vient d’une partie de la communauté musulmane qui associe les
Juifs à la politique d’Israël. Les manifestations pro-palestiniennes récentes
ont apporté la preuve évidente, d’une part que la cause palestinienne est
devenue une cause islamiste, d’autre part que l’antisionisme ne cherche même
plus à s’y distinguer de l’antisémitisme (on a même vu dans ces manifestations
des pancartes se référant à Mohammed Merah, tueur d’enfants juifs). Bien
évidemment, tout Français lucide n’est pas dupe quant au jeu symétrique du
communautarisme juif, lequel a ses propres raisons de se victimiser pour
soutenir la logique d’émigration vers Israël. Mais l’exagération ou
l’instrumentalisation n’enlèvent rien à cette réalité implacable que les
enseignants de l’Education nationale relèvent depuis des années maintenant dans
les copies de beaucoup d’élèves issus de l’immigration. Un pan entier et
important de la population de nationalité française d’origine arabo-maghrébine
et musulmane n’est plus seulement antisioniste, il est antisémite
.

Certains ont
reproché à Marine Le Pen d’avoir défendu la Ligue de Défense Juive. Ils n’ont
pas compris sa position. D’abord Marine Le Pen a toujours été du côté des
libertés, cela a été vrai à l’époque de la polémique sur Dieudonné ; c’est vrai
aujourd’hui à propos de la LDJ. Elle ne cautionne ni Dieudonné ni la LDJ, mais
se méfie simplement de ces velléités d’interdictions qui peuvent ouvrir la voie
à n’importe quelle autre interdiction sous n’importe quel autre prétexte.
Lorsqu’un militant de la LDJ a poignardé un commissaire de police, l’affaire a
été étouffée par la gauche et personne n’a demandé à interdire la LDJ. Tout à
coup, parce que la LDJ fait le coup de poing contre les militants
pro-palestiniens (dont de nombreux casseurs), il faudrait l’interdire? La
vérité c’est que la LDJ n’est que le reflet d’une posture d’auto-défense d’une
communauté qui se sent de moins en moins en sécurité en France, comme
d’ailleurs des millions de Français eux-mêmes agressés par la racaille. Voilà
la question qu’il convient de se poser! Marine Le Pen a parlé, une fois de plus,
en faveur de la liberté et de la sécurité, deux thèmes centraux de son
programme politique.

A moins d’un
changement politique de grande ampleur, les Français juifs peuvent donc se
faire du souci sur leur avenir en France car ni l’UMP ni le PS ne constitueront
pour eux un rempart. En plus d’être achetés par le Qatar et l’Arabie Saoudite,
nos gouvernants de l’UMP et du PS ont fait le choix cynique du poids
démographique de la clientèle électorale musulmane. C’est ce qui explique avec
quelle facilité le communautarisme musulman tire ce qu’il veut (construction de
mosquées cathédrales, entorses multiples à la laïcité…) des municipalités UMP
et PS. C’est aussi ce qui explique la propagation d’une pensée unique
“pro-palestienne” dans les médias dominants. Chez ce personnel politique lâche
de l’UMPS qui a toujours obéi à celui qui parlait le plus fort, on pensait
avant que “les Juifs étaient puissants” donc on fermait les yeux sur le sort
des enfants palestiniens mais aujourd’hui premièrement on sent l’isolement
croissant d’Israël, deuxièmement on “palpe” l’argent du Golfe et troisièmement
on mesure l’importance de la clientèle musulmane en France, donc on peut se

dire sans grand risque pro-palestinien. Mais moi je ne serai pas de ceux qui
cèdent aux ficelles émotionnelles de la guerre de l’information employées hier
contre l’Irak ou la Serbie pour justifier les bombardements sur Bagdad et
Belgrade, et mobilisées aujourd’hui contre la Russie à propos de l’Ukraine
autant que contre Israël à propos des Palestiniens. Un Français doit raison
garder et il doit savoir analyser les causes et les ressorts d’une guerre en se
détachant des images horribles qu’il voit. C’est parce que l’on aspire à
gouverner de manière responsable et courageuse à la fois que l’on doit savoir
s’affranchir du double piège de l’immédiateté et de l’émotion.

Notre pays a
accueilli des millions de musulmans. Une partie restera, une autre devra
partir. Cette grande séparation entre ceux qui ont vocation à rester et ceux
qui devront quitter notre terre va se nouer autour des enjeux internationaux.
C’est la raison pour laquelle, plus que jamais, un programme politique de
redressement national nous doit des choix internationaux clairs et
cohérents.

