Il y a un mois, le collectif citoyen qui s'est constitué autour de trois familles Tchétchénes (lire la Provence des 16 et 26 juin) se félicitait de l'ouverture d'une clause humanitaire par les services préfectoraux. Celle-ci permettant d'instruire une demande d'asile pour une des trois familles tchétchénes qui dispose de parents en France. Pour les deux autres familles, la suite s'annonce bien plus difficile.
Dans un communiqué de presse datant de vendredi, la préfète Yvette Mathieu rappelle les fondamentaux du règlement européen dit "Dublin": "L'état membre de l'Union européenne responsable de l'examen d'une demande d'asile est l'état par lequel le demandeur d'asile est entré dans l'Union européenne. De ce fait, l'instruction de la demande d'asile des trois familles tchétchènes relève des autorités polonaises et non des autorités françaises.Ainsi, en application de ces règles de droit, l'obligation de regagner la Pologne a été notifiée à ces familles".
Un dialogue de sourds
Pour le comité de soutien, renvoyer ces familles en Pologne, c'est prendre le risque qu'elles soient réacheminées vers la Tchétchénie, pays dans lequel elles disent avoir "été menacées de mort à de nombreuses reprises." Pour Dominique Vallet, membre du comité de soutien et conseiller municipal (PC): "Il ne faut pas perdre de vue les chiffres donnés par la Ligue des droits de l'homme. Près de la moitié des Tchétchénes reconduits dans un Centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) polonais sont réacheminés en Tchétchénie." Le comité de soutien est bien décidé à faire jouer la solidarité. Il a déjà lancé un appel aux dons auprès de la population afin que les familles soient hébergées à Digne pendant toute une année.
"Au bout d'une année passée en France, leur demande d'asile sera examinée en procédure prioritaire par l'OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides)" précise Christiane Bordes, membre de Réseau d'Éducation Sans Frontière. "Mais en cas de rejet de la demande d'asile, les familles devront être reconduites dans leur pays d'origine, et non en Pologne, précise Yvette Mathieu. La seule solution en droit et en opportunité consiste à regagner volontairement la Pologne où elles pourront librement faire valoir leurs droits."
Pour Florence Viti-Bertin, la France doit accorder le droit d'asile à ces réfugiés : "Il est hors de question de prendre un tel risque en les renvoyant en Pologne. On parle d'êtres humains, d'enfants en bas âges et d'une femme enceinte. Nous sommes déterminés à continuer notre combat. La préfète a beau se cacher derrière les textes. Nous, ça ne nous suffit pas !"
Les familles ont quitté le camping du Bourg et vivent dans un appartement mis à disposition par une famille dignoise. "Le maintien de ces familles sur le territoire français, ainsi que certains l'envisagent, est-il une option humanitairement acceptable ? interroge la préfète. Ces familles seront en situation irrégulière, sans obtenir l'examen effectif de leur demande d'asile, sans droit au travail, sans ressources, sans logement."
"La préfète parle d'humanisme mais est-ce humain d'expulser ces familles ?" ironise Dominique Vallet. Le comité de soutien se réunira mardi à partir de 18h30à l'école Paul-Martin.
Source La Provence - 24/07/11