PARIS (Reuters) - Arnaud Montebourg, arbitre du duel entre François Hollande et Martine Aubry pour l'investiture socialiste à la présidentielle de 2012, a accentué mardi dans une "lettre ouverte" sa pression sur les finalistes, dont la rivalité tourne à l'aigre.
Selon un sondage Opinionway pour Le Figaro, diffusé mardi, François Hollande gagnerait la primaire socialiste avec 54% (-4 points) des intentions de vote chez les sympathisants de gauche pour le second tour, contre 46% pour Martine Aubry (+4 points).
Arnaud Montebourg, arrivé en troisième position du premier tour de la primaire dimanche avec 17,2% des voix, continue d'entretenir le suspense sur le soutien éventuel qu'il pourrait apporter à l'un ou l'autre des "impétrants" pour le deuxième tour du scrutin, le 16 octobre prochain.
Le chantre de la "démondialisation" conditionne une consigne de vote à la prise en compte par François Hollande (39,2% au premier tour) et Martine Aubry (30,7%) de ses thèmes.
Dans une lettre ouverte, il demande aux deux finalistes de se prononcer point par point sur son programme.
Il cite notamment "des mesures pour la mise sous tutelle publique des banques, sans frais pour les contribuables", la possibilité d'utiliser les bénéfices des banques profitables pour renflouer les banques en difficulté et "une procédure pénale pour réprimer l'évasion fiscale".
Il leur demande de dire comment ils se rallieront à ses thèses sur la "démondialisation" sous la forme d'un "protectionnisme européen".
Le débat télévisé qui opposera mercredi soir le député de Corrèze et la maire de Lille détermina également sa décision.
"Je ferai certainement un choix", a dit Arnaud Montebourg mardi sur Europe 1, prolongeant le suspense au lendemain d'une intervention sur France 2 dans laquelle il précisait réserver sa décision - dont il n'est pas exclu qu'elle soit un "non-choix".
L'équation est délicate pour l'imprévisible élu, qui juge que François Hollande et Martine Aubry sont "les deux faces d'une même pièce".
"MÉPRIS ET CONDESCENDANCE"
Ses inimitiés personnelles et politiques avec les deux candidats sont autant d'entraves à une possible entente.
En 2007, lors de la campagne présidentielle, Ségolène Royal avait suspendu temporairement Arnaud Montebourg de ses fonctions de porte-parole après qu'il eut déclaré : "Le principal défaut de Ségolène Royal, c'est son compagnon".
En l'occurrence François Hollande, qui avait rejeté son concept de "VIe république" lors du congrès du PS de 2005.
A Martine Aubry, avec laquelle les points de convergence sont plus manifestes - il l'avait soutenue au congrès de Reims de 2008 -, il reproche les dérives de l'affaire Guérini.
Auteur d'un rapport sur la question, il a critiqué les atermoiements de la direction du PS face à la gestion "mafieuse" de la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône par Jean-Noël Guérini, mis en examen début septembre.
Dans une interview publiée mardi dans Libération, Arnaud Montebourg est sans indulgence avec les duellistes qui, dit-il, ont eu à son égard "des marques de mépris et de condescendance".
François Lamy, soutien de Martine Aubry, a souhaité qu'Arnaud Montebourg "fasse attention sur le ton".
"Il faut qu'il reste respectueux et qu'il n'oublie pas que les deux premiers ont 70% des voix", a dit à des journalistes le bras droit de la maire de Lille.
Les deux finalistes lui ont répondu mardi par médias interposés en affirmant leur indépendance et leur "cohérence", tout en consentant des ouvertures vers son électorat.
"POTS DE CONFITURE"
"Je ne défends que ce à quoi je crois, et donc je ne changerai pas", a prévenu la maire de Lille sur France 2 tout en relevant des points communs avec Arnaud Montebourg sur les banques, la "République nouvelle" et l'industrie européenne.
François Hollande s'est pour sa part refusé à tout "zigzag" idéologique tout en rappelant sa volonté de rassemblement.
"Je ne courrai pas pour faire toutes les chansons à tous ceux qui demandent un peu plus", a-t-il souligné.
Un ton plus incisif qu'à l'habitude pour le député de Corrèze. "Je ne me ferai donner aucune leçon, de qui que ce soit", a-t-il dit.
En visite sur un marché parisien, a dénoncé implicitement "les manoeuvres obliques" de Martine Aubry et affirmé qu'il était "pour une gauche solide et sincère".
Prié de dire s'il n'était pas lassé des attaques du camp de Martine Aubry, qui l'accuse d'incarner une "gauche molle", il a répondu : "Je ne sais pas, parce que ce n'est jamais frontal, ce n'est jamais direct. C'est toujours insidieux. Moi, je n'aime pas les manoeuvres obliques."
Le camp d'en face n'est pas en reste, ce qui augure d'un débat plus acide mercredi soir sur France 3 après les trois confrontations policées d'avant-premier tour.
François Hollande peut se prévaloir pour l'heure des soutiens de Manuel Valls, qui a obtenu plus de 5% des suffrages au premier tour, et de Jean-Michel Baylet, président du Parti radical de gauche (0,60%).
Ségolène Royal, grande perdante du premier tour avec quelque 7% des voix, fera connaître son choix d'ici mercredi soir.
Avec Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse
Yahoo!Actualités - 11/10/11