LE SCAN POLITIQUE - Habitué des coups médiatiques, le maire de Béziers a une nouvelle fois créé la polémique par un montage photo et une couverture anxiogène dans le journal municipal de sa ville.
A Béziers, le journal local ne sert pas qu'à annoncer l'inauguration des parcs publics. Depuis que la ville est aux mains de l'ancien chef de Reporters sans frontières Robert Ménard, l'organe municipal est régulièrement au cœur de ces polémiques, dont l'édile élu avec le soutien du FN a fait sa spécialité. La dernière en date se trouve dans les pages du numéro de septembre: une couverture consacrée aux migrants, barrée de l'annonce anxiogène «ils arrivent», alors que la ville de Béziers a manifesté son refus de participer à l'accueil de réfugiés. Un nouveau coup qui suscite l'indignation de la classe politique, mais aussi cette fois de l'Agence-France-Presse (AFP). En cause, la couverture réalisée avec un photomontage réalisé à partir de l'un des clichés de l'agence, et pour lequel Robert Ménard pourrait faire l'objet d'une plainte.
En couverture, devant le train visible sur ce cliché pris en Macédoine le 18 juin dernier, on aperçoit des familles de réfugiés tentant de monter dans un wagon. Le journal de Béziers a ajouté sur les fenêtres du train un panneau portant la mention «Béziers 3885 km» et un autre mentionnant «scolarité gratuite, hébergement et allocations pour tous». «C'est un montage bien sûr. Mais si le montage avait été dans le sens bien-pensant, il n'y aurait pas de problème», explique au Scan Robert Ménard. «Ce cliché a été payé 930 euros hors taxes à l'AFP, qui savait qu'elle serait portée en une. Je crois que c'est un problème politique plus que de droit à l'image», balaye l'ancien journaliste. Attaqué sur les réseaux sociaux, il revendique volontiers: «contrairement aux villes de gauche, Béziers ne sera pas une tête de pont de l'immigration clandestine».
«Réflexes pavloviens»
«Béziers accueille déjà beaucoup de réfugiés, nous avons deux centres pour demandeurs d'asile. La ville n'a pas les moyens d'accueillir de nouvelles personnes, surtout si elles ont vocation à rester par la suite, puisque l'État ne fait pas appliquer la loi en reconduisant à la frontière ceux qui doivent l'être», se défend le maire. Des réfugiés syriens à Béziers, c'est d'ailleurs le thème d'une page consacrée «aux dizaines d'immigrés» squatteurs du quartier de la Devèze. En illustration, sans autre forme d'explication, la nouvelle ministre du Travail, autrefois secrétaire d'État à la ville, Myriam El Khomri. La ministre s'était rendue dans ce quartier en juillet défavorisé de la ville dans le cadre de ses fonctions. «Ce n'est pas une attaque contre elle, j'étais ravi de la voir venir», souligne Robert Ménard. Avant de fulminer au sujet «des squatteurs»: «C'est une filière de syriens qui viennent tous de la même ville! Ils forcent les portes et se branchent sur l'électricité. C'est bien de venir nous dire que l'État va nous aider, qu'il fasse appliquer la loi!».
Comme à chaque coup médiatique du mairie de Béziers, les réaction d'indignation des politiques ne se sont pas faites attendre. «Nauséeux! C'est ça le FN en vrai!», écrit sur Twitter le député écologiste Denis Baupin. «Quand le mot nauséabond ne suffit plus! Honte à vous Robert Menard», a renchérit le député PS Matthieu Hanotin. «Réflexes pavloviens», balaye Ménard. «Dites Robert Menard, votre journal municipal est un tract politique du FN. Indigne de la République!», considère pour sa part le socialiste Alexis Bachelay. Interrogé sur ce dernier point, Robert Ménard se réjouit: «Le rôle d'un journal municipal, c'est de montrer le maire qui coupe les rubans? Le journal de Béziers a beaucoup de succès. Pendant la trêve estivale, les biterrois le réclament. Au moins ça ressemble à de l'info, je suis content quand on me dit qu'il ne ressemble pas à un journal municipal classique!». Une posture que Robert Ménard a déjà illustrée plusieurs fois dans les pages du mensuel tiré 44 000 exemplaires. En avril dernier les attaques contre le journal le Midi-Mibre et les mots croisés sur l'Algérie Française avaient déjà créé leur effet. En août dernier, c'est un article consacré aux déboires judiciaires qui opposent Robert Ménard à la LDH qui avait suscité l'indignation pour sa dimension jugée sexiste…
Le Figaro