Ceux des
musulmans sunnites qui s’assimileront choisiront d’intégrer l’héritage d’une
France chrétienne, laïque et d’accepter que leurs compatriotes Juifs puissent
aimer Israël comme eux-mêmes aiment la terre de leurs ancêtres, le Maroc,
l’Algérie, la Tunisie. Les autres (ils sont nombreux) qui font le choix de
l’Oumma plutôt que de la France, qui voilent leur femme et leurs filles, qui
adoptent la barbe salafiste, ceux-là n’ont vocation ni à être ni à rester
français. Le refus énergique de l’islamisation (en refusant la construction de
mosquées et l’intégration des règles islamiques dans nos coutumes) autant que
la réforme profonde des conditions d’accès à l’État-Providence seront les deux
choix politiques forts qui créeront les conditions du retour de ceux qui n’ont
pas voulu choisir d’aimer la France.

A titre
personnel, je ne crois pas à l’immigration zéro. Ni pratiquement, ni
moralement. Pratiquement, parce que le rayonnement de la France passe aussi par
la possibilité, pour des étudiants sérieux venus du monde entier de pouvoir
apprendre le Français et étudier en France. Moralement, parce que je ne vois
pas au nom de quoi nous serions condamnés à accepter ceux qui nous empoisonnent
la vie et refuser ceux qui peuvent apporter à la France. Je crois au contraire
à l’inversion des “mauvais” flux migratoires. Et je crois que la solution passe
par l’établissement du droit du sang, l’abolition du regroupement familial, la
réduction drastique de l’asile (avec une préférence civilisationnelle comme
avec les chrétiens d’Irak ou les Coptes d’Égypte…) et une politique migratoire
de choix (choisir ceux qui apportent à la France).

Une politique étrangère cohérente avec nos priorités
intérieures

Face au défi
identitaire français, les choix de politique étrangère s’avèreront donc
déterminants. L’alliance avec la Russie, seule grande puissance européenne à
assumer ouvertement et fermement sa civilisation chrétienne, devrait aller de
soi pour tout patriote. Comme devrait l’être aussi l’entente avec le chiisme et
l’ensemble des minorités du Moyen-Orient face au réveil du volcan sunnite qui
essaie obsessionnellement de reconstituer l’Oumma dans un grand califat mondial
appelé à s’étendre au détriment des autres civilisations. Je suis convaincu
d’ailleurs que les États-Unis et Israël finiront par s’entendre avec l’Iran (y
compris l’Iran puissance nucléaire comme l’est le Pakistan sunnite) comme avec
l’Irak à dominante chiite. Il faut bien sûr aussi coopérer avec les monarchies
sunnites modérées du monde arabe, celles qui ne financent par le djihad, comme
le Maroc, les Émirats arabes unis, ou le Koweït. La guerre n’est pas contre
l’islam sunnite, elle est contre l’extrémisme sunnite qui ronge une partie
conséquente de l’islam sunnite et la nuance est essentielle car cette guerre
doit être menée aux côtés de tous les musulmans sunnites modérés.

Vis-à-vis
d’Israël, la France ne doit pas céder au piège émotionnel, mais conserver une
politique équilibrée. Quand on défend un monde fondé sur la souveraineté, on
défend aussi la souveraineté d’Israël et son droit à la sécurité. Il est
néanmoins évident que la sécurité d’Israël ne peut découler que d’une solution
juste pour les Palestiniens ce qui imposera à Israël (comme le préconisait
Sharon à la fin de sa vie) de faire des concessions territoriales douloureuses
en Cisjordanie, et donc de démanteler des colonies.

L’émotion
face au drame des Palestiniens est en train de gagner certains d’entre nous qui
perdent le sens de la mesure et oublient les causes profondes du conflit. Un
argument que l’on entend sans cesse est que tout cela est injuste parce que les
Israéliens n’ont que 50 morts (militaires) tandis que les Palestiniens en
déplorent 2000 (essentiellement civils). À cela je réponds par le principe de
responsabilité politique. Si l’on me confiait le Ministère de la Défense
français et que mon pays était agressé par des roquettes alors oui je ferai le
maximum pour avoir zéro mort du côté français et pour infliger des pertes
maximales à mon ennemi. Mais alors se pose la question : pourquoi les pertes
palestiniennes sont-elles essentiellement civiles ? Réponse : les combattants
du Hamas sortent des tunnels qu’ils ont creusés pour tirer des roquettes sur
Israël à partir des immeubles où vivent leurs familles puis ils retournent
s’abriter dans les tunnels. L’aviation et l’artillerie israéliennes répliquent
donc sur les points d’origine des tirs de roquette, c’est-à-dire les immeubles
d’habitation où se trouvent des civils que les combattants du Hamas ont choisi
de ne pas protéger. Il est donc clair que le Hamas choisit sciemment de
sacrifier les civils palestiniens et cela parce qu’il mène une guerre mondiale
de l’information fondée sur l’image et l’émotion.

Chez un
politique digne de ce nom, l’intelligence doit pourtant prendre le pas sur
l’émotion, comme l’analyse doit précéder la communication et non l’inverse. Oui
les images d’enfants palestiniens démembrés m’écœurent. Seulement depuis 2011
nous a-t-on montré les images d’enfants chrétiens ou alaouites syriens
massacrés par les djihadistes rebelles armés par Paris, Londres et Washington ?
Nous a-t-on montré les images de civils libyens carbonisés dans leurs immeubles
par des frappes de l’OTAN ? Nous a-t-on montré les images de civils de Donetz
pulvérisés par des tirs d’artillerie ukrainiens ?

