28/04/2017 – 06h15 Rennes (Breizh-Info.com) – Nous évoquions il y a peu la session de 62 hôtels Formule 1, propriété du groupe Accor, à Adoma, via le groupe SNI, filiale de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). L’objectif : loger des migrants et des sans abri. En Bretagne, 4 hôtels sont concernés :
F1 Brest Nord Kergar
F1 Rennes Ouest Le Rheu
F1 Quimper
F1 Nantes Bouguenais
400 personnes vont être licenciées en conséquence (une vingtaine en Bretagne) Accor cédant officiellement à l’Etat ses hôtels les moins lucratifs. Officieusement, certains de ces hôtels souffrent d’une très mauvaise réputation :
La prostitution organisée tout d’abord, via des réseaux mafieux. Contacté par téléphone, un employé d’un des hôtels concerné a confirmé une certaine régularité de la prostitution à l’intérieur de ces hôtels. « Il y a des réseaux de proxénétisme qui envoient des filles pour des sortes de tournée dans telle ou telle ville. Elles séjournent trois jours, dans une chambre de l’hôtel, accueillent des clients toute la journée et s’en vont par la suite » nous confie l’un d’entre eux. « C’est connu, mais c’est difficile d’y remédier ».
Nous avons cherché à en savoir plus : en nous rendant sur le site de petites annonces Vivastreet, connu pour abriter des annonces de prostitution – qu’elles émanent d’indépendantes ou d’esclaves. Sur Nantes et Quimper, plusieurs jeunes femmes contactées – qui ne savaient pas que nous étions journalistes – nous ont indiqué se trouver dans un des deux hôtels concernés par la fermeture prochaine. Idem à Rennes.
Joint par téléphone à ce sujet, Gilles d’Arondel, syndicaliste et lui même hôtelier, secrétaire général FO d’Accor, explique toutefois que le groupe est particulièrement attentif à ces dérives – qui peuvent exister, mais qui sont difficiles à contrôler. « Notre personnel est formé à ce fléau et doit informer la direction à la moindre suspicion » nous dit-t-il tout en rappelant le travail effectué depuis des années avec les autorités et les forces de l’ordre pour parer à ce trafic d’êtres humains.
Deux hôtels fermés en 2006
En 2006, deux hôtels Formule 1 avaient fait l’objet d’une fermeture après le démantèlement d’un réseau de prostitution. Les deux directeurs avaient été écroués ainsi que deux de leurs employés. En 2013, Ouest-France évoquait déjà, à Quimper, la prostitution hôtelière, qui ne concerne bien entendu pas que le groupe Accor, mais de nombreuses autres enseignes du parc hôtelier.
A Rennes par ailleurs, l’hôtel du Rheu hébergerait déjà un public de « migrants » et d’individus placés par les autorités. L’un d’entre eux, un français d’origine maghrébine, vient d’ailleurs d’être interpellé récemment pour un vol à hauteur de 500 euros. Il est suspecté d’autres vols et d’utilisation frauduleuse de Carte Bleue. Certains clients, tout comme le personnel, ne se sentent pas à l’aise au contact de ces populations.
Un petit tour sur Trip Advisor montre par ailleurs que certains hôtels F1 n’ont pas une très bonne réputation. Ainsi concernant l’hôtel Formule 1 de Metz centre (nous ne savons pas s’il est concerné par la fermeture) , un client écrivait en 2015 :
« Attention! Plaque tournante du trafic de drogue! Ceci n’est pas un hôtel mais un squat pour trafiquants de drogue! L’endroit est visité par des dizaines de personnes à toutes heures de la nuit, et ce n’est pas tout!!
Le lieu est à quelques mètres d’une voie ferrée (pratique pour dormir…), la propreté des chambres est plus que douteuse, l’accueil est inexistant, et j’ai connu des toilettes de festivals beaucoup plus propre qu’à cet endroit (forcement l’absence de lumière n’empêche pas certains de faire leurs besoins sans se préoccuper de l’endroit à viser…).
Un conseil, mieux vaut trouver un emplacement de camping à proximité que de dormir dans un endroit aussi dangereux ! »
Concernant l’établissement du Rheu, on peut lire la chose suivante (témoignage de 2015) : « habituée des Formule 1, j’ai été très déçue de celui-ci : en effet, non seulement il est vieillot, mais très bruyant à cause d’ouvriers étrangers qui étaient ivres et ont fait du bruit une grande partie de la nuit : sauts, cris, bavardages à voix très fortes, chutes dans les couloirs. A ceci s’ajoute la saleté des wc et douches,..»
Vétusté des installations, bruit, odeurs, tout y passe dans les commentaires concernant certains hôtels Formule 1. Il suffit de consulter les notes attribuées sur booking ou sur trip advisor pour s’en rendre compte. Les seuls bons points sont donnés par des voyageurs qui mettent en avant la nuit pas chère ou le personnel jugé agréable et accueillant. « Nous pouvons être fiers de notre personnel hôtelier » nous dit M. d’Arondel, qui rappelle que, concernant l’accueil de migrants ou de sans abris, ce personnel n’est pas formé à cela. « Ce sont des hôteliers, pas des travailleurs sociaux ».
D’où le malaise ressenti au sein d’une partie du personnel, notamment lors des nombreuses réquisitions de chambres par l’Etat, qui obligent le personnel à faire face à des publics pour lesquels ils n’ont pas été formés.
Sur les 230 hôtels que possèdent le groupe, 62 vont donc être vendus à l’Etat, soit un quart des F1 du groupe Accor. Mais selon certains employés que nous avons joints par téléphone, c’est le modèle F1 en lui même (low-cost) qui serait de plus en plus remis en question – dans sa configuration actuelle – par le groupe hôtelier. Il en va aussi de sa réputation.
« Ce que je sais, c’est qu’aujourd’hui, Accor veut moderniser son parc hôtelier et notamment les F1, pour changer d’image et faire évoluer un modèle resté un peu figé » conclut M. d’Arondel. « Concernant les négociations avec le groupe sur le personnel victime de la session des 62 F1, nous avons réussi à faire en sorte que ce personnel puisse, s’il ne se sent pas à l’aise pour travailler dans les nouvelles conditions imposées par l’Etat – puisque ce ne serait pas le même métier – être reclassé dans le groupe ou bénéficier d’un plan de départ volontaire . ».
La conclusion de ces négociations n’aboutira, de toute façon, que lors de la remise de l’expertise, en juillet 2017. Affaire à suivre.