Dans le silence du Site-Mémorial des Milles, 70 ans jour pour jour après la libération du camp d’Auschwitz, de jeunes lycéens ont rendez-vous avec l’Histoire. Encore sonnés par l’éprouvante cérémonie donnée plus tôt près du wagon du souvenir, ils visionnent à présent "Auschwitz, voyage au bout de l’enfer" ; leurs visages tirés trahissent leur effroi. Le film est interrompu. Une vieille dame apparaît dans la pénombre, sous un épais chapeau de velours côtelé. Si petite, dans son manteau bleu pâle, et pourtant impressionnante de charisme, Denise Toros Marter promet de tout dire. Mais vite.
"La cérémonie de ce matin m’a beaucoup fatiguée, il faisait si froid !" Le froid, à 87 ans, Denise s’en souvient encore. Ses orteils surtout, lorsqu’à sa libération du camp d’Auschwitz, il a fallu lui en amputer quatre parce qu’ils étaient atteints de gangrène. "Pourquoi vous a-t-on déportées, vous et votre et votre famille ?", demande simplement une élève. "Parce que nous étions de confession israélite, pas particulièrement pratiquants, traditionalistes. On respectait simplement les grandes fêtes." Denise oublie sa fatigue. Elle veut témoigner à tout prix, en détail, depuis son enfance et le plaisir qu’elle avait à écouter ses arrière-grands-parents parler en provençal. "On se croyait protégés des occupants nazis", lâche-t-elle.
Et puis non. Le 23 mai 1944, Denise, ses parents, un de ses frères et sa grand-mère sont arrachés à leur vie marseillaise. Déportés. L’effroyable séjour au camp, le travail, l’usure, Denise raconte tout. Jusqu’à la libération du camp, le 27 janvier 1945 et son retour en France, cinq mois après. "Nous revenions mes frères et moi, orphelins. Nos parents et notre grand-mère, on les avait mis dans une chambre à gaz puis dans les fours crématoires."
Au centre de rapatriement, dans l’hôtel le Lutetia, on lui montre des photos. Avez-vous vu ma fille ? Avez-vous vu ma mère ? "Sur les images, il n’y avait que de superbes femmes aux cheveux longs... Ce que j’avais vu à Auschwitz, ce n’était que des femmes amaigries et tondues. Je ne pouvais rien leur dire..." Et cela durera vingt ans. Vingt ans de silence, le temps de se reconstruire, d’essayer, au moins. "Avant de parler, il fallait trouver un équilibre, reconstituer une famille, l’heure était à l’apaisement des esprits." Puis, les premiers films, les premiers documents et les premiers négationnistes, aussi. "Là, on a compris qu’il fallait parler." Depuis, Denise Toros-Marter ne s’est plus arrêtée.
Mais hier, plus que d’habitude, un mot revenait souvent dans son discours : vigilance. "Malheureusement, d’année en année, on est confronté à des événements qui nous meurtrissent. On avait dit plus jamais ça et on est obligé de reconsidérer qu’il y a une nouvelle forme de racisme et d’antisémitisme qui se propage. Il faut absolument s’élever contre ça, il faut qu’on arrive à déceler le danger que ça représente, il faut que vous, les jeunes, fassiez très attention. Vous êtes nos héritiers, les témoins des témoins et vous devez être vigilants à toute percée du racisme parce que ça commence comme ça et puis vous voyez comment ça aboutit..."
La Provence
Commentaires
Encore et toujours Ossvitch, une obsession , mais comment certains ont-ils pu survivre et devenir si vieux après une aussi terrible vie ??
à croire la parole divine du lobby juif ,il n'y aurait eu qu'un seul camp de la mort dans l'allemagne nazie : celui des juifs d'auswitch!
il est incroyable que les associations de déportés ne protestent pas de cette annexion des camps de la mort ;Les survivants de Buchenwald ,de Belsen et d'ailleurs devraient exiger que ces lieux de souffrances et de mort soient obligatoirement nommés en toutes occasions ;
Les rescapés sont de moins en moins nombreux : dès lors, on nous cassera un peu moins les oreilles avec des faits vieux de 70 ans qui ne risquent pas de se reproduire sous cette forme , du moins.
@turigol : Quelques uns en sont revenus (dans un sale état !), les plus chanceux, ceux qui avaient été déportés vers la fin, ceux qui avaient pu mendier ou voler un surplus de nourriture, ceux qui étaient physiquement plus résistants, psychiquement mieux armés (parfois), ceux qui ont échappé aux bombardements lors de l'évacuation à marche forcée etc etc .Il en a été ainsi de tous les génocides, massacres et autres. Par exemple, au Moyen-Age, il-y-eut bien des survivants aux famines, aux pestes, aux invasions et guerres locales ! Dans certains cas, il faut le dire, certains déportés ont été favorisés car on exploitait leurs talents, leur savoir, leurs capacités de trahir et de commander les autres, tout le monde n'était pas égal mais tout le monde était à plus ou moins long terme destiné à mourir, dans une logique qui consistait à éliminer toutes les populations soupçonnées d'être nuisibles à une société totalitaire implacable, une dictature comme il-y-en aura toujours hélas (cf.le Cambodge, l'URSS, la politique anti-chrétienne Turque etc) sauf si la société devenait comparable à un paradis, chose qui n'est pas "de ce monde" comme l'enseigne l'Evangile.
"les lycéens dont les visages reflètent l,effroi" , je vois surtout sur cette photo des jeunes au visage fermé , sûrement transis de froid , qui devaient attendre avec hâte la fin de la cérémonie , afin d,aller se réchauffer . .!!
quant à cette vieille dame , elle aurait pu préciser dans son discours , qui sont les nouveaux racistes ,mais elle a su éviter de stigmatiser , il est vrai qu,il faut préserver le mal-vivre-ensemble "républicain. .!!
salutations.
Ils grelottent, il y avait un fort mistral glacé ce jour-là en Provence...
Denise, c'est la cerise sur le gâteau.
Déjà, à l'poque de ses parents, on ne parlait plus le provençal à Marseille. Sa mémoire n'est pas très bonne...
Les voyages de lycéens à Auschwitz se font en une seule journée, aller-retour en avion. Et toujours en février, quand il fait très froid en Pologne et que les lieux sont sous la neige. C'est sinistre. Ensuite ils doivent rédiger un compte-rendu à remettre à leur prof d'histoire.
Les enfants ne savent plus lire , compter et écrire mais ils savent tout de la shoah, avec travaux pratiques obligatoires comme le voyage au bout de la nuit et brouillard.
La vérité n' a pas besoin de mise en scène, de cette propagande digne de l' époque soviétique.