N'DJAMENA (AFP) — La France a apporté une assistance décisive au président tchadien Idriss Deby Itno et à l'Armée nationale tchadienne (ANT) depuis l'offensive de la rébellion lancée le 28 janvier, conjuguant un soutien logistique à une intense activité de renseignement.
Les six Mirage F1 et les deux appareils de reconnaissance Atlantique 2 prépositionnés sur l'aéroport de N'Djamena ont été les yeux d'Epervier, le dispositif mis en place en 1986 et qui perpétue une présence militaire française au Tchad quasi-permanente depuis l'indépendance en 1960.
Ces appareils ont reçu le renfort d'un Transall du Commandement des opérations spéciales (COS) équipé d'une caméra thermique.
"Nous avons été en l'air pratiquement 24H/24 pendant six jours", a indiqué le lieutenant-colonel Philippe Zivec, commandant du dispositif aérien. Tout ou partie des renseignements recueillis a ensuite été communiqué aux autorités tchadiennes par le canal de l'attaché de défense de l'ambassade de France.
Selon un pilote, ce dispositif a permis de "suivre en direct tous les combats".
Au titre d'un accord de coopération militaire, les forces françaises fournissent également du carburant, dont 200 m3 de kérosène par mois destinés à la petite armée de l'air tchadienne, ainsi que divers matériels et 10.000 rations de combat.
Cette aide permet à l'ANT de maintenir en état de marche ses pick-up (véhicules à plate-forme), quatre redoutables hélicoptères de fabrication soviétique et deux avions stationnés sur l'aéroport de N'Djamena mais surtout des tanks T-55, également de l'époque soviétique, qui lui ont assuré une puissance de feu précieuse dans la bataille de N'Djamena.
L'accord prévoit aussi une assistance médicale. A ce titre, une cinquantaine de soldats de l'ANT blessés dans les combats ont été soignés par des équipes françaises, certains ayant bénéficié d'évacuations sanitaires.
Ce soutien a été d'autant plus décisif que les rebelles, lorsqu'ils ont atteint N'Djamena samedi avant d'être repoussés, se trouvaient à plus de 800 km de leurs bases arrière du Soudan, privés de ravitaillement en munitions, vivres et essence.
Depuis le camp Kosseï, la principale base française au Tchad qui jouxte l'aéroport de N'Djamena, les éléments français, parmi lesquels 200 soldats des forces spéciales, ont effectué de nombreuses sorties sur le terrain pour évacuer les ressortissants étrangers pris au piège des combats.
Cette mission d'évacuation supposait de "tenir" l'aéroport de N'Djamena, seule voie de sortie, a souligné le colonel Paul Perié, commandant du dispositif Epervier. Au cours des combats, les militaires français postés aux abords de l'aéroport ont été "testés à plusieurs reprises" par la rébellion, a-t-il précisé, évoquant une "réponse graduée".
Selon lui, "la position d'un petit groupe de rebelles au nord-est de la piste qui tirait systématiquement sur nos avions au décollage a également été "arrosée". Mais aucun soldat français n'a pris part aux combats, a-t-il souligné.
Avant de quitter N'Djamena, au terme d'une visite surprise de quelques heures mercredi marquée par une rencontre avec le président Deby, le ministre français de la Défense Hervé Morin avait souligné le soutien "sans faille" apporté par la France au "gouvernement légitime du Tchad".
Signe de l'importance des opérations de renseignement menées par la France, le ministre était accompagné du général Benoît Puga, sous-chef Opérations à l'état-major des armées et surtout ancien patron du COS.