DÉCRYPTAGE - L'étude Pisa, qui compare le niveau des élèves de 15 ans de l'OCDE, est parfois décriée car elle met sur le même niveau des pays économiquement et socialement très différents.
Depuis 2000, date de publication du premier Pisa, l'enquête internationale menée par l'OCDE s'est imposée progressivement comme l'étude de référence pour la comparaison des systèmes éducatifs entre eux et pour mesurer leur évolution. Pour autant, il reste des «Pisa sceptiques». D'abord les tests évaluent des compétences. Ensuite, ils concernent des élèves de 15 ans, ce qui se traduit en France par des scolarités différentes, en classe de 3e, en seconde générale et technologique ou en seconde professionnelle. Enfin, Pisa compare-t-il ce qui est comparable? Notre pays peut-il s'inspirer de Singapour, île de 5,5 millions d'habitants à l'extrême sud de la péninsule malaise? Ou de la Corée du Sud, pays où les enfants, à côté de l'école, sont quasiment tous inscrits dans une deuxième structure pour prendre des cours particuliers à très haute dose? Un pays où le taux de suicide chez les adolescents est le plus élevé de la planète, largement nourri par l'angoisse scolaire. Quant aux régions chinoises citées en exemple pour leurs bons résultats, ce sont des régions côtières en plein développement industriel, financier et économique, peu représentatives du reste de la Chine.
À ces questions, Gabriela Ramos, directrice de Cabinet du Secrétaire général de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), répond «qu'il ne faut pas caricaturer.» Ces pays ou régions ont, selon elle, beaucoup à nous apprendre: «Les enseignants y sont évalués très régulièrement, bénéficient d'une formation initiale très développée. Ces pays ont un niveau d'ambition et d'évaluation très intéressants. Ils sont aussi très exigeants avec les élèves et font aussi réussir les plus faibles.» Singapour, insiste-t-elle, est ainsi «très équitable». Les enfants d'immigrés y ont bien plus de chance de réussir que chez nous. En outre, à Singapour, premier de la classe, les professeurs sont rémunérés autant que des ingénieurs depuis une réforme votée en 1997, ce qui permet au pays de mettre face aux élèves des enseignants de haut niveau, sélectionnés parmi les meilleurs étudiants scientifiques. C'est loin d'être le cas en France, qui ne parvient pas à combler tous ses postes de professeurs en mathématiques jugés trop peu attractifs.
Deux connaisseurs des modèles éducatifs, Jean-Marie De Ketele et Bernard Hugonnier, relevaient l'an dernier des similitudes pédagogiques dans ces pays performants: ils ont le culte de l'apprentissage par la répétition qui «part d'observations et d'imitations», écrivaient-ils dans un article sur «les modèles asiatiques» publié dans la revue internationale d'éducation de Sèvres. Ils mettent l'accent sur la résolution des problèmes. Le travail, très important, fourni par les élèves est reconnu comme une valeur en soi. On peut également constater une «forte pression exercée par les parents quant au travail scolaire qui s'oppose à un certain laxisme occidental, où l'objectif semble désormais de faire d'abord plaisir aux enfants». Enfin, les maîtres et leurs fonctions sont particulièrement respectés.
* Environ 540 000 élèves, représentatifs des quelque 29 millions d'élèves âgés de 15 ans scolaririsés dans les 72 pays et économies participants, ont passé les épreuves Pisa en 2015.
Le Figaro