Bethléem se situe en territoire palestinien, derrière le mur. Un mur immense, gris, de plusieurs mètres de haut, fermé par quelques portes de prisons et crénelé de caméras et de gardes, qui avec ses trois heures d’attente le matin et autant le soir, interdit aux Palestiniens de trouver du travail en dehors du mur, là où la vie est prospère, c’est-à-dire en Israël. Les Palestiniens qu’ils soient musulmans ou chrétiens sont asphyxiés, réduits à la pauvreté, comme à Jéricho.
Nos cartes de crédits ne pouvaient fonctionner, car les lignes téléphoniques étaient coupées régulièrement par les Israéliens. Les touristes, seule source de revenus de ces populations parquées, ne pouvaient dépenser sur place. Même dans notre hôtel, encore plus luxueux que les précédents, nous ne pouvions consommer comme nous voulions. Il nous fallait retirer du liquide en Israël pour acheter à Bethléem. Aussi fus-je révolté lorsqu’on nous présenta Yad-Washem. Monument à la mémoire des juifs morts lors de l’holocauste nazi. Certes ce fut une ignominie condamnable et condamnée. Mais j’étais révolté au point de sortir de ce monument de la honte.[J’aurais voulu lancer] une remarque sur ce peuple juif qui faisait subir aux Palestiniens ce pour quoi il ne cessait d’appeler le monde à gémir sur lui-même. Certes il n’y avait pas de génocide, mais le comportement sectaire et la ghettoïsation de territoires comme Jéricho ou Bethléem n’avait rien à envier aux méthodes qu’eux-mêmes déploraient. Les juifs si fiers de leur élection divine, n’étaient plus le peuple élu, mais le peuple de la shoah. Toute leur attitude, leur politique s’enracinaient dans cet événement dramatique pour lequel ils faisaient pleurer le monde quand ils se sentaient en difficulté. Désormais être en désaccord avec eux c’est être antisémite. Cela leur permettait les pires exactions comme ce que nous avons vu au Caritas baby hospital de Bethléem.
Cet hôpital tenu par des religieuses catholiques est le seul hôpital pour enfants pour les Palestiniens. L’accueil y est totalement indifférencié. Qu’il s’agisse de chrétiens ou de musulmans, les sœurs accueillent plus de cent enfants chaque jour. La situation sanitaire de ces enfants est souvent dramatique. Les mères, trop jeunes, n’ont aucune éducation sanitaire, la pauvreté de ces populations qui côtoient pourtant un Israël riche, entraîne des carences et des problèmes génétiques que l’endogamie ne fait qu’accentuer. Toutefois, dans ce contexte, les sœurs et le personnel qui travaille avec elles, réalisent de véritables prouesses. Mais pour avoir visité cet hôpital tout neuf, je peux témoigner de l’état dramatique de ces enfants et de ces familles.
L’hôpital relativement bien équipé, ne dispose pas de tout ce qui est absolument nécessaire, en conséquence, il faudrait quasi quotidiennement que des enfants puissent être transférés à l’hôpital de Jérusalem. Les autorités médicales de Jérusalem, ne s’y opposent pas. Mais il faut pour cela obtenir une autorisation du gouvernement israélien, autorisation qui prend trois à quatre jours alors que les enfants n’ont pas plus de 24h devant eux. Nous ne pourrons jamais oublier le visage de ces enfants qui auraient pu être soignés, mais que l’on ne pouvait plus qu’accompagner à la mort, parce que le coup de tampon abstrait qui aurait pu leur sauver la vie n’était pas arrivé à temps ou n’arriverait pas. Parce que des hommes sont des terroristes, parce que peut-être un de ces enfants sauvés pourrait un jour porter une bombe au cœur de Jérusalem, des centaines d’autres meurent alors que leur salut est seulement à 20mn.
Face à cette situation inhumaine et contraire aux droits de l’homme, des démarches ont été tentées pour sensibiliser les autorités israéliennes, sans succès. Eux qui font pleurer le monde sur leur sort passé depuis soixante ans, ne savent pas s’attendrir devant un enfant qui meurt sous leurs yeux.
Cette journée m’avait révolté et je blêmissais. Je compris alors que le patriarche de Jérusalem et le nonce apostolique avec lesquels j’avais eu en son temps de multiples échanges, avaient sans doute vu juste. Israël est un pays fait de bric et de broc, construit dans l’après guerre par un sionisme disparate qui a uni sur un même sol des juifs aussi différents que les russes, les allemands, les américains et tant d’autres. Rien ne les tient vraiment ensembles. Le seul moyen de maintenir l’unité du pays est cet état de guerre permanent, cette culture de l’insécurité. Il ne fallait pas attendre de solution de paix quel que soit le gouvernement, l’Etat israélien ne lui survivrait pas.
Extrait de La vérité vous rendra libres, ed Edilivre, 2015, Cyril Brun
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