La guerre
est implacable. Les Palestiniens de Gaza ont choisi de donner le pouvoir à un
mouvement, le Hamas, dont l’objectif n’est pas de construire une réelle
souveraineté palestinienne à côté d’Israël, mais de détruire Israël. À partir
du moment où un peuple amène au pouvoir un mouvement qui n’a d’autre objectif
que de harceler son voisin militairement surpuissant, il ne peut s’attendre à
autre chose que le malheur. C’est terriblement injuste pour les civils qui
périssent mais les mauvais choix se paient au prix fort et nous paierons
bientôt aussi les nôtres au prix fort si nous persistons dans notre angélisme
et nos erreurs stratégiques.

La France
est à la croisée des chemins. Elle doit à la fois redevenir un acteur de
l’équilibre multipolaire en s’émancipant des États-Unis, soutenir l’émergence
d’une véritable Europe-puissance indépendante des États-Unis et fondée sur le
respect des nations, et affronter le défi identitaire qui la menace et qui est
directement lié, qu’on le veuille ou non, à l’évolution de la situation au
Moyen-Orient. Cela implique d’avoir du courage non seulement sur la question
américaine mais aussi sur la question de l’extrémisme sunnite qui progresse
chez nous comme il gagne les pays arabes les uns après les autres. Ce courage
n’est pas à attendre d’une classe politique en grande partie anesthésiée par
l’argent du Qatar et de l’Arabie Saoudite. Seul un grand changement politique
rendra aux Français leur identité, leur souveraineté, leur influence sur la
scène mondiale, et leur honneur. Comptez sur moi pour participer à ce grand
changement politique car je me battrai de toutes mes forces pour que mes
enfants et petits-enfants vivent dans une France habitée par sa civilisation
multiséculaire.

Aymeric Chauprade

Crédit photo
: marui via Flickr (cc)

À propos de l'auteur



Aymeric Chauprade

Professeur
de géopolitique et Directeur de la Revue Française de géopolitique et du site
www.realpolitik.tv est l’auteur de l’ouvrage de référence « Géopolitique,
constantes et changements dans l’histoire » éd. Ellipses.

(merci à Dirk)

 

 

Commentaires

  • Article beaucoup trop long pour être convainquant. Sans doute Chauprade n’a pas eu le temps de faire plus court ! Les bases de son analyse sont excellentes, ainsi que certaines de ses conclusions. Mais en ce qui concerne le rôle de l’Israël, ses arguments sont plus faibles et plutôt superficiels et ressemblent à des pétitions de principes. En tout cas, les positions des israéliens et d'une majorité de français juifs (surtout sépharades) ne confirment pas son analyse ; à moins d’imaginer des calculs très subtils à double ou triple détente. On reste donc dubitatif à ce sujet.

  • Il y a beaucoup de points intéressants dans ce manifeste de Chauprade, qui méritent d'être connus, notamment sur la lutte contre l'islamisation de la France et pour la remigration. Son dernier paragraphe est convaincant.
    Mais on ne peut le suivre sur sa défense d'Israël ! Pour qui persiste à rouler Chauprade ? Croit-il qu'Israël est un allié contre l'islamisme ? Il y a une faille dans sa géopolitique !
    Comme il y en a une chez d'autres responsables FN qui veulent banaliser l'islam et conquérir un nouvel électorat (de remplacement ?)
    A moins que ces différentes approches ne fassent partie d'une stratégie qui m'échappe !

    Comme il est difficile de mettre en pratique cette devise :
    "NI BABOUCHES ! NI KIPPAS !" Et pourtant, c'est une condition
    incontournable pour quiconque parle de souveraineté et d'identité !

  • Chauprade est tres intelligent, on le suit jusqu'a un certain point..
    Quand il arrive au sujet des Palestiniens, je ne le suis plus.. Israel n'a aucun droit en Palestine, aucun droit de construire sur une terre qui ne lui appartient pas, en bravant la communaute internationale, meme l'Amerique qui le soutient a coups de milliards de dollars annuels...
    S'il reproche a Hamas les tunnels, sait-il que ces pauvres gens de Gaza sont prisonniers?
    Je me demande s'il ne va pas faire de tort au FN, en voulant se rapprocher des semites.. Car nous ne voulons ni des uns, ni des autres.

  • Je me méfie d'A.Chauprade et je ne suis pas d'accord du tout pour la Palestine et la Bande de Gaza. Il est opportuniste?
    Je le crois déjà séduit par le Mondialisme qui est sioniste...

  • Chauprade est maintenant décrédibilisé avec ses positions concernant Israel et Gaza. Le reste semble etre là pour "décorer" et noyer le poisson.
    Irrattrappable.

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