Chronique de Paysan Savoyard
(n°158 – octobre 2016)
- Edito du monde : « l’immigration ne fait que commencer »
Dans son éditorial du 25 octobre 2016 Le Monde, principal porte-parole de la classe dirigeante, nous prévient : l’immigration ne fait que commencer et il va falloir accueillir un nombre croissant de nouveaux arrivants.
« Les Européens et leurs élus doivent prendre conscience qu’il est temps de réfléchir à la gestion du grand flux migratoire en cours et à venir (…). La jungle de Calais (…) illustre ce qui attend les Européens (…) : l’immigration ne va pas cesser. Elle commence. (…) D’ici à 2050 la population de l’Afrique pourrait doubler (…). Des chiffres (…) qui amènent à cette conclusion : (…) L’Europe se reconstruira sur ce défi : la gestion et l’intégration d’une partie du grand flux migratoire qui va marquer ce siècle. (…) L’investissement est énorme. (Il suppose la) réforme de l’Etat providence pour qu’il s’adapte à cette belle et difficile mission qu’est l’intégration ».
Cet édito du Monde mérite d’être mis en exergue. Il signifie en effet que la classe dirigeante immigrationniste est en train de franchir un nouveau cap. Pendant des années la thèse qu’elle nous servait était que le nombre des immigrés restait très limité. Devant l’importance des flux devenue impossible à nier, la classe dirigeante a ensuite tenu en substance le discours suivant : « Il faut mettre fin à l’immigration clandestine, fixer des effectifs raisonnables d’immigration légale et faire ce qu’il faut pour réussir l’intégration » (voir cette tribune).
L’oligarchie vient de passer à une troisième étape et ne prend plus la peine d’opérer une distinction entre immigrés légaux et clandestins de Calais, entre demandeurs d’asile et immigrés économiques : tous doivent être accueillis.
La classe dirigeante immigrationniste ne se contente pas de mots : les actes suivent. Les immigrés de Calais sont en train d’être répartis et pris en charge dans toute la France (sans, cela va de soi, que les populations de souche concernées aient été consultées). Certains vont recevoir l’aide nécessaire pour pouvoir entamer des études supérieures. Les bateaux de la marine nationale italienne, de l’ONU et des associations subventionnées recueillent les immigrants en Méditerranée par centaines de milliers et vont maintenant les chercher au plus près des côtes libyennes (300 000 seraient arrivées depuis janvier. 400 000 seraient « en transit » en Libye).
L’édito du Monde met en évidence les trois composantes qui constituent aujourd’hui l’état d’esprit de l’oligarchie :
La dimension de la provocation d’abord. Alors que les attentats islamistes commis ces derniers mois ont été les plus sanglants que la France aie jusqu’ici connus ; alors que la présence massive des immigrés est de plus en plus mal ressentie par une partie croissante de la population, comme en témoignent les études d’opinion et les intentions de vote pour le Front national ; alors que les exigences et les récriminations de la communauté immigrée sont de plus en plus pressantes et agressives, l’oligarchie annonce que l’immigration va continuer et s’amplifier encore.
Provocation de même lorsque les médias publient complaisamment les photos des migrants de Calais, tous ou presque jeunes hommes africains, en parfaite santé et célibataires. L’oligarchie avait pourtant insisté sur le devoir d’accueil des « familles de réfugiés fuyant la guerre et les bombes en Syrie et en Irak ».
Provocation toujours lorsque l’oligarchie présente l’obligation d’accueil des immigrés comme la conséquence nécessaire de la démographie africaine. Comment pourtant le fait d’accueillir même par millions des immigrés pourrait-il suffire à stabiliser la situation, alors que l’Afrique compte déjà un milliards d’habitants, que sa natalité est exponentielle et qu’une partie manifestement importante de sa population a pour ambition première de rejoindre l’Europe ?
La provocation reflète la joie mauvaise des immigrationnistes, leur exaltation de provoquer le français de souche franchouillard qu’ils détestent, la jubilation de lui nuire chaque jour un peu plus.
La classe dirigeante a en tête un second objectif : mettre en pratique « la théorie du choc ». Sidérés face à l’invasion migratoire, accablés par les attentats, hébétés, démoralisés, résignés, les Français de base sont tout proche de la soumission. La classe dirigeante entend manifestement profiter de cet état d’esprit de défaite pour pousser encore son avantage et rendre les choses irréversibles. Accélérer encore le rythme de l’invasion. Rendre le Grand remplacement irrémédiable. Détruire définitivement les états-nations. Déliter sans possibilité de retour les communautés d’appartenance et de solidarité nationales. Afin que les multinationales et les différents pouvoirs transnationaux ne trouvent plus face à eux que des individus atomisés, isolés, inhibés, consommateurs dociles, contribuables obéissants, électeurs soumis.
