Même son père n'aurait pas imaginé qu'elle puisse survivre à une telle catastrophe. Pourtant, Bahia Bakari, décrite comme fragile et sachant «à peine nager», est l'unique rescapée de l'accident de l'A310 de Yemenia Airways, au large des Comores, mardi. L'adolescente, qui va avoir 13 ans le 15 août, est originaire du village de Nioumadzaha sur la Grande Comore et habite Marseille. Elle avait quitté la France lundi depuis l'aéroport de Roissy-Charles De Gaulle en compagnie de sa mère, qui n'a elle pas survécu.
Elle a quitté Moroni en direction de Paris mercredi à 21h20, à bord de l'avion du secrétaire d'Etat français à la Coopération Alain Joyandet. «La petite Bahia est installée (dans l'avion). Nous la ramenons à Paris auprès de son père. Les médecins considèrent qu'il n'y a pas de problème pour la rapatrier», a-t-il déclaré peu avant le décollage. «L'avion a été sécurisé et partiellement médicalisé», a-t-il ajouté, précisant que Bahia Bakari serait hospitalisée à son arrivée jeudi matin à Paris. L'adolescente, qui souffre d'une fracture de la clavicule et de brûlures au genou, a été acheminée en ambulance de l'hôpital El Maarouf de Moroni jusqu'au tarmac de l'aéroport.
12 heures dans l'océan Indien
Bahia Bakari, 12 ans, voyageait avec sa mère dans l'A310 de Yemenia en provenance Marseille, dans le sud de la France.(sic!) Elle est pour l'heure la seule rescapée retrouvée de la catastrophe. Après avoir passé 12 heures dans l'océan Indien, Baya Bakari a été recueillie «tremblante» par les secours comoriens, qui l'ont enveloppée dans plusieurs couvertures et lui ont donné de l'eau chaude sucrée. Souffrant d'hypothermie, d'une clavicule cassée et de brûlures au niveau du genou, elle a ensuite été prise en charge par l'hôpital El Maarouf. Elle est attendue jeudi matin à Paris, où elle sera de nouveau hospitalisée.
«Elle est évidement très traumatisée. Elle souhaite se reposer maintenant», avait annoncé dans la journée le secrétaire d'Etat à la Coopération et la Francophonie Alain Joyandet, après lui avoir rendu visite à l'hôpital. Karim Bakari, le père de la jeune fille, a pour l'instant exclu de lui annoncer la mort de sa mère. «Quand je l'ai eue au téléphone, elle demandait où était sa maman. On lui a dit qu'elle était à côté dans une chambre», a-t-il déclaré. «Qui va lui dire, je ne sais pas qui va lui dire ça».
«Des avions cercueils»
D'après lui, Baya doit la vie sauve au fait d'avoir été éjectée de l'appareil. «Elle s'est retrouvée à côté de l'avion (…) Elle n'a rien senti et s'est retrouvée dans l'eau. Elle a entendu des gens parler autour mais elle ne voyait personne dans la nuit», a-t-il précisé sur RTL. «C'est une fille très très timide. Je n'ai jamais pensé qu'elle allait s'en sortir comme ça (...) C'est le bon Dieu qui l'a voulu», a-t-il ajouté. «Elle a vraiment montré une force physique et morale absolument incroyable. Elle dit qu'à un moment donné des consignes ont été données aux passagers pour s'attacher. Elle dit qu'ensuite, elle aurait ressenti un peu comme de l'électricité, c'est le terme qu'elle a employé»», a complété Alain Joyandet.
Malgré ce miracle, Karim Bakari doit également faire face à la mort de son épouse. D'où sa colère vis-à-vis de la compagnie aérienne, largement mise en cause dans cet accident. Comme l'ensemble de la communauté comorienne, il dénonce les avions poubelles de Yemenia Airways.
«Moi, cette ligne-là, je l'ai prise à plusieurs reprises. Le problème ne se pose jamais ici à partir de Paris, il se pose toujours à partir de Sanaa (la capitale du Yémen, ndlr), c'est là où tout chamboule, à cause des conditions des avions», a-t-il affirmé sur France Info.
«Mais quand on dit que voilà, cet avion n'a plus le droit de venir en France, d'accord, mais on a oublié une chose : c'est que même à Sanaa, y'a des Français qui partent à l'étranger et ces Français-là, est-ce qu'on peut les laisser dans des avions cercueils ? Je ne crois pas, mais personne n'a jamais levé le petit doigt (…) c'est pour ça, qu'on en est arrivé là aujourd'hui». Et de conclure : «Non seulement il y a de la colère, mais il y a de la haine aussi.»
Le Figaro - 1er juillet 2009