Si le dépouillement complet le confirme, le PJD deviendra, après le parti Ennahda en Tunisie, la deuxième formation islamiste à arriver en tête d'un scrutin national depuis le déclenchement du "printemps arabe".
D'après les résultats encore incomplets de la consultation de vendredi, le PJD pourrait diriger un gouvernement de coalition en partenariat avec le parti laïque Istiqlal du Premier ministre sortant et deux autres formations.
Ces législatives, avancées de dix mois, avaient valeur de test des réformes amorcées par le roi Mohammed VI sur fond de révoltes pour la démocratie dans le monde arabe.
Si le Maroc a connu cette année des manifestations en faveur d'une évolution politique, elles sont restées en deçà de ce qui s'observait ailleurs, le roi gardant les rênes bien en main.
Mohammed VI a cependant fait adopter par référendum une série d'amendements constitutionnels pour transférer une partie de ses prérogatives à des représentants élus.
Le PJD, lui, a bénéficié d'un regain d'intérêt régional pour les islamistes. Le parti, fidèle au souverain, entend développer la finance islamique mais ne compte pas imposer d'ordre moral strict.
En annonçant à la presse les résultats partiels des élections, le ministre de l'Intérieur Taïb Cherkaoui a noté que le PJD était en voie de constituer le premier groupe de la Chambre des représentants.
Alors qu'étaient connus les résultats concernant 288 des 395 sièges de la Chambre des représentants, le PJD en obtenait 80, a dit Cherkaoui, dont le ministère a organisé le scrutin.
L'Istiqlal, dirigé par le Premier ministre sortant Abbas El Fassi, arrivait en deuxième position avec 45 sièges.
MODÈLE POUR D'AUTRES MONARCHIES
Prié de dire si son parti serait prêt à s'allier avec le PJD, El Fassi a déclaré aux journalistes : "Oui, oui. La victoire du PJD est une victoire pour la démocratie."
Le décompte partiel crédite le PJD, l'Istiqlal et deux formations plus modestes d'un total de 170 sièges sur 395.
Leurs adversaires du G8, alliance d'inspiration libérale composée de huit partis proches du palais royal, réunissaient environ 112 sièges, selon les résultats provisoires.
La participation était l'une des interrogations que soulevait le scrutin. Une forte abstention aurait été un échec pour la monarchie, qui a présenté la consultation comme le symbole du changement démocratique.
Cherkaoui a annoncé que les législatives avaient mobilisé 45% des 13,6 millions d'électeurs inscrits, sur 33 millions d'habitants environ. En 2007, lors du précédent scrutin législatif, le taux de participation était ressorti à 37%.
Selon Driss Yazami, qui dirige le Conseil national des droits de l'homme, des observateurs ont fait état d'infractions aux règles mais qui n'étaient pas de nature à affecter le déroulement des élections.
En vertu des règles adoptées cette année dans le cadre des réformes constitutionnelles, le roi devra choisir un Premier ministre dans les rangs de la formation arrivée en tête.
Le processus électoral marocain est suivi de près par d'autres monarchies arabes qui cherchent à réagir au "printemps arabe" sans perdre leur emprise sur le pouvoir.
Le Maroc estime pouvoir servir de modèle pour une approche progressive des réformes, faisant l'économie des convulsions qu'on a pu observer dans des pays comme la Libye et la Syrie.
La France s'est félicitée samedi "du bon déroulement des premières élections législatives au Maroc depuis la révision de la constitution", selon une déclaration du ministère des Affaires étrangères.
Une minorité marocaine active juge toutefois les avancées insuffisantes. Le Mouvement du 20-Février, né dans la rue, a ainsi fait campagne contre les élections en mobilisant des milliers de personnes dimanche dernier dans plusieurs villes du royaume. Le mouvement appelle à une autre journée de contestation le 4 décembre.
Jean-Philippe Lefief, Henri-Pierre André et Philippe Bas-Rabérin pour le service français
Yahoo!Actu - 26/11/11