Ainsi que l’illustre le papier du Monde, l’état d’esprit de l’oligarchie recèle un dernier élément : la certitude de ne pas rencontrer avant longtemps d’obstacle politique. Le Front national n’est pas dangereux car il est mal dirigé et son leader n’est pas crédible. Il joue qui plus est un rôle utile, en servant d’exutoire et en canalisant les frustrations des Français de souche. L’oligarchie sait que le prochain président, Juppé, Macron ou un autre, sera immigrationniste et mondialiste et ne remettra pas en cause les principales orientations suivies depuis quarante ans.
Cet édito du Monde le montre : la classe dirigeante évolue désormais dans le registre de l’excès, de l’ivresse, de la démesure. Si les Anciens Grecs ne se sont pas trompés, cela devrait finalement la perdre.
- Le Monde, l’un des principaux vecteurs de l’idéologie libérale-libertaire
L’éditorial provocateur du Monde permet de mettre en évidence cet autre point. Le Monde bénéficie toujours d’une image et d’une réputation de journal de référence, alors qu’il est depuis au moins vingt ans un journal militant.
Jusque dans les années soixante-dix, le Monde méritait sans doute le statut de journal de référence dont il bénéficiait, qui suppose rigueur, sérieux et honnêteté intellectuelle. C’était à juste titre qu’il était considéré comme une institution incontournable dans les cercles politiques, les administrations, les universités. Politiquement sa ligne éditoriale était le centre-gauche.
Les choses ont changé dans la foulée de mai 68 avec la présence croissante de journalistes gauchistes, qui ont progressivement transformé la ligne du journal. Entré au Monde en 1980 après avoir commencé sa carrière au journal de la LCR, le trotskyste Plenel a par exemple été le directeur de la rédaction pendant presque une décennie (1996-2004).
Depuis plus de vingt ans le journal est devenu un organe militant. Sur le plan sociétal, il est immigrationniste, milite pour la libération des mœurs, le féminisme, l’extension des droits des homosexuels, la dépénalisation du cannabis. Sur le plan économique et géopolitique, le Monde est un militant de l’Union européenne et de la mondialisation et un adversaire résolu du protectionnisme. Il est le plus souvent aligné sur les positions américaines (notamment l’hostilité à la Russie).
Sur le plan des méthodes, le Monde est devenu un organe de propagande : titres systématiquement orientés ; articles d’opinion présentés comme des compte-rendus ; publication des seuls « points de vue » conformes à la ligne du journal ; multiplication artificielle d’articles montant en épingle une prise de position ou un événement, soit pour le soutenir soit pour le dénoncer…
Le Monde est sur la même ligne que Libé ou l’Obs mais il continue lui à bénéficier de la réputation de journal sérieux et modéré. Réputation doublement usurpée. Le Monde est le principal porte-voix et le relais de propagande des conceptions de la classe dominante : l’idéologie libérale-libertaire.
- Grève à itélé : la presse et les médias appartiennent presque tous au CAC 40
Un autre édito du Monde de cette semaine vaut lui aussi d’être remarqué. Il soutient la grève à itélé, dénonce les méthodes de Bolloré son propriétaire et s’inquiète de ce que « des milliardaires en quête d’influence » se rendent propriétaires des médias.
Cet éditorial est remarquable de duplicité puisque le Monde appartient lui-même à des milliardaires : MM. Niel, Pigasse, Bergé. Avant la prise de pouvoir de ce trio de milliardaires bobos hipsters en 2010, l’actionnaire principal du Monde avait été pendant plusieurs années Jean-Luc Lagardère, industriel de l’armement, comme Dassault, propriétaire lui du Figaro. Les journaux, télé et radios privés appartiennent tous ou presque aux grands industriels et banquiers : c’est également le cas du Monde, qui feint de s’en indigner
Ajoutons dans le cas du Monde que son Conseil de surveillance compte ou a compté dans ses rangs certains oligarques majeurs, comme MM. Schweitzer, Minc (qui l’a présidé) ou encore M. Bernard-Henri Lévy.
En dénonçant le fait que itélé soit la propriété de Bolloré, l’éditorialiste a-t-il fait preuve d’inconséquence ? A-t-il voulu dénoncer la situation de son propre journal ? Evidemment pas : chacun des mots de l’éditorial quotidien (ainsi que tous les titres et accroches du journal) est épluché et validé par la direction du journal nommée par les actionnaires.
Une autre explication de ce curieux éditorial est envisageable : elle tient à ce que l’impudence des oligarques n’a plus de limites. Surs de leur force et de leur domination totale, ils ne prennent même plus la peine de faire en sorte que leur propagande reste un tant soit peu crédible.