Publié le dimanche 22 juillet 2012 à 17H50
Bars et boîtes exploitent à fond le filon du narguilé, qui compte des adeptes de plus en plus jeunes. Un addictologue tire la sonnette d'alarme
Le prix d'une chicha classique est d'environ huit euros. Il existe aussi la chicha royale à environ 15 euros, disposée dans un seau à champagne avec glaçons, ce qui la rend plus rafraîchissante.
Photo Thierry Garro
C'est ma life, la vida loca, oui ma life, des soirées, des chichas". Le rappeur Soprano, l'idole du jeune public marseillais, le crie dans son dernier tube. Le groupe phocéen La Swija avait même baptisé sa tournée hexagonale Smoke Chicha Tour. Plus récemment, Samir Nasri, sortant à peine du tumulte de l'Euro avec les Bleus, fêtait ses 25 ans au Saphir, un bar branché du centre-ville à deux pas de Noailles, proposant des chichas à profusion.
Une cinquantaine de lieux destinés exclusivement à sa consommation à Marseille
Du tabac parfumé à la pomme, à la cerise, aux fruits de la passion, à la noix de coco, et qui se fume par l'intermédiaire d'une pipe à eau. Un ustensile qui fait fureur dans les bars et les boîtes de nuit, et même sur les plages. S'il y a encore une dizaine d'années, fumer la chicha n'était réservé qu'aux initiés, ou aux touristes en mal de sensations fortes, le phénomène s'est répandu, jusqu'à devenir une mode. Marseille compterait pas moins d'une cinquantaine de lieux destinés exclusivement à sa consommation. Le Select, le Saphir, l'Émeraude, le Ghost, le Duplex, le Kantaoui, le Nuage d'Orient, le Claire de Lune, le Tandem, la Suite, ou encore le Soleil du Nil, que le défenseur de l'OM Souleymane Diawara a noté dans son carnet d'adresses.
"La première fois que j'ai fumé la chicha, ce n'était pas à Marseille, mais en Thaïlande, lors d'un voyage avec des amis. J'ai aimé le goût, la sensation, et en rentrant chez moi, je ne me suis plus arrêté, raconte Zino, artiste de 23 ans. Ce n'est pas un plaisir personnel, je préfère la partager, même si parfois je fume seul. Je ne me sens pas spécialement accro au tabac, d'ailleurs, je déteste la cigarette."
Un vrai phénomène de mode
Sa passion soudaine pour la chicha l'a poussé à ouvrir son propre établissement, le Select, il y a six mois, rue Pisançon (1er). Un lieu cosy où se pressent les amateurs de narguilé, fumant au son des derniers hits pop, rap, rai ou RnB. Même les murs y fleurent la pomme, tant ils sont imprégnés de fumée. "Nous avons installé des extracteurs pour ne pas étouffer", précise le co-gérant.
L'essor des chichas a bien failli connaître un sérieux coup d'arrêt en 2008, après la promulgation de la loi anti-tabac, obligeant les bars, restaurants, boîtes de nuit, casinos, et salons à narguilé voulant continuer à accueillir des fumeurs, à créer des espaces fermés (ceux-ci ne doivent pas dépasser les 35 m² ou 20 % de la surface de l'établissement).
Une décision qui avait à l'époque fait bondir l'Union des Professionnels du Narguilé, laquelle avait immédiatement déposé une demande d'annulation auprès du Conseil d'État, invoquant une entrave à la liberté de commerce et d'industrie. Une demande immédiatement rejetée.
Un statut associatif, comme les clubs libertins
Depuis, de l'eau a coulé dans les pipes, et le "problème" a été contourné avec une certaine habileté. Les établissements à chichas sont devenus pour la plupart des associations loi 1901, profitant du fait que le Conseil d'État "ne prive pas les associations ayant un objet en lien avec le tabac du droit de réunir leurs membres". Une technique similaire à celle des clubs échangistes, interdits par la loi mais tolérés sous forme associative. "Le Select est une association, nous n'avons pas de clients, mais des adhérents qui ont des cartes de membres. Nous sommes régulièrement contrôlés, la police ne plaisante pas avec ça", assure Zino.
La "petite" dernière en matière de chichas se nomme Les Terrasses, située à la Pointe-Rouge. Un espace de 200m² sur deux étages avec une vue imprenable sur la mer, comprenant une grande salle de restauration. "Nous avons aussi créé une association, précise Youssouf, 25 ans, responsable de service. Cela permet de trier les personnes sur le volet, d'avoir une clientèle plus élégante et raffinée. Nous avons même un physio devant la porte qui se charge de ça."
Cette pipe à eau légère comme une plume, les plus assidus l'emmènent partout. Tant et si bien qu'à la plage des Catalans, il n'est pas rare d'apercevoir des petits salons improvisés sur les serviettes. "Quelques personnes sont déjà venues se plaindre. Mais on ne sait pas vraiment comment réagir. La dernière fois, j'ai demandé à un fumeur de s'éloigner un peu, ça a failli se transformer en bagarre", explique un surveillant de baignade, qui a souhaité garder l'anonymat. Paradoxal. Car les fadas du narguilé le définissent presque comme le calumet de la paix par excellence.
La Provence
Commentaires
En tout cas n'allez pas vous faire soigner à Marseille... les soins y sont de si mauvaises qualités que ces braves marseillais en souffrent...!
http://www.laprovence.com/article/a-la-une/marseille-operation-coups-de-poing-a-la-clinique-bouchard