par Roger Nicoli
AJACCIO (Reuters) - Marine Le Pen a tendu la main samedi aux Corses et aux nationalistes lors d'un meeting à Ajaccio (Corse-du-Sud), louant "une terre d'identité, d'honneur et de liberté", à 36 jours du premier tour de l'élection présidentielle.
Après un déjeuner sur le port de plaisance où elle a rencontré les militants locaux, la candidate du Front national s'est exprimée pendant une heure devant plus de 700 personnes rassemblées au palais des congrès de la cité balnéaire.
La leader frontiste a repris les thèmes forts de sa campagne, fustigeant l'inaction de l'"UMPS" dans les décisions publiques, annonçant la sortie de l'euro ou réclamant la moralisation de la vie politique.
"Nous ne sommes plus en démocratie, mais en oligarchie", a-t-elle dénoncé, comparant le chef de l'Etat Nicolas Sarkozy à un "sous-gouverneur d'un protectorat" soumis à l'Europe.
A la tribune, elle a annoncé la création d'un Institut national de la préservation du patrimoine et celle d'une commission consacrée à l'apprentissage de l'histoire dans chaque région.
"Au fond de cette Corse, il y a, je le sais, le destin d'une île que les invasions n'ont pas épargnée (...) Terre d'identité, d'honneur et de liberté, la Corse sait peut-être plus que tout autre territoire de France ce que cela signifie de ne plus être maître de son destin", a-t-elle dit.
S'adressant à "l'âme corse", elle a fait un appel du pied au vote nationaliste insulaire en annonçant une lutte accrue contre la spéculation immobilière.
"Je préfère que l'on règle cela en amont", a-t-elle dit, dans une allusion aux attentats à l'explosif qui ont secoué régulièrement l'île ces dernières années contre des résidences secondaires.
"FASCISTI, FORA!"
Le Front de libération nationale de la Corse (FNLC) a revendiqué en novembre 2011 38 attentats à l'explosif, perpétrés essentiellement contre des résidences secondaires, et l'assassinat de Christian Leoni, tué le 28 octobre 2011.
"Les gens qui usent de la violence commettent une erreur, mais je peux comprendre que la déception envers l'Etat leur ait fait considérer que la Nation était leur ennemi: on peut être Corse et Français", a dit à Reuters Marine Le Pen. La Corse, où le Front national avait recueilli près de 15% au premier tour de l'élection présidentielle de 2007, n'est pas une terre qui a toujours été acquise au parti d'extrême droite, du fait de l'opposition historique avec les partis nationalistes corses.
En 1992, Jean-Marie Le Pen, encerclé par des manifestants nationalistes hostiles sur la place du Diamant, n'avait pu rejoindre la salle où il devait faire un discours à Ajaccio.
"Le meeting de Marine Le Pen à Ajaccio est historique", se sont réjouis des militants FN euphoriques tandis que la salle chantait la Marseillaise suivie de l'hymne traditionnel corse, "Dio vi salve Regina" (Dieu vous sauve, Reine).
A l'issue du meeting, une dizaine de membres du mouvement nationaliste d'extrême gauche Scelta Para (Choix égalitaire) a perturbé légèrement la sortie du public en criant : "Fascisti fora!" (les fascistes, dehors).
Edité par Marine Pennetier
Le Point - 17/03/12