Lilian Thuram est venu au Mémorial du camp des Milles, présenter l'exposition produite par sa fondation : "Zoos humains, l'invention du sauvage"
Entre le XIXe siècle et la Seconde guerre mondiale, l'exhibition des populations des colonies a fasciné l'Europe. Le mouvement est en fait né dès les premières conquêtes espagnoles et portugaises en Amérique du sud et en Afrique. L'indien, puis le noir, avaient-ils une âme éternelle, était-ce un autre nous qui se cachait derri
ère le pagne ou une différence certes cousine mais radicale ? Ces questions ont agité les puissances coloniales et forgé, au fil des ans, la représentation de l'autre et, comme un portrait en creux, de nous-mêmes. Et traversent encore, modernisées, policées, en filigrane, les discours fondateurs des racismes modernes.
En 2012, la Fondation Lilian Thuram éducation contre le racisme a créé au musée parisien du quai Branly l'exposition Zoos humains, l'invention du sauvage qui retrace cette histoire. Le Mémorial du camp des Milles en accueille une version simplifiée que l'ancien défenseur des Bleus est venu présenter hier, d'abord à des lycéens aixois et des jeunes suivis par la Protection judiciaire de la jeunesse, puis au grand public.
Au-delà du travail de mémoire, quel est le message pour aujourd'hui ?
L.T. : La chose importante, c'est comprendre le pourquoi du racisme. On ne naît pas raciste, on le devient, parce que notre culture, nos traditions s'appuient sur des hiérarchies selon la couleur de peau des gens, le distinguo hommes-femmes... L'idée est d'inviter les gens à construire une société plus juste, mais pour comprendre que la société est injuste et pourquoi elle est injuste, il faut donner aux gens des éléments de réflexion, aider les enfants, notamment, à comprendre ces mécanismes et leur expliquer que nous sommes dans une continuité historique qu'il s'agit d'améliorer.
Donc, Zoos humains, c'est montrer comment, en exposant ces personnes qui venaient d'Afrique, d'Asie, d'Océanie, des Amériques, on a aussi construit leur infériorité. Et dans le même temps, on construisait le blanc et sa supériorité supposée. C'est ça qui est intéressant avec l'exposition : voir comment l'histoire nous a amenés à nous voir à travers nos couleurs de peau.
Pensez-vous que la France a toujours du mal à affronter son passé colonial ?
L.T. : Première chose, ça dépend pour qui. Regardez aujourd'hui, il y a cette exposition, avec des gens qui viennent, qui regardent. Eux n'ont aucun problème, ils veulent savoir. En fait, je crois beaucoup en la bonne volonté des gens, je crois que la grande majorité est ouverte à la connaissance et à la compréhension.
Après, je trouve qu'effectivement, pour construire la société de demain, il n'est pas extrêmement intelligent de se passer d'une réflexion sur l'esclavage, sur la colonisation. Parce que si vous voulez construire une société apaisée, il faut apprendre à connaître l'histoire qui nous lie. Si vous ne faites pas ce travail-là, les incompréhensions continueront.
Y a-t-il une spécificité à montrer "Zoos humains" dans un lieu comme le camp des Milles ?
L.T. : Oui et non. L'exposition parle d'elle-même, indépendamment du lieu. Mais c'est sûr, raconter cette histoire dans un lieu de déshumanisation d'hommes et de femmes est encore plus fort. C'est la première fois que je viens ici et c'est vrai que ça vous prend, les murs parlent, les couloirs parlent, la température parle. Et rien ne dit que dans l'avenir, ça ne sera plus possible, à partir du moment où, tout au long de l'histoire, on retrouve cette construction de l'autre comme n'étant pas humain. Le racisme c'est avant tout cela : persuader les gens qu'ils font partie d'un groupe et que leur groupe est différent, qu'il est mieux et que vous pouvez mépriser l'autre en paroles, dans les actes et, en dernière extrémité, que vous pouvez exterminer l'autre. C'est toujours la même logique : d'abord renforcer les préjugés, laisser faire une minorité et petit à petit, la majorité accepte. C'est pourquoi il faut dire aux enfants 'Faites bien attention, laisser faire, c'est être complice'. Je pense en revanche qu'il faut amener les générations futures à ne pas être dans la culpabilité. Mais pour cela, il faut discuter, dissiper les malentendus. Et dans ce contexte, le rôle de l'Éducation nationale est primordial car la première des choses que doit enseigner l'école, c'est apprendre à vivre ensemble.
Les récentes déclarations de Willy Sagnol sur "le" footballeur africain, physique mais dénué d'intelligence de jeu, vous ont-elles choquées ?
L.T. : Ce qu'a dit Willy Sagnol, c'est effectivement renforcer les stéréotypes et les préjugés sur les personnes de couleur noire. L'intelligence serait de couleur blanche et la force de couleur noire. On voit là comment on crée des eux et des nous et c'est extrêmement dangereux de laisser passer ça. Il faut donc le redire : ces préjugés sont d'un autre temps et il faut passer à autre chose.
La Provence
Commentaires
Mais pourquoi veut-il absolument " vivre ensemble " avec les blancs, alors que les africains ont de vastes et riches territoires ?
Aucun journaliste ne prendra le risque de se faire hara-kiri en lui posant cette seule et essentielle question.
Par pitié, lachez-nous !!
Nous n avons plus de place pour la compassion chez nous !
"La colonisation a charrié l or et la boue"
L. Sedar Senghor
la "supériorité supposée du Blanc", il a raison , les Blancs n,ont rien inventé , rien découvert , et sont resté à l,âge des cavernes , d,ailleurs on le constate chaque jour . . .!!
salutations.
Les peuples africains instruits , l'ont été non pas par Eux-mêmes, mais par le travail et la grandeur de l'Eglise, ses missionnaires, religieuses dévouées , avec écoles, dispensaires , constructions.
Sans ces faits, qu'en serait-il aujourd'hui ? Seraient-ils devenus ce qu'ils prétendent être.
"Kofy , c'était mieux du temps des Blancs".
Quand t'as plus le shoix tu rames ;o)